Hashim Abdullah préfère rester derrière les barreaux de fer qu'il a érigé entre lui et ses clients, dans sa petite épicerie de Soweto.Comme de nombreux commerçants étrangers, il a fortifié sa boutique, suite aux menaces répétées visant à l'expulser du township.
"Nous ne sommes pas entièrement en sécurité ici.Certaines personnes veulent que nous partions, mais pas tout le monde", soupire ce Bangladais de 42 ans.
Des dizaines de commerces appartenant à des étrangers - surtout des Somaliens, des Pakistanais et des Ethiopiens - ont fermé ces deux derniers mois dans ce célèbre township de la banlieue de Johannesburg.Certains ont été pillés et saccagés.
Victime d'intimidations, Hashim Abdullah a dû baisser son rideau pendant dix jours.Sa petite échope du bord de la route, dans un bâtiment décrépit, propose des produits de première nécessité, comme du savon, du riz, du pain et des sodas.Elle ressemble à une forteresse: les clients glissent d'abord de l'argent par un petit trou entre les barres, avant qu'il aille chercher les denrées.
"C'est mieux ainsi, parce qu'il est difficile de dire qui vient ici pour faire du grabuge ou pas", note-t-il.
Cet homme arrivé en Afrique du Sud il y a trois ans dit pourtant qu'il n'a aucune intention d'abandonner son commerce.Au contraire, il veut s'agrandir.
Les tensions anti-immigrés sont latentes dans les townships sud-africains depuis la vague de violences xénophobes qui ont fait 62 morts en 2008.Et les commerçants étrangers sont régulièrement menacés dans les régions de Johannesburg et du Cap, ou encore dans le Cap oriental, dans le sud du pays.
Makhosana Mhlanga, le président du "Greater Gauteng Business Forum", un groupe récent qui appelle à l'expulsion des immigrants, a expliqué à l'AFP que Soweto était interdit aux étrangers.
"Nous ne voulons pas d'eux dans nos townships.Ils envahissent notre espace et détournent des opportunités qui devraient être utilisées par la population locale", déclare-t-il.
Le Forum accuse les commerçants étrangers de casser les prix pour écraser leurs concurrents autochtones.Il a même envoyé des "avis d'éviction" - évidemment illégaux - ordonnant aux étrangers de fermer boutique.
Tout le monde n'est cependant pas d'accord avec lui.Certains apprécient les boutiques appartenant à des étrangers, qui souvent ouvrent tôt et ferment tard, contrairement à la plupart des magasins en Afrique du Sud.
"Je suis contre l'idée de chasser les étrangers.Leurs magasins sont proches et vous pouvez facilement y aller à pied quand il vous manque quelque chose", constate Portia Selote, une habitante de Soweto.
Un groupe de Sud-Africains a même organisé une marche pro-immigrés en mars dernier, scandant "Nous voulons que les Somaliens restent".Parce que, ont-ils expliqué, les Somaliens offrent des prix plus bas.
Amir Sheikh, secrétaire général du conseil de la communauté somalienne, admet que les conditions sont difficiles pour ses compatriotes commerçants dans les townships.
En mai, un Somalien a été tué dans son magasin à Khayelitsha près du Cap, et il y a eu d'autres meurtres similaires dans les townships du pays, raconte-t-il.
Mais ces incidents restent selon lui assez isolés, dans un pays où les taux de criminalité sont alarmants, avec une moyenne de 46 meurtres par jour.
"Les meurtres sont brutaux et inquiétants", juge M. Sheick, qui relativise aussitôt: "Nous n'avons aucun problème dans les quartiers où nous travaillons.Il s'agit d'un petit groupe de personnes qui s'auto-proclament hommes d'affaires, qui sont jaloux."
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