Au Niger, des tentatives pour casser le cycle des crises alimentaires

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TIBIRI (Niger) (AFP) - (AFP)

Pelle en main, pieds nus, Hanatou creuse la terre pour conserver l'eau de pluie.Dans son village de Tibiri, dans le sud-ouest du Niger, on tente comme on peut de casser le cycle des crises alimentaires, qui frappe encore une fois cette année le pays.

Sous un soleil de plomb et dans le vent charriant la poussière, la jeune femme, comme des dizaines d'autres villageois, travaille le sol rocailleux pour y creuser des demi-lunes de trois mètres de large et 50 centimètres de profondeur.

Sur ce plateau aride, près de son village isolé aux maisons de terre séchée, l'objectif est de retenir l'eau de pluie et de régénérer la terre en plantant des acacias, un projet de l'ONG Oxfam financé par le Programme alimentaire mondial (PAM).

Alors qu'au Niger, l'un des pays les plus pauvres du monde, 6 millions de personnes sont menacées cette année par une nouvelle crise alimentaire, sur 18 millions dans tout le Sahel selon l'ONU, cette initiative "a changé nos vies", raconte timidement à l'AFP la jeune paysanne aux joues marquées de scarifications.

C'est qu'à Tibiri on a mis en place un programme "argent contre travail".Oxfam paie les agriculteurs pour ces travaux utiles à la communauté, à hauteur de 32.000 FCFA (environ 45 euros) par mois.De quoi "subvenir aux besoins d'un ménage pendant une période d'un mois", explique Patrick Andrey, un responsable d'Oxfam Grande-Bretagne.

L'argent est distribué pendant la période de soudure, la plus délicate, entre la fin des réserves de vivres de la campagne précédente et le début de la nouvelle récolte, en septembre-octobre."Le cash est généralement utilisé pour que les populations puissent s'approvisionner sur les marchés locaux", ajoute M. Andrey.

Mais avec les premières - et encore bien modestes - pluies, le programme entre dans une nouvelle phase.Le soutien financier va continuer, mais chaque paysan s'occupera de semer dans son champ.

Récoltes sinistrées

L'enjeu est de taille: dans la région de Tibiri, 80% des 75.000 agriculteurs ont eu leurs récoltes sinistrées lors de la dernière campagne à cause de l'insuffisance des précipitations.

A plusieurs centaines de kilomètres au nord-est, dans la région de Tanout, Oumarou, lui, profite déjà des premières pluies pour planter ses semences de mil.

Les trois dernières années "n'ont pas répondu à nos besoins, parce que la production n'a pas été bonne", souligne ce paysan, large turban clair sur le crâne, devant son grenier vide depuis plusieurs semaines.

Oumarou vit seul avec sa femme, leur fils est parti chercher du travail en Libye voisine.Cette année, Oumarou a pu rester dans son village d'Assakaram, grâce à un autre programme.

Une des 6.000 banques céréalières que compte le Niger a été créée ici il y a deux ans.Le premier stock avait été financé par le PAM, et la Croix-Rouge irlandaise supervise à présent la gestion des réserves.

"On achète les céréales en période de récolte, lorsque le prix sur le marché est abordable", indique Moutari Aboubacar, coordinateur du programme.Les céréales sont stockées puis revendues aux villageois durant les périodes les plus difficiles, à un prix qui ne subit qu'une "infime augmentation", ajoute-t-il.Certains commerçants, à l'inverse, emmagasinent des vivres pour les vendre plus tard à des prix exorbitants.

Les distributions sont organisées par les villageois eux-mêmes, réunis en conseil.Une façon d'éviter que la faim ne fasse fuir les habitants.

Hanouta et les habitants de Tibiri ont également choisi de créer une banque alimentaire avec leurs économies.En attendant que le gouvernement nigérien, qui mobilise ses faibles moyens pour endiguer la faim et - contrairement à de vieilles habitudes - joue la transparence dans cette crise, puisse engager des réformes structurelles qui éloigneront enfin le spectre des disettes.

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