Une semaine après le coup d'Etat en Guinée-Bissau, l'armée et l'opposition ont scellé leur alliance en s'accordant sur une "transition démocratique" de deux ans au risque de placer leur pays, déjà miné par une instabilité chronique, au ban de la communauté internationale.
Après l'Union africaine (UA) et la Francophonie qui avaient suspendu mardi la Guinée-Bissau, la Banque mondiale et la Banque africaine de développement (BAD) ont annoncé mercredi soir qu'elles suspendaient leur aide au développement.
L'accord, signé mercredi soir entre la junte et les principaux opposants à l'ancien Premier ministre Carlos Gomes Junior, consacre la fin du processus électoral entamé le 18 mars avec un premier tour de présidentielle largement remporté par l'ancien chef de gouvernement.
Il prévoit que la "transition démocratique" s'achèvera dans un délai "maximal" de deux ans par "l'organisation simultanée d'élections présidentielle et législatives".
L'armée "retournera dans les casernes volontairement, dans un esprit de soumission au pouvoir politique, après l'investiture du président de transition, du gouvernement de transition et du Conseil national de transition", "organe de contrôle législatif" chargé de "gérer le processus de transition", précise le texte.
Aucune indication n'a été donnée ni sur la composition de cet organe, ni sur les noms des futurs président et Premier ministre, qui ont été "présélectionnés" par les partis avant d'être soumis au Commandement militaire, selon des délégués aux négociations.
"Un moment symbolique"
En présentant leur texte à la presse, militaires et anciens opposants se sont mutuellement congratulés : "c'est un bon accord", s'est félicité Cirilo Rodrigues, chef du Parti socialiste."Nous venons d'assister à un moment symbolique", a affirmé le porte-parole de la junte, le lieutenant-colonel Daba Na Walna.
"Nous avons réussi à arracher le pouvoir aux militaires et c'est ça le plus important", fanfaronnait le chef du PS devant les journalistes, affirmant que "la Cédéao (Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest) ne demandait rien d'autre que ça".
La Cédéao, tout comme l'UA, l'ONU ou le Portugal, ancienne puissance coloniale, avaient exigé après le putsch le retour à l'ordre constitutionnel, insistant sur la libération des dirigeants toujours incarcérés.
"Dire qu'on a respecté ce que la Cédéao avait demandé est une mauvaise lecture de ce qui s'est dit", a sobrement commenté un diplomate à Bissau."La Cédéao s'était prononcée pour un retour à l'ordre constitutionnel, ce qui signifie le retour au pouvoir de ceux qui ont été élus", a-t-il observé.
Or, l'ancien parti au pouvoir, le Parti africain pour l'indépendance de la Guinée-Bissau et du Cap-Vert (PAIGC), n'a pas pris part aux négociations, refusant par avance un accord jugé "anticonstitutionnel et antidémocratique".
Le PAIGC a appelé mercredi à l'envoi d'une force de l'ONU pour "protéger la jeune démocratie".Le Conseil de sécurité pourrait se réunir rapidement à la demande de Lisbonne et Brasilia afin d'étudier la demande des pays lusophones de création d'une "force d'interposition".
Interrogé sur les éventuelles sanctions qui pourraient s'abattre sur la Guinée-Bissau, Artur Sanha, du Parti de la rénovation sociale, principal parti de l'ex-opposition, s'est montré confiant.
"La Cédéao, l'Union africaine, les Nations unies et les autres organisations internationales devraient louer la Guinée-Bissau pour son expérience en matière de transition du pouvoir", a-t-il estimé.
Depuis 1999, ce pays d'Afrique de l'Ouest, considéré comme la plaque tournante du trafic de cocaïne entre Amérique du Sud et Europe, a connu pas moins de trois "transitions", après deux coups d'Etat (en 1999 et 2003) et l'assassinat par des militaires du président Joao Bernardo Vieira en 2009.
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