Malgré dix ans de paix et de reconstruction, de nombreux Angolais ne profitent toujours pas de la croissance portée par la manne pétrolière.
Luanda, la capitale, avec son front de mer aux plates-bandes impeccables ornées de palmiers d'importation et son quartier de gratte-ciels en expansion, est devenue le symbole du chemin parcouru depuis 2002 par un pays dont presque toutes les infrastructures avaient été détruites en 27 ans de guerre civile.
Des milliards de pétrodollars ont été investis dans d'ambitieux chantiers de réparation des routes, voies ferrées, aéroports et pour construire de nouvelles écoles, hôpitaux et universités qui font aujourd'hui la fierté du pouvoir.
Mais on n'est jamais très loin des bidonvilles et de l'envers du décor du miracle angolais, assis sur des taux de croissance à deux chiffres, plus élevés certaines années que ceux de la Chine.
Des milliers de gens s'entassent dans des abris qui n'ont de maison que le nom, sans eau potable et où 20% des enfants meurent avant l'âge de 5 ans.
"Il y a eu des investissements massifs, témoignant d'une volonté" du pouvoir d'améliorer les indicateurs sociaux et l'accès aux services de base, souligne auprès de l'AFP le représentant de l'Unicef en Angola, Koen Vanormelingen.
Mais "ils ont fait le plus facile, construire des infrastructures.Maintenant pour progresser, ils doivent travailler sur les ressources humaines, améliorer la formation des médecins et des enseignants", ajoute-t-il.
"Le pays a beaucoup avancé mais la route à parcourir est encore longue et bientôt il devra cesser de rendre la guerre responsable de tous les problèmes", commente un diplomate occidental, sous couvert de l'anonymat.
"L'Angola est clairement à la croisée des chemins.Toutes les déclarations vont dans le bon sens mais il lui faut encore prouver qu'il tient ses engagements publics et concrétise", ajoute-t-il.
Des changements insuffisants
"Le pays a changé bien sûr, il faut le reconnaître mais c'est insuffisant", commente pour sa part, Enoque Vasco, 33 ans, qui vit dans un faubourg de Luanda, avec un salaire d'ophtalmologue qui lui permet à peine de faire vivre sa famille.
Né à Huambo (centre), Enoque a été témoin des combats parmi les plus terribles que le pays ait endurée, parvenant à sauver sa peau et à fuir à Luanda avec ses proches.
Grâce à sa famille, il a pu étudier et bénéficier de la paix."Mais quand on voit l'immense fossé entre les riches et les pauvres, c'est un peu difficile de parler de réconciliation", dit-il.
"Il y a de très beaux endroits, comme la Ilha à Luanda, mais à quelques centaines de mètres vous avez des gens qui vivent dans des bidonvilles dans des conditions inhumaines, et c'est honteux", dit-il.
"Le pays s'est développé économiquement mais dans la pratique, on n'en voit pas trop la couleur, on a beaucoup de chômeurs, ce qui me fait peur pour l'avenir", poursuit ce jeune père de famille.
Depuis un an, l'Angola connaît des manifestations inédites de contestation, menées par quelques poignées de jeunes, souvent entraînés par des rappeurs et systématiquement réprimées par une police connue pour avoir la main lourde.
C'est assez pour placer le régime sur la défensive et les protestataires sont accusés de vouloir déstabiliser le pays et de fomenter la guerre civile.
Et après chaque manifestation, ce sont les mêmes appels à "préserver la paix", sous-entendu le parti au pouvoir, qui sont lancés à la population, jusque dans les diverses églises du pays.
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