Progressivement, les calottes rouges se regroupent pour préparer le Conclave. Ce flot de 135 cardinaux, dont 80 % ont été nommés par le pape François, dépose ses affaires dans la frugale résidence Sainte-Marthe au Vatican. La plupart d’entre eux ne se connaissent pas. Ensemble, ils assisteront aux obsèques, samedi 26 avril, du souverain pontife argentin, décédé lundi 21 avril d’un accident cérébrovasculaire. Les cardinaux, électeurs et observateurs, se replieront ensuite à la Chapelle Sixtine, et l’élection papale démarrera.
Cloîtrés sous les fresques du premier livre peint par Michel-Ange, certains hommes de Dieu se démarquent de leur prédécesseur en se montrant sévères envers les divorcés, les homosexuels ou les réformes. D’autres marchent dans les pas du Saint-Père, manifestant leur position incisive et progressiste.
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Le nombre de fidèles chute : entre 1981 et 2018, la part des Français se disant catholiques est passée de 70 % à 32 %, selon l’enquête européenne sur les valeurs (Arval). À l’échelle mondiale, Ipsos indique qu'en 2023, dans les seize pays où les catholiques sont les plus nombreux, la population croyante appartenant à la génération Z diminue. Le clergé aussi se clairseme. Le monde connaît une baisse globale des prêtres, selon le Vatican. À ces multiples problématiques s’ajoutent les les violences endurées par des commauté de fidèles et les tensions internes de l’Église.
Le cardinal Sarah//Catholic Chruch England
Le cardinal Sarah
Fermement opposé aux réformes et aux “projets diaboliques” — comme la projet de suppression de la messe en latin — initiés par son supérieur, le guinéen est un adepte du traditionalisme. Une pratique caractérisée par l'utilisation de rites antérieurs à la réforme de l’Église catholique des années 60, connue sous le nom de Vatican II. Ces usages sont codifiés, par exemple : la messe tridentine est célébrée en latin, avec le prêtre dos à l’assemblée, et le silence y fait loi.
Le cardinal Robert Sarah a été créé par Benoît XVI en 2010. François le nomme président de la prestigieuse Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements. Né en 1945 dans une famille animiste, il est évangélisé adoslescent par des missionnaires français. Au lendemain de l’indépendance de la Guinée en 1958, il choisit de rentrer dans les ordres et s’envole pour la Côtes d'Ivoire et la France, pour se former.
Dès 2015, le prélat s’oppose au pape lors du synode - grande réunion de l’Église- sur la famille. Il témoigne de son aversion concernant les divorcés remariés et de l’homosexualité, défendant que « les idéologies occidentales de l’homosexualité́ et de l’avortement, ainsi que le fanatisme islamique, sont ce qu’étaient le nazisme, le fascisme et le communisme au XXe siècle ». Dans Le Figaro, il s’adonne à la théorie du “grand remplacement”, décrivant l’Occident comme “noyé et éliminé par une population d’origine islamique” en raison des “vagues migratoires”, et subissant un “grave déséquilibre culturel, religieux et démographique”. Le cardinal Sarah incarne une branche traditionnelle de l’Église.
Le cardinal Brislin//Wikimedia Commons
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Le cardinal Brislin
Lors du synode, le pape pouvait compter sur des soutiens, dont Stephen Brislin, archevêque du Cap et président de la Conférence des évêques catholiques d’Afrique australe. Issu d’une famille d’Irlandais, l’afrikaner a insisté sur la nécessité pour l’Église de symboliser “une maison pour tous”, y compris pour les personnes marginalisées, appartenant à la communauté LGBTQ+ ou les divorcés remariés. Nommé cardinal en 2023, il mêle doctrine catholique et engagement social.
Sous son impulsion, l’Église sud-africaine a déposé un recours collectif en justice au nom des mineurs atteints de maladies pulmonaires contre des compagnies minières locales, rapporte TV5 Monde. Cette procédure vise à obtenir des réparations pour ces travailleurs noirs. Grâce à ses nombreuses prises de position, le cardinal Brislin s’est illustré pour la préservation de la paix sociale et de la démocratie dans son pays.
Le religieux lance des appels forts. En janvier dernier, au micro de Radio Vatican, il s’indigne du niveau de pauvreté du pays. Ce dernier est décrit comme une crise, “un scandale” qui croît. Une situation anormale à laquelle “[n]ous nous sommes habitués", "comme une sorte de phénomène naturel” déclare t-il. Pour endiguer cette situation, le sud-africain a insisté sur la nécessité d’une collaboration entre les différents secteurs afin de réduire cette crise : “le problème est tellement important qu’aucun groupe ne peut le résoudre seul”.
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Le Cardinal Ambongo//Wikimedia Commons
Le cardinal Ambongo
Nommé par le pape Français en 2019, le cardinal Ambongo s'est rapidement engagé contre la corruption, la pauvreté et l'instabilité politique. Seul africain à bénéficier d'une place au Conseil des cardinaux du pape, le comité consultatif du pontife. Fredolin Ambongo Besungu est accusé de provocation trompeuse, de propagation de fausses rumeurs, d’incitation à la révolte et aux actes violents. Lors de la messe pascale en 2024, le cardinal Ambongo a critiqué la gouvernance de Félix Tshisekedi, président de la République démocratique du Congo (RDC). Il a dénoncé la corruption financière, les failles du système judiciaire, la gestion de la crise sécuritaire et remis en question la puissance militaire du pays.
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Pour le procureur général Firmin Mvonde Mambu, ces déclarations “violentent délibérément les consciences”. Une enquête s’est ouverte en avril 2024, suite à l’absence du cardinal à la convocation du procureur, convocation que l’homme de foi dit n’avoir jamais reçue. Pour la CENCO (Conférence épiscopale nationale du Congo) et l’Assemblée du clergé de Kinshasa, ses déclarations visent à éveiller les consciences plutôt qu’à recourir à la violence. Cette affaire est suivie de près par le Vatican.
"Les unions de personnes du même sexe sont considérées comme contradictoires aux normes culturelles et intrinsèquement mauvaises", affirme le conservateur congolais. Il résiste à la volonté de changement de Sa Sainteté concernant la bénédiction accordée aux couples de même sexe. Une initiative autorisée par le souverain via la déclaration Fiducia Supplicans en décembre 2023. Malgrès cela, en janvier 2024, il signe une lettre collective exprimant son refus, déclarant que cette pratique n’est “pas appropriée pour l’Afrique” et qu’aucune bénédiction de ces couples ne sera donnée par les Églises africaines.
Le cardianal Vasco//Diocèse d'Alger
Le cardinal Vasco
Naturalisé en 2023 par Abdelmadjid Tebboune, président algérien, Jean-Paul Vesco, archevêque d’Alger, est l’année suivante créé cardinal. L’Algéro-français est engagé en faveur du dialogue culturel et de la coexistence pacifique entre les différentes communautés confessionnelles du pays.
Il salue et défend la vision insufflée dans la Déclaration d’Abu Dhabi sur la fraternité, signée par le pape François et le Grand Imam d’al-Azhar. Fondée sur le respect, la dignité, et la reconnaissance des singularités, notamment entre les chrétiens et les musulmans algériens. Jean-Paul Vesco invite à ne pas minimiser “les grands problèmes communs à tous, qui constituent les véritables enjeux de l’homme”, notamment la santé, le développement, la mondialisation, ou encore la place de la femme dans la société.
Dans une interview accordée à la journaliste de La Vie, envoyée spéciale permanente à Rome, le cardinal Vesco admet évoluer “essentiellement dans un environnement féminin”. Entouré d’une équipe restreinte, “les avis de chacun et chacune ont été entendus”.
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Le cardinal Turkson//Wikimedia Commons
Le cardinal Turkson
Fervent défenseur des droits humains, Peter Kodwo Appiah Turkson a décroché, en 2024, un prix de la Child Foundation et de l’organisation Telefono Azzurro pour son plaidoyer en faveur des droits de l’homme et de la lutte contre la traite humaine. Cette distinction internationale met en avant sa contribution à la protection des enfants et des adolescents à travers le monde.
Il devient, en 2003 grâce à Jean-Paul II, le premier cardinal ghanéen. À la tête, en 2009, d’un organisme du Vatican dont la mission principale est de promouvoir la justice, le développement, la paix et la résolution des conflits il sera ensuite nommé, en 2017, premier préfet au Dicastère du développement humain intégral.
Reconnu pour son engagement, mais critiqué par des associations LGBTQ+ et des ONG internationales pour ses réactions envers les personnes homosexuelles, il est interviewé par la BBC en 2023. Il y déclare : "Les LGBT et les homosexuels ne doivent pas être criminalisés, car ils n’ont commis aucun crime, mais cette position ne doit pas non plus être imposée à des cultures qui ne sont pas encore prêtes à accepter ce genre de choses." Tout en demandant la compréhension des choix de chacun, le cardinal rappelle la doctrine de l’Église sur la sexualité.
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La liste des cardinaux africains électeurs
Durant le conclave, seuls les cardinaux électeurs peuvent participer à ce vote décisif qui désignera le successeur de Pierre. Voici la liste des cardinaux africains en âge de voter :
- Arlindo Gomes Furtado
Cap-Vert
Créé cardinal en 2015 par le pape François - Dieudonné Nzapalainga
République centrafricaine
Créé cardinal en 2016 par le pape François - Ignace Bessi Dogbo
Côte d'Ivoire
Créé cardinal en 2024 par le pape François - Jean-Pierre Kutwa
Côte d'Ivoire
Créé cardinal en 2001 par Jean-Paul II - Berhaneyesus Demerew Souraphiel
Éthiopie
Créé cardinal en 2015 par le pape François - Désiré Tsarahazana
Madagascar
Créé cardinal en 2018 par le pape François - Peter Okpaleke
Nigeria
Créé cardinal en 2022 par le pape François - Antoine Kambanda
Rwanda
Créé cardinal en 2020 par le pape François - Stephen Ameyu Martin Mulla
Soudan du Sud
Créé cardinal en 2023 par le pape François - Protase Rugambwa
Tanzanie
Créé cardinal en 2023 par le pape François - Philippe Nakellentuba Ouédraogo
Burkina Faso
Créé cardinal en 2024 par le pape François
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