Si des combats armés ont opposé Soudan et Soudan du Sud le long de leur frontière ces derniers jours, la guerre se livre aussi sur le terrain médiatique, et la propagande a envahi journaux et ondes, à coups d'accusation et de démentis.
Des affrontements ont débuté il y a près de deux semaines le long de la frontière entre le Soudan et le Soudan du Sud, dont le tracé est encore flou et contesté.Il s'agit des violences les plus graves depuis la partition en juillet, au terme de la plus longue guerre civile du continent africain.
Mais l'accès aux zones de combat est fortement limité, et beaucoup de médias locaux sont cantonnés à relayer une rhétorique gouvernementale incendiaire.
L'Union africaine, qui a chapeauté des négociations infructueuses à Addis Abeba cette semaine, a appelé à "la cessation immédiate de toute forme de propagande médiatique négative", dans le cadre de ses six points de sortie de crise.
Les négociateurs "ont remarqué que ces dernières semaines, les médias avaient joué un rôle vraiment négatif", souligne Faisal Mohammed Salih, consultant sur les médias et éditorialiste pour un journal soudanais.
Depuis des semaines, Khartoum et Juba ont échangé accusations et contre-accusations, le plus souvent sans élément matériel.
L'armée soudanaise a maintes fois accusé les troupes du Sud d'incursions sur son territoire, alors que le Sud a accusé le Nord de nombre de raids aériens.
De chaque côté de la frontière, les médias ont fait état d'un nombre de victimes exagéré dans le camp adverse, tout en minimisant leurs propres pertes, souligne M. Salih.
Les affrontement au Kordofan-Sud, un Etat soudanais où Khartoum affirme devoir faire face à des incursions sud-soudanaises, sont de nature militaire mais aussi médiatique, a récemment souligné la ministre de l'Information du Soudan, Sana Hamad.
Selon elle, une campagne médiatique menée "par des milieux hostiles" cherche à donner "une image déformée de la situation" dans cette région.
"La rhétorique enflammée est en quelque sorte un passe-temps national, et les deux parties cherchent actuellement à reprendre le contrôle du discours", estime Zach Vertin, analyste chargé des Soudan chez International crisis group.
"Mais le plus révélateur, c'est que les deux parties continuent à s'asseoir à la table des négociations, à se parler, car ils savent qu'une résolution du conflit est dans leur intérêt", ajoute-t-il.
Le médiateur de l'Union africaine, Thabo Mbeki, était jeudi à Juba pour rencontrer le président sud-soudanais Salva Kiir, puis vendredi à Khartoum pour s'entretenir avec le Soudanais Omar el-Béchir.
Khartoum a envoyé une délégation de journalistes, y compris un correspondant de l'AFP, quelques heures sur les lieux des récents combats entre Nord et Sud, dans la région frontalière pétrolifère de Heglig, mais les reportages indépendants dans la région restent interdits.
La presse a davantage de liberté de mouvement au Sud, mais en l'absence de couverture d'envergure sur le terrain, M. Salih estime que les médias gouvernementaux, radios et télévisions, ont été utilisés dans les deux pays comme des armes pour disséminer la haine.
Certains journaux tentent malgré tout à ne pas se faire instrumentaliser.Mais de chaque côté de la frontière, "si on essaie d'être objectif selon les critères occidentaux (...), on est traité de traître, accusé de pas défendre l'intérêt national", déplore M. Salih.
Dans cette guerre comme dans beaucoup d'autres auparavant, "la vérité est la première des victimes", reconnaît-il.
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