Madagascar: La présidentielle? "Personne ne nous regarde..."

Infos. Un soleil blafard monte encore sur les collines d'Antananarivo quand les porteurs d'eau entament leurs va-et-vient vers les fontaines publique. 

Madagascar: La présidentielle? "Personne ne nous regarde..."
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Antananarivo (AFP)

Dans la capitale malgache, de nombreux foyers n'ont pas accès à la précieuse ressource alors, pour certains, la présidentielle n'est qu'une lointaine préoccupation.

Les Malgaches sont appelés aux urnes jeudi pour choisir leur prochain président. 

Une partie de l'opposition a appelé au boycott du scrutin et dénoncé des irrégularités alors que le président sortant, Andry Rajoelina, se dit assuré d'une victoire au premier tour.

Mais aux yeux de beaucoup, dans ce pays parmi les plus pauvres de la planète, peu importe qui l'emporte. 

"Personne ne nous a jamais regardés", lance avec désillusion à l'AFP Olivier Randrianatenaina, un porteur d'eau de 19 ans. Il ira peut-être voter dans deux jours, mais il "n'espère pas grand chose" du prochain président. Lui est plus préoccupé par ses livraisons.

Chaque jour, le jeune homme en short et claquettes récupère des bidons vides de 20 litres auprès de clients dont certains sont réguliers. 

Il les remplit aux points d'eau de la ville et retourne les livrer contre l'équivalent de 10 à 20 centimes d'euros, le prix variant en fonction de la distance et de la raideur de la pente.

Les rues échevelées de la ville ne sont pas faciles à négocier.Et les porteurs s'y mettent souvent à plusieurs pour tirer les lourds chariots où sont hasardeusement empilés les bidons.

A Madagascar, près de la moitié de la population n'a pas accès à l'eau et seulement 12% à l'assainissement, selon la Banque mondiale. 

Avec des infrastructures vieillissantes, la compagnie publique Jirama est incapable de répondre aux besoins des 3,4 millions qui vivent entassés à Antananarivo et ses faubourgs. 

- "Tout est dur" -

En cas de panne, des camions citernes peuvent alimenter les maisons confortablement assises sur les hauteurs de la ville.Mais dans les coins populaires appelés ici les "bas-quartiers", au pied des collines, ils n'apparaissent que rarement. Et certains foyers ne sont tout simplement par raccordés. 

Louise Razanajafy, 58 ans, chasse d'un geste las les mouches dans son "épicerie" faite de lattes de bois clouées et d'un morceau de tôle en guise d'auvent. 

Un écriteau soigneusement rédigé à la main vante les mérites d'une soupe aux légumes mais dans le présentoir, une triste assiette de nouilles trône sous des œufs frits.

"On n'a pas d'eau à la maison", explique-t-elle en s'occupant de son petit-fils qui comme tous les jours passe par ici avant d'aller à l'école."Quand on veut se laver on prend de l'eau à la fontaine publique et on utilise des seaux".

Salvina Raharivony, 23 ans, est la gardienne des clefs du point d'eau du quartier.Elle ouvre la porte chaque matin à 05h30 et la referme à 18H00: "Les gens du voisinage souffrent de ne pas avoir d'eau chez eux et parfois, on ne sait même pas pourquoi ça coupe". 

Assise sur le trottoir, une femme écosse des haricots qu'elle tentera de vendre, un bébé accroché au sein.Un coq, hissé sur une benne à ordures, chante et des chiens sans collier rôdent.

En face, des chauffeurs de taxi profitent aussi de l'eau pour laver leurs voitures bringuebalantes. Trois d'entre eux rafistolent une portière. 

"Presque tout est dur" à Madagascar, lâche Barry Randriandimby, chômeur de 37 ans.Avec une légère expression de dépit, il se félicite d'être encore célibataire: "C'est pour ça que j'arrive à m'en sortir". 

Il n'ira pas voter, jure-t-il.Parce que "ceux qui sont élus finissent par repartir avec un gros paquet de pognon.Et les pauvres, ils restent pauvres". 

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