Le redoutable rendement des tribunaux spéciaux déployés en Afrique du Sud pour le Mondial-2010 a démontré que l'efficacité de la Justice dépendait de la volonté politique et des moyens mobilisés face à une criminalité record.
Les Cours d'exception "ont créé un précédent", souligne Sandy Singh, professeur de droit à l'Université du KwaZulu-Natal."Elles ont montré que l'efficacité était possible si la volonté politique existait."
"Jusqu'à présent, nous pensions que la police était sans espoir, les tribunaux débordés, acquiesce Gareth Newham, de l'Institute for Security Studies (ISS).Les gens vont peut-être se montrer plus exigeants désormais."
Mais alors que des traducteurs en une centaine de langues ont été mis à la disposition des tribunaux du Mondial, le Somalien Salim Omar a vu son procès reporté à cinq reprises depuis le 12 juin par la justice classique, faute d'interprète.
"Je veux blanchir mon nom mais la Justice m'abandonne", soupire le jeune homme, accusé de coups et blessures.
Une expérience très courante dans le pays aux 50 meurtres quotidiens, et où ceux qui n'ont pas les moyens de payer une caution croupissent des mois derrière les barreaux en détention préventive, même pour de petits délits.
"Les gens attendent au minimum huit mois pour que leur procès démarre", relève Golden Miles Bhudu de l'Organisation des prisonniers pour les droits de l'Homme."Cela peut prendre de 3 à 8 ans avant que le jugement soit prononcé."
Parallèlement, les criminels échappent trop souvent à la punition en raison d'enquêtes gâchées.
Pourtant, les 56 tribunaux d'urgence dédiés à la Coupe du monde dans les neuf villes-hôtes ont su traiter les affaires de façon expéditive, trop au gré de certains.
Selon le ministère de la Justice, les 172 enquêtes ouvertes depuis le 26 mai sur des crimes et délits liés au Mondial ont débouché sur 104 inculpations, soit un taux record de 60%.Les suspects ont souvent été jugés dans les 48 heures, écopant de peines lourdes -- jusqu'à deux ans de prison pour un vol simple.
Les autorités promettent de s'inspirer de l'expérience.Les tribunaux spéciaux "fonctionnent comme une machine bien huilée", estime le porte-parole du ministère, Tlali Tlali."Il nous faut examiner ce modèle d'un oeil critique afin d'en extraire les aspects positifs."
Alors que les Cours ordinaires sont ouvertes six heures par jour, les tribunaux du Mondial pouvaient opérer jusqu'à 23h00, avec tout le personnel d'accompagnement nécessaire, y compris les jours fériés, s'appuyant sur un budget de 45 millions de rands (environ 4,5 millions d'euros).
Le police avait elle aussi été renforcée pour la compétition, avec formations spécialisées et l'embauche de 44.000 agents supplémentaires.
"Notre approche intégrée a merveilleusement fonctionné", s'est réjoui vendredi le ministre adjoint de la Police, Fikile Mbalula, assurant que les efforts n'allaient pas se relâcher après le coup de sifflet final.
Pour de nombreux experts toutefois, la criminalité ordinaire, qui affecte surtout les ghettos où sévit le chômage, a suivi son train-train pendant le Mondial, loin des caméras de télévision.
"La police seule ne suffira pas à résoudre à terme une criminalité liée aux violences domestiques et aux problèmes socio-économiques", avertit Chandre Gould, de l'ISS.Seize ans après la chute de l'apartheid, 43% de la population vit toujours sous le seuil de pauvreté.
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