A la suite d'une manifestation pro-junte à l'aéroport de Bamako, les chefs d'Etat ouest-africains ont annulé jeudi au dernier moment leur venue au Mali, où ils devaient arracher un compromis pour le retour à l'ordre constitutionnel après le coup d'Etat militaire du 22 mars.
Des dizaines de manifestants favorables à la junte ont envahi brièvement dans la matinée le tarmac de l'aéroport de Bamako, a constaté l'AFP.
Ils entendaient protester contre l'arrivée prévue à la mi-journée de cette délégation de chefs d'Etats de la Cédéao (Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest) conduite par le président ivoirien Alassane Ouattara.
Ils ont rapidement évacué la piste, mais la mission ouest-africaine a été annulée peu après.
"Le sommet est reporté à cause de problème de sécurité tout à l'heure sur l'aéroport de Bamako", a indiqué sur place le ministre burkinabè des Affaires étrangères, Djibrill Bassolé.
Pourtant déjà arrivé dans l'espace aérien malien, l'avion d'Alassane Ouattara, président en exercice de la Cédéao, a "fait demi-tour", selon une source aéroportuaire.
Le président burkinabé Blaise Compaoré, médiateur dans la crise malienne, et son homologue béninois Boni Yayi, président en exercice de l'Union africaine (UA), ont pris la même décision.
Ils devaient se retrouver dans la journée à Abidjan pour "une réunion d'urgence" à la suite de cet incident, selon la présidence du Burkina.
"Les chefs d'Etat viennent à Abidjan pour une réunion à l'aéroport autour du président Ouattara", a confirmé à l'AFP une source à la présidence ivoirienne.
Le déplacement à Bamako de la Cédéao était pourtant capital: trouver une issue à la crise née du putsch contre le président Amadou Toumani Touré (ATT), renversé à quelques semaines de la présidentielle du 29 avril, alors même que le nord du pays est en proie à une nouvelle rébellion touareg.
Mardi, lors d'un sommet à Abidjan, ces dirigeants ouest-africains, qui ont suspendu le Mali de leur organisation, avaient décidé d'envoyer cette délégation pour "permettre un retour rapide à l'ordre constitutionnel".
Le président Compaoré a été nommé médiateur dans la crise, son ministre Djibril Bassolé travaillant sur le compromis d'une "transition" dirigée par Dioncounda Traoré, président de l'Assemblée nationale dissoute par la junte comme les autres institutions.
A Abidjan, la Cédéao a également brandi la menace de la force à l'intention des putschistes comme des rebelles: elle a autorisé "la montée en puissance de sa force pour parer à toute éventualité".
Mais le Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l'Etat (CNRDRE, junte), qu'une délégation de chefs d'état-major de pays de la Cédéao a rencontré mercredi à son camp de Kati, près de Bamako, n'a pour l'instant donné aucun signe d'ouverture.
A l'inverse, les putschistes ont accéléré la consolidation de leur pouvoir, adoptant une nouvelle Constitution qui consacre la prééminence des militaires jusqu'aux élections présidentielle et législatives qui clôtureront la transition et dont la date n'est pas déterminée.
Camp contre camp
La junte a affirmé qu'aucun de ses membres n'était autorisé à se présenter à ces scrutins.
ATT, qui dans quelques semaines allait se retirer de la scène après ses deux mandats constitutionnels de cinq ans, semble pour l'heure hors jeu.
Sortant de son silence, il a déclaré mercredi à l'AFP qu'il se trouvait "à Bamako" et qu'il n'était "pas prisonnier"."Dieu merci ma famille et moi nous nous portons tous bien", a-t-il indiqué, sans préciser toutefois sa localisation exacte, qui ces derniers jours faisait l'objet de toutes les spéculations.
D'ores et déjà, chaque camp a commencé à mobiliser.
Plusieurs milliers de manifestants pro-junte ont marché dans les rues de Bamako mercredi, criant leur hostilité à la Cédéao, à l'ex-puissance coloniale française et au reste de la communauté internationale, qui ont unanimement condamné le coup.
La quasi-totalité de la classe politique malienne, ainsi que des organisations de la société civile, ont créé un "front" anti-junte et veulent sans délai obtenir le retour des militaires dans les casernes.
Cette crise politique se déroule alors que le nord du Mali subit depuis mi-janvier une vaste offensive de rebelles touareg, qui comptent dans leurs rangs des hommes lourdement armés ayant combattu l'an dernier en Libye pour le défunt "Guide" Mouammar Kadhafi.
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