"Nous n'avons pas peur, nous ne nous arrêterons pas" ont scandé des manifestants dans les rues du quartier Buri, après les funérailles d'un protestataire tué jeudi dans ce secteur de l'est de Khartoum, lors d'affrontements entre police et manifestants.
Depuis le 19 décembre, le Soudan est secoué par un mouvement de contestation déclenché par une hausse des prix du pain et des médicaments ainsi que par des pénuries, dans ce pays en plein marasme économique.Les manifestations se sont ensuite transformées en rassemblements quasi quotidiens appelant au départ d'Omar el-Béchir, au pouvoir depuis 1989.
Des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux montrent un cortège suivant le corps du protestataire tué, enveloppé dans un linceul et transporté vers le cimetière de Buri.Des hommes et des femmes scandent des slogans contre le régime.Derrière les manifestants, une épaisse fumée se dégage de pneus et de poubelles en feu.
Certains ont tapé des mains et fait le "V" de la victoire, quand d'autres brandissaient le drapeau soudanais, selon des témoins.
Avant de se rendre au cimetière, certaines personnes ont attaqué un véhicule de police proche, d'après des témoins.
"Les policiers ont dû quitter le véhicule et fuir", a rapporté l'un d'eux, précisant que des manifestants étaient montés sur la voiture pour la piétiner, tandis que d'autres les applaudissaient.
- "Liberté, paix, justice" -
Lors d'un autre rassemblement, à Omdourman, la ville jumelle de Khartoum, des fidèles musulmans ont scandé "Liberté, paix, justice" dans une mosquée où ils s'étaient rendus pour la prière du vendredi, selon des témoins.
"Après les prières, ils se sont pressés à l'extérieur de la mosquée en chantant des slogans contre le gouvernement", a indiqué l'un d'eux à l'AFP."La police anti-émeute les a dispersés", a ajouté cette source.
Plus tard vendredi, d'autres rassemblements ont eu lieu dans le quartier de Bahari, dans le nord de Khartoum, et à Oumdourman, mais ont été rapidement dispersés par la police, selon des témoins.
Jeudi, la police anti-émeute a dispersé au gaz lacrymogène des centaines de manifestants qui marchaient vers la présidence à Khartoum.
Lors des manifestations à Khartoum, un médecin et un enfant ont été tués "par balles", a indiqué un comité de médecins lié à l'Association des professionnels soudanais, un groupe en première ligne de la contestation.
Le comité de médecins n'a pas précisé qui était à l'origine de ces tirs et a affirmé que d'autres personnes avaient été blessées par balles.Les proches des deux victimes ont confirmé ces décès à l'AFP.
Un porte-parole de l'Association des professionnels soudanais, qui regroupe notamment des médecins, des professeurs et des ingénieurs, a ensuite fait état d'une troisième personne tuée jeudi.
Vendredi, la police soudanaise a fait état de seulement deux personnes mortes la veille, décédées des suites de leurs blessures.Le porte-parole de la police, le général Hashim, a par ailleurs assuré que les forces de sécurité n'avaient pas eu recours à des balles réelles.
- "Conspirateurs" -
Les autorités soudanaises avaient auparavant fait état de 24 morts depuis le 19 décembre.
L'ONG de défense des droits humains Amnesty International a elle évoqué la semaine dernière 40 morts, dont des enfants et des personnels médicaux, et plus de 1.000 arrestations.
Dans un communiqué, elle a appelé vendredi Khartoum à mettre fin à la répression "meurtrière" des manifestations, après avoir accusé les forces de sécurité de tirer des gaz lacrymogènes et des balles réelles à l'intérieur d'hôpitaux.
Sarah Jackson, directrice adjointe de l'ONG pour l'Afrique de l'Est, a dénoncé le fait que "les forces de sécurité soudanaises continuent d'utiliser la force létale contre des manifestants et contre des (...) médecins".
Plusieurs membres du Conseil de sécurité de l'ONU ont appelé Khartoum à enquêter sur les violences.
Le Soudan "est pleinement engagé à donner aux citoyens un espace pour qu'ils expriment pacifiquement leurs opinions", a affirmé l'ambassadeur du Soudan à l'ONU, Omer Dahab Fadl Mohamed.
Mais les autorités agiront "pour protéger les vies et les biens publics contre le sabotage et les incendies criminels et contre toute autre forme de violence perpétrée par certains manifestants", a-t-il ajouté.
Le président Omar al-Béchir a lui imputé les violences à des "conspirateurs", sans toutefois les nommer.
Au-delà de la baisse des subventions pour le pain, le Soudan fait face à un grave déficit en devises étrangères.Les habitants sont confrontés à des pénuries régulières d'aliments et de carburants, tandis que les prix de certaines denrées subissent une forte hausse.
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