Le président Alassane Ouattara investit mercredi une Commission réconciliation pour rouvrir le dialogue dans une Côte d'Ivoire déchirée par la crise post-électorale du début 2011, qui a fait au moins 3.000 morts.
"Le grand rêve de Ouattara", titre en Une mercredi le quotidien d'Etat Fraternité-Matin, alors que le camp du président déchu Laurent Gbagbo, poursuivi par la justice, reste sceptique sur ces retrouvailles.
La Commission dialogue, vérité et réconciliation (CDVR) doit être installée dans l'après-midi dans la paisible capitale politique Yamoussoukro, fondée par le "père de la Nation" Félix Houphouët-Boigny, symbole d'un "miracle ivoirien" où paix rimait avec prospérité.
Présidée par l'ex-Premier ministre Charles Konan Banny, baron de l'alliance au pouvoir, la commission, inspirée de celle qui fut mise en place en Afrique du Sud après la fin de l'apartheid, compte au total 11 membres.Parmi eux, la star du foot Didier Drogba, dont la présence à l'ouverture était incertaine.
Deux ans: c'est le délai imparti à la CDVR pour panser les plaies d'une décennie de tourmente qui a fait sombrer cette ex-colonie française longtemps enviée.
Ces années de coups d'Etat, de violences politiques et parfois ethnico-religieuses ont culminé avec la crise post-électorale de décembre 2010-avril 2011.
Née du refus de Laurent Gbagbo de reconnaître sa défaite au scrutin du 28 novembre, la crise s'est conclue par deux semaines de guerre et a fait au moins 3.000 morts.
La CDVR "sera indépendante et entendra tout le monde", a promis Alassane Ouattara qui, sous l'oeil de la communauté internationale, a fait de la réconciliation un grand chantier de son quinquennat.
Le mystère persiste toutefois encore sur le mode de fonctionnement de la commission, et sur la période qu'elle examinera: se bornera-t-elle à la crise des derniers mois, remontera-t-elle à la fin des années 1990, ou encore plus loin?
Les proches du chef d'Etat déchu ont d'ailleurs préféré demander à l'ONU la création d'une "commission internationale d'enquête" remontant jusqu'à septembre 2002 et au putsch manqué de la rébellion rangée fin 2010 derrière M. Ouattara.
De son côté, Alphonse Soro, chef d'une ONG proche du nouveau pouvoir, Alliance pour le changement (APC), explique à l'AFP que la CDVR doit d'abord "définir qui est bourreau et qui est victime".Une question sur laquelle les anciens ennemis ont des points de vue opposés.
Les pro-Gbagbo sont d'autant plus réticents devant les appels répétés à la réconciliation que des dizaines de personnalités du régime vaincu par les ex-rebelles soutenus par la France et l'ONU, dont l'ancien chef d'Etat et son épouse Simone, sont détenues et inculpées pour "crimes économiques" ou "atteinte à la sûreté de l'Etat".
Dans le même temps, aucune figure du camp Ouattara n'a été inquiétée alors que, de l'avis même de l'ONU, des crimes contre l'humanité et crimes de guerre ont été commis par les deux camps, spécialement dans l'Ouest où la situation demeure tendue.
Appelant à la mise en oeuvre "sans délai" des engagements en faveur de la réconciliation, la France a demandé mercredi "toute la lumière" sur les violations des droits de l'Homme.
La CDVR devra ainsi trouver sa place à côté de la machine judiciaire ivoirienne et d'une possible enquête de la Cour pénale internationale (CPI).La question d'une amnistie se pose d'ores et déjà, M. Ouattara ayant promis le "pardon".
En attendant, se jugeant marginalisé, le parti de M. Gbagbo fait planer la menace d'un boycott des élections législatives attendues le 11 décembre.Ce serait un coup dur pour la réconciliation.
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