Fatou Bensouda, future procureur de la CPI, face à des défis politiques

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NEW YORK (Nations unies) (AFP) - (AFP)

La Gambienne Fatou Bensouda, qui doit être élue nouveau procureur de la Cour pénale internationale (CPI) lundi, devra composer avec un élément de plus en plus patent: la chasse aux criminels de guerre devient un enjeu politique.

Régulièrement, les pays africains se plaignent de ce que la CPI vise, injustement, estiment-ils, le continent noir.De fait, les sept enquêtes ouvertes depuis 2003 concernent toutes des pays africains (Ouganda, République démocratique du Congo (RDC), République centrafricaine, Soudan (Darfour), Kenya, Libye et Côte d'Ivoire).

Mais Mme Bensouda, candidate unique des 120 Etats-membres à la succession de l'Argentin Luis Moreno-Ocampo, veut croire que son origine africaine sera un atout.

"Je ne pense pas aux dirigeants que nous poursuivons", disait-elle récemment lors d'un entretien accordé à l'AFP à La Haye, où siège la Cour pénale internationale."Je travaille pour les victimes d'Afrique, elles sont africaines comme moi, voilà d'où je tire ma fierté et mon inspiration".

Nombreux sont pourtant les observateurs qui voient une très forte politisation de l'institution, qui est devenue sujette, selon eux, à une pression dont Fatou Bensouda aura bien du mal à se soustraire.

Richard Dicker, directeur du programme "Justice internationale" à l'ONG Human Rights Watch, juge que la toute jeune CPI (créée en 2002) "a pris une envergure nouvelle sur la scène internationale" en dix ans.

"Si certains gouvernements reconnaissent le rôle de la CPI dans les crises et conflits, d'autres ont tenté d'utiliser la Cour (...) à des fins politiques", note-t-il.

Stephen Lamony de l'ONG Coalition pour la Cour pénale internationale, qui soutient la Cour, renchérit: l'origine africaine de Fatou Bensouda risque de jouer contre elle et pourrait écorner l'image de la Cour sur le continent noir.

"Le fait que la nouvelle procureur soit africaine va lui compliquer la tâche.Elle va devoir affronter divers types de pressions", estime-t-il.

Certains pays africains ont ainsi tenté de pousser le Conseil de sécurité de l'ONU à suspendre les poursuites contre Omar el-Béchir, le président soudanais sous le coup d'un mandat d'arrêt de la CPI pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité au Darfour.De son côté, le Kenya fait campagne contre l'enquête lancée sur les violences post-électorales de 2007-2008.

Mais la pression vient aussi d'acteurs majeurs (Etats-Unis, Chine et Russie) qui, bien que ne faisant pas partie de la CPI, tentent à leur manière d'influencer son travail en fonction de leurs propres intérêts.

Christian Wenaweser, ambassadeur du Liechtenstein à l'ONU et président de l'Assemblée des Etats-parties de la CPI, espère pourtant que le Statut de Rome, qui régit le fonctionnement de la Cour, suffit à protéger le procureur.

"Nous Etats-parties sommes les défenseurs de cette loi.C'est cela qui protège le procureur", dit-il.M. Wenaweser juge même que l'origine africaine de Mme Bensouda va lui être bénéfique et aura un "impact politique", notamment dans ses efforts pour inciter les gouvernements à coopérer avec elle lorsque leurs dirigeants sont mis en cause.

Le travail du procureur "a sans aucun doute un effet politique et nous le voyons tous les jours.Et là, la nouvelle procureur va devoir trouver le juste équilibre", ajoute Christian Wenaweser.

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