Écoutez le producteur et réalisateur Raoul Peck
En anglais, Ernest Cole, photographe devient le titre évocateur : Ernest Cole : Lost and Found. Perdu puis retrouvé, pour évoquer cette année 2017, où 60 000 négatifs du photographe sont retrouvés dans le coffre d’une banque suédoise. À ce jour, personne ne sait comment ils ont atterri là-bas.
Ernest Cole : Lost and Found, pour évoquer aussi le lien rompu puis retrouvé entre le photographe et Raoul Peck. Ce dernier découvre les travaux d’Ernest Cole en 1970, à l’âge de 17 ans. “C'était au début de la lutte anti-apartheid. J'étais étudiant à Berlin et c'est vrai que ses photos étaient les premières photos qui montraient la barbarie de l’Apartheid, le fait que les Noirs n'étaient pas considérés dans leur propre pays. Et le monde entier découvrait à travers ces photos toute l'horreur de ce régime. Donc nous on s'en servait dans des buts politiques, bien sûr, et sans savoir, à l'époque, qui avait fait ces photos”, se rappelle Raoul Peck.
Leurs routes se croisent à nouveau, 46 ans plus tard, lorsque la famille d’Ernest Cole contacte Raoul Peck et lui demande s’il ne veut pas réaliser un documentaire sur lui. “J'étais en plein dans un autre projet, "Exterminez toutes ces brutes" et je leur ai dit que ce n’était pas possible. Par contre, mon équipe a continué de travailler avec eux. On a découvert les photos, on a découvert tout son patrimoine, ses écrits, etc. Et deux ans après, j'ai décidé de lancer la production autour de cette histoire”, explique le réalisateur.
Ernest Cole, le photographe censuré qui retrouve sa voix
“La dernière chose que les blancs d’Afrique du Sud sont prêts à voir, est un noir d’Afrique du Sud avoir une voix”, écrit Ernest Cole dans son livre House of Bondage.
Pendant près d’1h46 Raoul Peck introduit - ou réintroduit - le travail du photographe et surtout, il expose ses pensées et sa vision, avec une narration à la première personne, possible grâce aux témoignages de personnes qui l’ont côtoyé et en s’appuyant sur son ouvrage.
Ernest Cole, naît en 1940 à Pretoria, en Afrique du Sud et subit les lois de l’Apartheid. Sans diplôme, il enchaîne les petits contrats en tant qu'agent d’entretien. Il réussit à devenir assistant photographe dans un studio à Johannesbourg, qui lui inspirera l’idée de photographier la vie des noirs d’Afrique du Sud.
Crédit : Ernest Cole / Condor Films
La lecture du livre “Les gens de Moscou”, du photographe Henri Cartier-Bresson sera pour lui un déclic et inspirera l’écriture et composition de House of Bondage. La publication de cette œuvre, en 1967, le mènera à s’exiler aux États-Unis, où il photographiera la vie des Afro-américains dans le Sud et les villes du Nord. Il vivra également en Suède. Son livre sera censuré en Afrique du Sud.
Ernest Cole, un personnage qui fait écho à la vie et aux idées de Raoul Peck
Après Patrice Lumumba ou encore James Baldwin, Raoul Peck présente un personnage historique dont la vie et les idées permettent au réalisateur d'évoquer des thématiques sur lesquels le réalisateur s'est toujours engagé et celles qui font écho à sa vie.
Les personnages mis en avant par le réalisateur, ont en commun d’avoir dénoncé des systèmes violents et inégalitaires comme la colonisation, la ségrégation, ou encore les génocides. “Mon travail a toujours été politique”, rappelle Raoul Peck.
Pour Patrice Lumumba, ses idées mèneront à son assassinat. Quant à James Baldwin, héros du documentaire I Am Not Your Negro et Ernest Cole, la dénonciation des inégalités dans leurs pays les mèneront à l’exil.
Un départ forcé, du côté d’Ernest Cole, qui pèsera sur son moral. Il mourra d’un cancer du pancréas, à 49 ans aux US, en 1990, sans jamais revoir son pays et notamment la fin de l’Apartheid, qui survient en 1991.
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