Bravian Mise fait partie d'une troupe d'une centaine d'enfants, soutenus par le Dance Centre Kenya (DCK), qui répètent depuis des mois le ballet de Tchaïkovski, Casse-Noisette.
Le célèbre ballet raconte l'histoire de la jeune Clara qui se voit offrir, un soir de Noël, un pantin inanimé, un casse-noisette.Durant la nuit, les jouets s'animent et le casse-noisette se transforme en prince.
"Je n'avais jamais entendu parler de ce ballet avant de l'interpréter", sourit Bravian Mise.Mais cela n'entame en rien sa détermination."J'adore danser, je danse parce que c'est magnifique", poursuit-il, juste avant de monter sur scène.
- Mois de travail -
Mais avant le lever de rideau, des mois de travail ont été nécessaires, sous la supervision de Cooper Rust.
L'Américaine, ancienne danseuse professionnelle devenue professeure, est la directrice artistique de DCK et est à la tête l'ONG Artists for Africa, qui donne des cours de danse aux enfants défavorisés de Nairobi.Et met un point d'honneur à créer une troupe avec des enfants issus de milieux différents.
"Il est important de montrer au monde que le ballet n'est pas réservé à un type de personne en particulier.Le ballet est une question de talent, de passion, et non milieu socio-économique", affirme Cooper Rust.
"Nous n'avons pas de compagnie de ballet professionnelle au Kenya", déplore-t-elle, avant de rapidement préciser: "Pour l'instant, mais nous y arrivons".
La jeune troupe composée d'une centaine d'enfants, âgés de 7 à 17 ans, se produit dans l'enceinte du théâtre national de Nairobi.Le ballet a nécessité des centaines de costumes et d'accessoires.
Pendant presque deux heures, les enfants se succèdent sur scène, accompagnés par la musique jouée en direct par un orchestre kényan.Et le public est conquis, notamment lors de l'interprétation de la fameuse danse russe.
Bravian savoure ce moment, car rien ne le prédestinait à faire de la danse.Le collégien vit avec son frère, sa sœur et ses parents à Kuwinda, un bidonville à l'ouest de Nairobi.
Il a commencé à danser voilà quatre ans et reçoit une bourse - comme une cinquantaine d'autres enfants - pour s'acheter l'équipement et payer le transport pour se rendre aux répétitions. Ce que beaucoup de familles ne pourraient pas se permettre.
Comme Rehema Mwukali, mère de Bravian, qui regarde avec admiration son fils s'entraîner. Elle n'a pas d'emploi fixe, et son mari travaille sur des chantiers.
- "Plus dur" -
"C'est beaucoup plus dur pour les enfants qui viennent de milieux défavorisés, il faut qu'ils travaillent davantage pour y arriver", assure-t-elle, avant de conclure: "Je suis si fière de lui, il réussira".
Bravian fait quotidiennement ses exercices dans un petit salon à l'atmosphère étouffante, pas perturbé par la musique qui émane d'un bar à proximité.
Malgré les difficultés, il l'affirme: "Un jour, je serai danseur professionnel".
Mais la marche est encore haute pour les jeunes aspirants.Plus d'un millier d'enfants sont passés par la DCK depuis sa fondation en 2015.
Pour l'instant, un seul est devenu professionnel, Joël Kioko, qui vit désormais aux Etats-Unis."Mais notre école n'a même pas neuf ans, et il en faut au moins dix pour former un danseur", relativise Cooper Rust, "absolument sûre" que d'autres élèves deviendront aussi professionnels.
Et beaucoup de jeunes originaires de milieux modestes regardent avec admiration le parcours de Lavender Orisa.
La jeune femme de 17 ans, originaire de Kibera, le plus grand bidonville de la capitale kényane, a reçu l'année dernière une bourse pour étudier à l'école nationale du ballet, à Londres.
"Étant originaire de Kibera, c'était impossible pour moi d'envisager un jour danser à Londres" à l'English National Ballet School, assure la jeune femme de retour à Nairobi pour finir sa scolarité.
"Les gens me disent que je suis une source d'inspiration pour eux", poursuit-elle dans un sourire gêné, tiare sur la tête avant de monter sur scène.
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