Une odeur de fumée se dégage des brûlis à l'entrée de la parcelle de Majimbini, soumise au régime forestier depuis 2020, où toute activité agricole est interdite.
Des bananiers et des plants de manioc, de plus de deux mètres, s'étendent à perte de vue sur plus de 20 hectares."Je n'ai jamais vu de plants aussi hauts", s'étonne le capitaine de gendarmerie Jean-Marc Fabre.
L'état de la forêt de Mayotte se dégrade, à cause notamment des productions agricoles illégales, du prélèvement des eaux de rivière ou encore de l'abattage excessif des arbres.
Selon l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), le taux de déforestation annuel de Mayotte atteint 1,2%, faisant de l'île le département le plus déforesté de France.
"Ils ont vachement replanté ici, la déforestation est impressionnante depuis quatre ans.Avant c'était de la forêt dense ici", soupire le gendarme.
L'opération, d'une "ampleur inégalée" selon la préfecture, menée par les services de l'ONF, de la direction de l'alimentation de l'agriculture et des forêts (DAAF) et de la gendarmerie, vise à lutter contre ces atteintes à l'environnement.
Cinquante personnes ont été mobilisées lors de cette intervention mercredi et jeudi pour détruire 18 hectares de cultures sur la plantation illégale.
La parcelle se situe près du village de Vahibé, qui crée récemment de nombreux troubles à l'ordre public."C'est un secteur où les automobilistes sont régulièrement caillassés et d'où les cultivateurs proviennent", précise le capitaine Yann Frappier, qui dirige l'opération.
Son escadron est venu de l'hexagone dans le cadre de l'opération "W" (Wuambushu, NDLR).
Outre la lutte contre l'immigration illégale, la réduction de l'habitat insalubre et le maintien de l'ordre, l'arrivée massive de gendarmes à Mayotte permet d'appuyer les services de l'Etat sur des actions mises en suspens ces derniers temps.
- Installations précaires -
Sur place, les installations sont précaires: de l'eau fuit abondamment d'un tuyau censé arroser les plants, alors que Mayotte subit une sécheresse extrême depuis de longs mois.
"Là c'est un captage d'eau sauvage.Et vous voyez les tuyaux là-bas, ils détournent aussi dans les hauteurs sur l'autre versant.Quand on connaît les problème d'eau ici à Mayotte...", se désespère le capitaine Fabre.
La parcelle se trouve non loin de la retenue collinaire de Combani, à peine remplie à 47,1% à l'issue de la saison des pluies, contre 98% en moyenne habituellement.
Un agent de l'ONF donne ses consignes pour l'opération à venir: "On va détruire à la racine avec les coupe-coupe" (machettes).
Dans les hauteurs, ils découvrent des plants de tomates avec des tuteurs, mais aussi des boutures.La terre est encore fraîche, elle vient d'être arrosée.
"C'est impossible de faire pousser les tomates ici, à cause du soleil et des insectes qui se nourrissent du fruit", rappelle Andy Ali, garde-nature pour le conseil départemental.
Les boutures sont protégées du soleil de plomb par des nappes et tissus de fortune.Et en contrebas, les gendarmes tombent sur des sacs et des restes de produits phytosanitaires.
"La production contient des produits phytosanitaires importés des Comores, interdits en France, dans des quantités astronomiques", avec des taux jusqu'à 800 fois supérieurs aux normes européennes, souligne le capitaine Fabre.
Une problématique réelle pour l'île puisqu'une part significative de ces productions se retrouve vendue sur les bords de route à Mayotte.
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