Persepolis: violemment critiquée, une chaîne tunisienne fait marche arrière

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TUNIS (AFP) - (AFP)

La chaîne privée Nessma, au centre d'une violente controverse après la diffusion du film franco-iranien Persepolis, a présenté mardi ses excuses pour une séquence qui a provoqué la colère des extrémistes et relancé le débat sensible sur l'identité arabo-musulmane en Tunisie.

La séquence en question représente Dieu sous les traits d'un vieil homme barbu, une scène jugée blasphématoire alors que l'islam proscrit toute représentation divine et du prophète.

"Je m'excuse.Je suis désolé pour tous les gens qui ont été dérangés par cette séquence, qui me heurte moi-même", a déclaré le président de Nessma TV, Nebil Karoui, sur la radio locale Monastir.

"Je considère qu'avoir diffusé cette séquence est une faute", a-t-il dit."Nous n'avons jamais eu l'intention de porter atteinte aux valeurs du sacré", a-t-il ajouté.

"Vous excusez-vous auprès des Tunisiens ?", lui a demandé le journaliste de la radio."Absolument", a répondu M. Karoui.Dimanche, après une tentative d'attaque des locaux de Nessma par un groupe de salafistes, il avait assuré que sa chaîne "ne se laisserait pas intimider et continuerait à diffuser les films qu'elle veut".

M. Karoui a précisé sur radio Monastir qu'il n'aurait "jamais imaginé que cela entraînerait un tel tollé", relevant que Persepolis avait déjà été projeté intégralement dans plusieurs salles en Tunisie sans susciter de remous.

Prix du jury au festival de Cannes en 2007, le film d'animation qui raconte l'histoire du régime de Khomeiny à travers les yeux d'une petite fille, a été diffusé vendredi soir en dialecte tunisien sur Nessma TV.

Des menaces de mort et appels à brûler la chaîne ont alors été postés sur Facebook, et dimanche, quelque 200 salafistes ont tenté d'attaquer les locaux de Nessma à Tunis, avant d'être dispersés par la police.

Au delà des violences extrémistes, la diffusion du film a relancé le débat sur l'identité arabo-musulmane, particulièrement sensible dans le contexte électoral actuel.Les Tunisiens sont appelés aux urnes le 23 octobre pour les premières élections depuis la chute du régime de Ben Ali, et les islamistes d'Ennahda sont considérés comme les favoris du scrutin.

Tous les grands partis --dont Ennahda-- ont condamné les violences de dimanche.Mais le mouvement islamiste s'est déclaré dans un communiqué mardi "choqué" par "les flagrantes attaques contre les croyances et les symboles sacrés".

Le gouvernement tunisien lui-même a appelé "au respect de la chose sacrée", au cours du point de presse du Premier ministère.

"Tous les sujets qui concernent de près ou de loin l'identité arabo-musulmane sont explosifs" en Tunisie, souligne Samy Ghorbal, conseiller politique du PDP (Parti démocrate progressiste), un des principaux adversaires d'Ennahda aux élections.

Dimanche, une centaine de personnes avaient pris le relais des salafistes et manifesté devant Nessma en criant: "nous ne sommes pas des barbus mais nous défendons l'islam".

"Je ne fais pas la prière tous les jours, mais on a des valeurs.Montrer l'image de Dieu, je ne peux pas accepter ça.La Tunisie est un pays ouvert, mais c'est d'abord un pays musulman", commentait mardi Mohamed Touati, employé d'un opérateur téléphonique à Tunis.

Un collectif d'une centaine d'avocats, relayant une pétition de citoyens, a déposé plainte lundi contre la chaîne, accusée "d'avoir porté atteinte aux valeurs du sacré", et le procureur de Tunis a ouvert une enquête préliminaire.

Sur les réseaux sociaux, certains internautes ont accusé Nessma d'avoir voulu faire de "la provocation" à moins de 15 jours des élections et de jouer avec le feu.

Lancée en mars 2007, la chaîne satellitaire compte dans son capital les groupes Quinta Communications du producteur de cinéma tunisien Tarak Ben Ammar et Mediaset de Silvio Berlusconi.

Essentiellement consacrée au divertissement, elle s'est ouverte aux débats politiques après la révolution.

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