La police a relâché lundi soir Alioune Tine, un des animateurs de la lutte contre un nouveau mandat du président sénégalais, Abdoulaye Wade, quelques heures après des violences à Podor (nord), qui ont fait deux morts, et à la veille d'un nouveau rassemblement de l'opposition.
Alioune Tine, arrêté le 28 janvier par la police judiciaire, a affirmé à l'AFP avoir été libéré sans charges après avoir été longuement interrogé sur les manifestations du Mouvement du 23 juin (M23), qu'il coordonne et qui regroupe des partis d'opposition et des ONG hostiles à un nouveau mandat de M. Wade, au pouvoir depuis 12 ans.
La candidature de M. Wade a été validée le 27 janvier par le Conseil constitutionnel, puis confirmée dimanche soir.
La libération de M. Tine avait été réclamée par plusieurs organisations de défense des droits humains.Elle a eu lieu quelques heures après des violences lors d'une manifestation de militants du M23 à Podor, au cours desquelles deux civils ont été tués et plusieurs autres blessés, selon diverses sources concordantes.
Le 27 janvier, la validation de la candidature de M. Wade avait provoqué des émeutes à Dakar, où un policier avait été tué, et en province.
Selon l'opposition, de nombreuses personnes avaient été blessées, dont des journalistes frappés par la police, qui avait procédé à de nombreuses arrestations.
Plusieurs ONG dont Amnesty International, la Fédération des ligues des droits de l'Homme (FIDH) et des organisations de journalistes, dont le Syndicat des professionnels de l'information et de la communication du Sénégal (Synpics), ont dénoncé les violences et exhorté les autorités à garantir la liberté d'expression, d'information et de manifestation.
Le M23 a appelé "tous les citoyens" à participer à un "rassemblement pacifique" mardi après-midi à Dakar "pour exiger le retrait de la candidature de Wade" à la présidentielle prévue le 26 février.
Aux Sénégalais "de se prononcer"
Ce "sera un rassemblement pacifique pour continuer à protester contre l'inqualifiable et l'inacceptable validation de la candidature du président Wade par le Conseil constitutionnel", a affirmé Alioune Tine.
Depuis le 27 janvier, le M23 dénonce un "coup d'Etat constitutionnel, prélude à un coup d'Etat électoral".
Parmi les responsables du mouvement, figurent huit candidats à la présidentielle qui avaient déposé des recours contre la candidature de M. Wade.qui, selon eux, a été au bout de ses deux mandats légaux, ayant été élu en 2000 puis réélu en 2007.
Le camp du chef de l'Etat a toujours récusé cet argument, arguant de réformes de la Constitution en 2001 et 2008 qui lui permettraient de se représenter.
Dimanche, le Conseil constitutionnel a jugé que les requêtes des opposants étaient "recevables" mais "non fondées" et considéré que M. Wade était "en droit de se présenter".
Le Conseil a également rejeté un recours de M. Wade qui voulait faire annuler les candidatures des ex-Premiers ministres Idrissa Seck et Macky Sall et de l'ex-ministre des Affaires étrangères Cheikh Tidiane Gadio en les accusant de n'avoir "jamais payé l'impôt" au Sénégal.
Autre décision rendue: la confirmation du rejet de la candidature du chanteur Youssou Ndour et celle de deux autres candidats indépendants ne disposant pas de suffisamment de signatures de soutien.
Tout en appelant au calme, la France a regretté que "toutes les sensibilités politiques ne puissent être représentées" à la présidentielle, sans explicitement citer Youssou Ndour, s'inquiétant également de "multiples arrestations".
Les Etats-Unis ont invité M. Wade à "laisser la place à la prochaine génération", demande rejetée par El Hadj Amadou Sall, responsable de la campagne de M. Wade.
"Je réponds à nos amis américains que nous comprenons leur préoccupation, mais c'est trop tard, Abdoulaye Wade est candidat", et "il appartient au peuple sénégalais de se prononcer" le jour du scrutin, a déclaré M. Sall à la télévision privée sénégalaise TFM.
Auparavant, le porte-parole de la présidence sénégalaise, Serigne Mbacké Ndiaye, avait formulé des assurances pour un scrutin transparent lors d'une conférence de presse à Dakar: "Tous les observateurs qui le souhaitent pourront venir" superviser l'élection, a-t-il dit.
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