Le journaliste Fahem Boukadous a été arrêté jeudi malgré les appels à l'annulation de sa condamnation à la prison pour "entente criminelle" et "diffusion d'information de nature à troubler l'ordre public", dans la foulée de manifestations sociales en Tunisie.
"Fahem Boukadous a été arrêté au lendemain de sa sortie de l'hôpital de Sousse, où il était soigné pour des problèmes respiratoires", a annoncé son avocate Radia Nasraoui.
Il a été interpellé à l'intérieur de l'hôpital Farhat Hached, où il était retourné chercher son dossier médical, en compagnie de son épouse jeudi, a indiqué cette dernière à l'AFP.
Afef Boukadous a dit craindre pour la santé de son mari asthmatique et tenter de connaître le lieu de sa détention pour lui remettre des médicaments qu'il n'avait "pas eu le temps d'emporter" au moment de son interpellation.
L'arrestation du journaliste survenue à 09H30 locales, selon son épouse, n'avait pu être confirmée de source gouvernementale jeudi après-midi.
Fahem Boukadous, 40 ans, a été condamné le 6 juillet en son absence à quatre ans de prison ferme par la Cour d'Appel de Gafsa (sud-ouest), alors qu'il était hospitalisé depuis le 3 juillet à Sousse (centre-est) pour des problèmes pulmonaires.
Il a été reconnu coupable de "diffusion d'information susceptible de porter atteinte aux personnes et à leurs biens" et de "constitution d'une entente criminelle susceptible de porter atteinte aux personnes et aux biens".
Pour ses défenseurs et des ONG, le journaliste a été puni pour la couverture des manifestations sociales survenues en 2008 dans la région minière de Gafsa (350 km de Tunis) pour le compte de la chaîne satellitaire Al-Hiwar Ettounsi (Le Dialogue Tunisien, dissidence).
Les autorités tunisiennes dénient la qualité de journaliste à M. Boukadous, considèrent qu'il est impliqué dans ces troubles, assurant qu'il a été condamné pour "des infractions de droit commun sans rapport avec ses activités journalistiques".
Pour Tunis, il fait partie d'un "groupe criminel" ayant endommagé des bâtiments publics et privés, installé des barrages routiers et causé des "blessures sérieuses" à des officiers, notamment par des jets de cocktails molotov.
Le jugement de Fahem Boukadous, résidant à Gafsa et auteur d'images exclusives sur des manifestations contre le chômage et la corruption dans cette région minière, a suscité plusieurs réactions hostiles au régime tunisien.
En Tunisie, le Parti démocratique progressiste (légal) s'est opposé à son renvoi en prison et demandé l'annulation du verdict, également dénoncée par des ONG de défense des droits de l'Homme.
A l'étranger, les Etats-Unis se sont dits "profondément inquiets" d'un recul des libertés en Tunisie et la France a affirmé son attachement "à la liberté d'expression" en Tunisie suite à l'annonce du verdict.
Le parti communiste français a dépêché à Tunis une délégation conduite par Marie-George Buffet pour l'appui du journaliste, un opposant proche du Parti communiste des ouvriers tunisien (PCOT, interdit).
L'Institut international de la presse (IPI) avait aussi dénoncé un climat de répression contre les journalistes, où ils risquent des intimidations voire la prison s'ils cherchent à informer sur la corruption dans leur pays, selon l'organisation.
Pour Reporters sans Frontières (RSF), la condamnation de M. Boukadous n'est qu'un "cas de plus qui montre que le régime tunisien se veut implacable avec les journalistes indépendants", qui subissent selon l'organisation de défense de la presse un "véritable harcèlement au quotidien".
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