AmaBhungane, média indépendant financé par des ONG et du crowdfunding, a mis au jour des conflits d'intérêts entre le groupe Moti, du riche homme d'affaires Zunaid Moti, et l'administration du président zimbabwéen Emmerson Mnangagwa, dans le but de promouvoir ses intérêts miniers. Ces informations étaient fondées sur des documents confiés aux journalistes par une source bien informée. Dans une procédure en urgence "ex parte", ce qui signifie en l'absence de l'autre partie, le groupe Moti avait obtenu d'un juge début juin qu'il prononce le gel de toute publication sur le dossier Moti et l'obligation pour AmaBhungane de remettre les documents compromettants. Les journalistes ont contesté cette décision. Et lors d'une audience la semaine dernière à Johannesburg, le juge Roland Sutherland s'est demandé "comment diable" un confrère avait pu prononcer une telle mesure dans ces circonstances. Selon le groupe Moti, ces documents obtenus illégalement ne pouvaient pas être utilisés par les journalistes. Par ailleurs, les informations personnelles contenues n'étaient pas d'intérêt public. Au cours de l'audience qui a duré plus de cinq heures, tout l'enjeu a consisté à faire la part entre liberté de la presse et protection de la vie privée. Dans sa décision rendue lundi et dont l'AFP a obtenu copie, le tribunal de Johannesburg a "annulé dans son intégralité" la décision précédente visant amaBhungane. Sur le caractère urgent et "ex parte" de la procédure, le juge Sutherland a estimé qu'elle constituait "un abus de procédure". Sur l'obligation de remettre les documents compromettants, le juge a estimé qu'"aucun argument convaincant n'a été avancé pour obliger les parties défenderesses à divulguer les fichiers". "Un journaliste qui a reçu des informations à titre confidentiel est fondé à refuser d'accomplir un acte susceptible de démasquer la source", a-t-il rappelé. "Nous nous réjouissons de cette victoire éclatante pour le journalisme d'investigation et le rôle qu'amaBhungane a joué en pratiquant le journalisme avec intégrité et dans l'intérêt public", s'est félicité auprès de l'AFP le rédacteur en chef d'amaBhungane, Sam Sole. Le tribunal a condamné le groupe Moti à régler les frais de justice.
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