"Mon fils, là, Isak, est le quatrième de mes cinq fils que j'enterre," lâche douloureusement Osmail Moalim Abdi.Comme ses frères, le petit garçon de un an n'a pas survécu à la terrible sécheresse qui frappe la Somalie.
"Tous sont morts de faim, je n'ai pas été capable de les aider," dit-il encore, courbé de chagrin au-dessus de la tombe de son fils, qui jouxte une décharge près de l'aéroport de la capitale Mogadiscio.
Osmail Moalim Abdi est originaire de la province de Lower Shabelle, l'une des régions du sud somalien déclarées en état de famine par les Nations unies et contrôlées par les insurgés islamistes shebab.
Il a fui son village dans l'espoir de trouver de la nourriture et de l'eau dans la capitale pourtant ravagée par des affrontements sanglants entre les shebab et le gouvernement de transition (TFG) soutenu par la force de paix de l'Union africaine en Somalie (Amisom).
Sur l'ensemble de la Corne de l'Afrique, les Nations unies estiment à 12 millions le nombre de personnes affectées par la pire sécheresse en des décennies.Quelque 3,7 millions de Somaliens, soit près d'un tiers de la population du pays, sont en situation de crise.
Beaucoup de Somaliens fuient vers le Kenya et l'Ethiopie voisins la sécheresse mais aussi les conflits qui déchirent leur pays.Le Haut commissariat des Nations unies aux réfugiés (HCR) estime que jusqu'à 100.000 Somaliens ont eux choisi de rejoindre Mogadiscio ces deux derniers mois.
"Nous recevons beaucoup de personnes déplacées tous les jours, et elles ont besoin d'aide d'urgence, le plus vite possible," affirme Muhudin Hasan, un responsable du gouvernement somalien.
Les Nations unies ont appelé à une mobilisation massive de la communauté internationale pour venir en aide aux victimes de la sécheresse.Mais cette aide atteint la population avec peine.
A Mogadiscio, les travailleurs humanitaires sont débordés.
"Beaucoup de gens meurent de malnutrition," relève Mohamed Roble, employé d'une ONG locale."Nous estimons que six ou sept enfants meurent tous les jours," poursuit-il en décrivant la situation du camp où il travaille.
"C'est un désastre mais nous ne recevons pas d'aide pour y faire face," déplore-t-il.
Par manque d'argent, Osmail Moalim Abdi n'a même pas pu offrir des funérailles dignes de ce nom à ses enfants.Avec l'aide d'amis, il n'a pu que creuser une petite tombe d'un mètre de profondeur.
Dans son village de Toratorrow, ses 60 vaches, toute sa fortune, ont péri il y a trois mois.Totalement démuni, il n'a pas eu d'autre choix que de venir à Mogadiscio avec sa famille.
Mais le voyage de trois jours, à pied, vers la capitale s'est transformé en tragédie.
"J'ai perdu deux de mes enfants sur la route, parce que nous n'avions pas de nourriture et presque pas d'eau à boire," raconte ce quadragénaire.Un troisième de ses fils est mort en arrivant à Mogadiscio.
"Je n'ai rien pu faire quand mes enfants sont morts devant ma femme et moi," répète Osmail Moalim Abdi."Il aurait mieux valu que je meure avant eux, comme ça je n'aurais pas été témoin de la tragédie qui a frappé ma famille."
"Ma femme ne dort pas, elle pleure la plupart du temps, ça me rend tellement triste tous les jours," poursuit-il."Nous n'avons plus qu'un enfant et il est très malade.Nous ne savons pas s'il va pouvoir s'en sortir."
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