Les bombardements se sont poursuivis toute la nuit près du siège de la télévision d'Etat, rapportent des habitants à l'AFP.
Après sept semaines de guerre entre l'armée, sous le commandement du général Abdel Fattah al-Burhane, et les Forces de soutien rapide (FSR, paramilitaires) du général Mohamed Hamdane Daglo ayant fait plus de 1.800 morts et plus d'un million et demi de déplacés et réfugiés, Washington a haussé le ton.
La Maison Blanche a annoncé des sanctions contre deux entreprises d'armement de l'armée et deux sociétés, dont l'une opérant dans les mines d'or du Soudan, tenues par le général Daglo et deux de ses frères.
Selon une étude de 2019, ces deux sociétés ont transféré des millions de dollars aux FSR depuis et vers des comptes en dirhams aux Emirats arabes unis.
Quelques heures après l'annonce des sanctions, l'armée a annoncé l'arrivée à Khartoum de nouvelles troupes en provenance d'autres Etats du Soudan.
"L'armée devrait lancer prochainement une offensive massive, c'est pour cela qu'elle s'est retirée" des négociations en Arabie saoudite pour une trêve, décrypte sur Twitter la chercheuse Kholood Khair.
- Tués sur un marché -
L'isolement diplomatique, martèlent depuis des années diplomates et experts, n'est pas une réelle menace pour les deux généraux en guerre.
Le général Daglo passe pour l'un des hommes les plus riches du Soudan --troisième producteur d'or d'Afrique-- et peut facilement s'attirer des allégeances, et le général Burhane, comme tous ses pairs dans l'armée, a développé pendant les longues années d'embargo des stratégies pour contourner les sanctions internationales.
Aujourd'hui, "l'armée veut enregistrer des gains militaires pour être dans une meilleure position en cas de reprise des négociations", assure Kholood Khair.
Sous la pression des Etats-Unis et de l'Arabie saoudite, les deux camps se sont engagés il y a trois semaines à "protéger les civils", puis signé deux trêves restées lettre morte.
Les combats continuent de faire des victimes, les pillages se poursuivent et les déplacés sont de plus en plus nombreux.
Mercredi, alors que l'armée sabordait les négociations à Jeddah, elle déployait ses armes lourdes à Khartoum.Depuis lors, les canons n'ont cessé de tonner, tuant mercredi au moins 18 civils sur un marché.
En face, les FSR continuent de prendre leurs quartiers dans des hôpitaux ou des maisons de civils jetés sur les routes du pays, l'un des plus pauvres au monde.
Les combats sont plus durs encore au Darfour (ouest), frontalier du Tchad.
Des déplacés arrivés sur place ont déclaré à l'ONG Médecins sans frontières (MSF) avoir vu "des hommes armés qui tirent sur les personnes cherchant à fuir à pied, des villages pillés et des blessés qui agonisent".
- Mission de l'ONU expirée -
Et la situation pourrait se compliquer davantage avec l'approche de la saison des pluies, souligne Christophe Garnier, coordinateur d'urgence de MSF.
L'été est généralement la saison du paludisme, des pics d'insécurité alimentaire et de la malnutrition infantile.
"Les conditions de vie déjà extrêmement précaires dans les camps de fortune vont empirer et la crue des cours d'eau compliquera mouvements et approvisionnements", prévient M. Garnier..
Et les humanitaires qui, avant la guerre aidaient un tiers des 45 millions de Soudanais, pourraient ne plus être là.
Dix-huit d'entre eux ont été tués et aucun corridor sécurisé n'a été dégagé pour leur permettre d'apporter leur aide.Leurs cargaisons arrivées par les airs sont bloquées aux douanes.Et le personnel international se voit refuser les visas pour venir relever des employés locaux exténués ou terrés chez eux.
Car ils sont également des cibles: "57 de leurs entrepôts et 55 de leurs bureaux ont été pillés et 115 de leurs véhicules volés", rapportent Washington et Ryad.
La situation est "catastrophique", répète inlassablement l'ONU: trois-quarts des hôpitaux ont cessé de fonctionner et le quart restant doit composer avec des réserves quasiment vides.
Vingt-cinq millions de personnes ont besoin d'aide et la moitié des 350.000 réfugiés, pour beaucoup partis sans rien, se retrouvent dans des pays eux-mêmes en proie à des crises et des violences.
Le Conseil de sécurité doit discuter vendredi du sort de la mission de l'ONU au Soudan, dont le mandat expire officiellement samedi.
Les Emirats arabes unis, président actuel du Conseil, et ses trois membres africains, le Gabon, le Ghana et le Mozambique "ont un rôle crucial à jouer dans cette prise de décision", plaide l'ONG Norwegian refugee council (NRC).
Le général Burhane a déjà réclamé le remplacement du chef de la mission, Volker Perthes, et la plupart de ses membres ont été évacués du pays au début de la guerre.
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