Ce mercredi 6 novembre, cela fait 42 ans jour pour jour que Paul Biya est président du Cameroun. A 91 ans, il est le plus vieux dirigeant en exercice du monde. Alors que des rumeurs sur sa santé ont récemment circulé, et qu'il a démenties par un retour au pays, revenons sur ces quatre décennies de pouvoir en cinq événements clés.
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L'accession au pouvoir dès 1962
Dès son retour de Paris, où il était parti poursuivre ses études, Paul Biya est nommé en 1962 chargé de mission à la Présidence. Il gravit rapidement les échelons et devient ministre, puis secrétaire d'État général de la présidence en 1968. En 1975, il accède au poste de Premier ministre sous le président Ahmadou Ahidjo, au pouvoir depuis 24 ans. Après l'annonce de la démission de ce dernier le 4 novembre 1982, Paul Biya est désigné chef d'Etat du Cameroun, conformément à la Constitution. Il est élu à l'élection présidentielle deux ans plus tard, en 1984, puis réélu sept fois de suite, restant à la tête du pays pendant 42 ans. Les prochaines élections sont programmées pour 2025, mais Paul Biya ne s'est pas encore prononcé sur sa candidature.
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De 1982 à 1984, le conflit avec Ahmadou Ahidjo
Les tensions entre l'ex-président Ahmadou Ahidjo et Paul Biya se sont intensifiées après sa démission. Écarté du pouvoir, Ahidjo reste le chef du parti unique, l'Union nationale camerounaise (UNC). Pendant un séjour en France en 1983, il annonce sa démission. En réponse, Paul Biya modifie la constitution en janvier 1984 pour supprimer le poste de Premier ministre. Ce poste ne sera rétabli qu'en avril 1991, lors de la période de l'opération « villes mortes » menée avec Sadou Hayatou.
Pour consolider son pouvoir, Paul Biya organise des élections en janvier 1984. Unique candidat, il est élu président du Cameroun. Cependant, cette légitimité électorale ne l'empêche pas d'être confronté à une tentative de coup d'État en avril 1984, attribuée à Ahmadou Ahidjo et à ses partisans, qui sont accusés et condamnés à mort par contumace le 6 avril 1984. L'ex-président Ahmadou Ahidjo meurt en 1990 au Sénégal, sans jamais être retourné au Cameroun. En septembre 1984, Paul Biya avait succédé à l'ancien président à la tête du parti UNC.
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En 1990 et 1991, le Mouvement des « Villes mortes »
Au début des années 1990, un mouvement de protestation sous forme de grèves générales, appelé « villes mortes », se développe. Les Camerounais exigent la restauration du multipartisme. À l’intérieur même de son propre parti, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), anciennement l'UNC, Paul Biya fait face à des tensions politiques. En réponse, il propose une série de réformes législatives, qui sont votées en décembre 1990 lors d'une session dite des « libertés ». Le multipartisme est rétabli, et d'autres libertés, comme la liberté de la presse et des associations, sont accordées. Cependant, les demandes politiques locales restent insatisfaites. En 1991, des manifestations éclatent pour exiger une Conférence nationale souveraine.
Les protestations des « villes mortes » se poursuivent et la population camerounaise se mobilise en refusant toute activité économique. Ils mettent en place des actions de désobéissance civile, comme le non-paiement des taxes. Face à cette situation, Paul Biya est contraint d'ouvrir le dialogue avec les représentants de la société civile et les figures de l'opposition. Cette négociation aboutira à la « Conférence tripartite », qui permet d'élaborer un nouveau Code électoral et un statut pour l'opposition, contribuant ainsi à apaiser les tensions.
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En 1994, l'affaire Bakassi
Le 29 mars 1994, Paul Biya dépose une requête devant la Cour internationale de justice (CIJ) contre le Nigéria pour la délimitation de la souveraineté sur la presqu'île de Bakassi et la frontière maritime entre les deux pays. Le Cameroun accuse le Nigéria d'agression et d'occupation illégale de ce territoire, ainsi que de violation des principes du droit international. Une requête additionnelle est déposée en 1994, étendant la demande à une autre partie du territoire camerounais autour du lac Tchad.
En octobre 2002, la CIJ reconnaît la souveraineté du Cameroun sur la presqu'île de Bakassi. Six ans plus tard, le 14 août 2008, le Cameroun retrouve officiellement sa souveraineté sur ce territoire.
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En 2018, la dernière réélection
Le 7 octobre 2018, Paul Biya est réélu pour son septième mandat de 7 ans, dans un contexte marqué par un regain des violations des droits humains et une dégradation de la situation sécuritaire, notamment dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Journalistes et travailleurs humanitaires sont victimes de disparitions forcées. Le président de l'association de défense des droits humains Frontline Fighters for Citizen Interest (FFCI) est porté disparu depuis le 6 août 2018, après avoir été en mission à Kumba, dans la région du Sud-Ouest, pour documenter des violations des droits humains liées à la crise anglophone.
Six journalistes sont arrêtés à travers le pays pendant cette période en raison de la publication d’informations critiques sur la gestion de la crise anglophone par les autorités camerounaises. Les disparitions forcées continuent, le 26 février 2023, le journaliste Martinez Zogo est enlevé, torturé puis assassiné.
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