Le procès de deux journalistes suédois accusés "d'activités terroristes" par la justice éthiopienne, qui devait s'ouvrir ce mardi, a été reporté à jeudi pour permettre à leurs co-accusés d'obtenir un avocat.
Johan Persson et Martin Schibbye sont détenus depuis leur arrestation, le 1er juillet.Ils avaient été arrêtés alors qu'ils venaient d'entrer en Ethiopie, via la Somalie, avec des membres du Front national de libération de l'Ogaden (ONLF), un groupe rebelle qualifié de "terroriste" par Addis Abeba.
Depuis sa création en 1984, l'ONLF lutte pour l'indépendance de l'Ogaden, une région du sud-est de l'Ethiopie à majorité somali.
Les deux journalistes ont été inculpés en septembre d'"activités terroristes, soutien à un groupe terroriste et pour avoir illégalement pénétré sur le territoire éthiopien".S'ils sont reconnus coupables, ils risquent jusqu'à 15 ans de prison.
L'ouverture du procès a été reportée pour permettre à deux co-accusés, des Somaliens qu'Addis Abeba accuse d'avoir illégalement traversé la frontière avec les Suédois et les membres de l'ONLF, d'obtenir un avocat.
Ce mardi, "nous étions censés présenter nos objections aux accusations (...) mais comme elles doivent être entendues en même temps que celles des autres accusés, cela a été reporté", a expliqué l'avocat des Suédois, Sileshi Ketsela, à l'extérieur de la salle d'audience à Addis Abeba.
Un procès sécurisé
En Suède, l'affaire a viré à la polémique à l'approche du procès.
Le ministre des Affaires étrangères, Carl Bildt, a été accusé de ne pas avoir correctement aidé les deux hommes et d'avoir déclaré qu'ils étaient responsables de leur sort car ils se trouvaient dans une zone dans laquelle Stockholm déconseille "tous les voyages."
Certains médias ont même soupçonné le ministre de conflit d'intérêt, révélant que les journalistes se trouvaient dans l'Ogaden pour enquêter sur les activités d'Africa Oil, une entreprise associée à Lundin Petroleum, un groupe pétrolier suédois dont M. Bildt a été administrateur entre 2000 et 2006.
A l'extérieur de la salle d'audience, l'ambassadeur suédois à Addis Abeba, Jens Odlander, a fermement démenti ces accusations.Il a pris comme une "insulte personnelle" celle selon laquelle le gouvernement aurait traîné des pieds pour défendre les journalistes.
Mardi pour leur première audience, les deux Suédois étaient eux souriants devant la cour, a constaté une journaliste de l'AFP.Quand ils se sont retirés, Martin Schibbye, qui a fêté ses 31 ans lundi, a lancé un baiser à la foule.
Une centaine de personnes étaient venues assister à l'audience, majoritairement des étrangers.Des forces de sécurité armées surveillaient les lieux.
Les organisations de défenses des médias n'ont de leur côté pas caché leur inquiétude sur le déroulement du procès et son issue.
La semaine dernière, le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) estimait qu'Addis Abeba avait "porté atteinte (...) à la présomption d'innocence des journalistes en les présentant aux médias comme des complices de terroristes, en les accusant de terrorisme sans la présence de leurs avocats et en portant des accusations publiques contre eux".
"L'issue de leur procès est-il déjà tracé avant d'avoir été ouvert ?," a renchéri mardi Reporters sans frontières, avant de demander à l'Union européenne de "se pencher sur ce dossier et se servir de ses relations avec l'Ethiopie pour parvenir à une issue acceptable".
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