La Libérienne Leymah Gbowee, co-lauréate du Prix Nobel de la Paix, se lancera dans la mission de réconciliation nationale dont elle a été chargée "en jeans et en baskets", et au contact du peuple, a-t-elle annoncé.
Dans un entretien avec l'AFP et la radio RFI, elle a admis la difficulté de la tâche pour laquelle elle a été mandatée vendredi par la présidente Ellen Johnson Sirleaf, réélue présidente cette semaine.
Le Liberia est un pays encore traumatisé par une guerre civile de quatorze ans entre 1989 et 2003 qui a fait 250.000 morts, et des violences atroces contre les civils menées par des "seigneurs de la guerre", restés impunis.
Leymah Gbowee, 39 ans, est connue pour avoir mobilisé les femmes pour mettre fin à ce conflit à travers ce qu'elle a appelé le "chaos pacifique féminin".
Et elle est convaincue que son Prix Nobel l'aidera dans ses efforts pour renforcer la dynamique de la paix, après un scrutin présidentiel contesté qui a souligné la persistance de tensions dans le pays.
"Je sais que c'est une tâche intimidante", a-t-elle reconnu."Je sais que cela va être très stimulant car les derniers jours nous ont prouvé que le Liberia est toujours très divisé selon des lignes politiques, ethniques et sociales".
L'opposition a boycotté le deuxième tour du scrutin présidentiel, et la participation a été faible avec 38 pc.La veille du vote, la police a ouvert le feu sur des manifestants de l'opposition, faisant au moins deux morts.
"Vous ne pouvez avoir quatorze ans de guerre civile, puis pensez que tout va bien après six ans de démocratie", a estimé celle qui en 2003 avait contraint avec un groupe de 200 femmes les chefs de guerre à signer un accord de paix à Accra, au Ghana.
"Il y a toujours des divisions, et les gens qui ont vécu la guerre n'ont pas encore eu quelqu'un qui écoute leurs problèmes", a-t-elle souligné.
Le conflit au Liberia a été particulièrement brutal avec le recours systématique aux enfants soldats, aux viols des femmes, et aux mutilations de civils.
En 2005, Mme Sirleaf fut élue pour un premier mandat, et le pays a commencé a reconstruire son infrastructure et son économie.
"La paix que nous avons est fragile, et nous devons progresser à pas comptés", a reconnu Leymah Gbowee.
"Le processus va inclure une série de consultation dans les différentes communautés.Elle ne sera pas pilotée d'un bureau.Je vais mettre mes jeans et mes baskets pour aller de communauté en communauté", a-t-elle assuré."Nous devons aller au devant du peuple".
Mme Gbowee va associer ses efforts à ceux d'une commission "Vérité et Réconciliation (TRC)", créée sur le modèle de celle qui a existé en Afrique du Sud, et qui a publié un rapport en 2009.
Ce rapport recommande aussi que certaines personnes soient jugées pour crimes de guerre, mais la Prix Nobel craint que cela ne divise encore plus le pays.
Un exemple typique de ce risque est, selon elle, l'ancien seigneur de la guerre Prince Johnson qui est arrivé troisième au premier tour de la présidentielle avec 12 %.
Selon la communauté internationale il est l'homme qui a organisé la torture et le meurtre de l'ancien dictateur militaire Samuel Doe.Pour sa communauté ethnique, persécutée par Doe, c'est un héros.
Leymah Gbowee débutera le 29 novembre son action par un rassemblement pour la Paix et la Réconciliation, une journée avec des activités artistiques et culturelles au cours de laquelle tous les dirigeants politiques feront des déclarations en faveur de cette réconciliation.
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