Les trois meurtriers présumés de la religieuse française soeur Emmanuel, retrouvée morte samedi à Mandritsara, dans le nord-est de Madagascar, ont été inculpés et écroués lundi, tandis qu'un dernier hommage a été rendu à la missionnaire.
Issue de la communauté de la Providence de Ruillé-sur-Loir (Sarthe, ouest de la France) et devenue malgache de coeur, soeur Emmanuel a été inhumée lundi dans la Grande Ile.
Les meurtriers présumés ont été emmenés "à la maison centrale de Mandritsara où ils ont été placés sous mandat de dépôt (...) , ils sont inculpés pour meurtre", a déclaré à l'AFP le commissaire de police de Mandritsara, Eric Benty.
Les trois hommes, âgés de 26 à 35 ans, avaient avoué ce week-end avoir tué soeur Emmanuel --pour l'état-civil Marie Emmanuel Helesbeux--, 82 ans, qu'ils connaissaient bien puisque l'un d'eux avait travaillé pour elle comme gardien.
L'argent serait le mobile du crime.L'un des coupables présumés, Bernard Ratsimbazafy, dit "Ramala", 35 ans, cultivateur et ex-gardien de la religieuse, s'était approprié quatre maisons de la soeur sans son aval et les avait mises en location alors qu'elle lui avait confié le soin de les vendre, selon les premiers éléments de l'enquête.
Soeur Emmanuel lui avait récemment réclamé une partie du produit de la vente --qu'elle pensait réalisée--, ce que le gardien a refusé.
Aidé d'un coiffeur, Etienne Rakotozara, 26 ans, et d'un boucher, Richard Rabemorasata, dit "Jean Kely", 26 ans, l'ex-gardien a téléphoné vendredi soir à la soeur, une ancienne infirmière, prétextant que sa fille était malade.
Les trois hommes ont emmené leur victime sur la place du marché à zébus, un lieu entièrement désert la nuit.M. Rakotozara, le plus grand des trois, a étranglé soeur Emmanuel tandis que les deux autres l'immobilisaient, selon la déposition des prévenus, citée par la police.
Le corps de soeur Emmanuel a été découvert samedi à l'aube."Ils l'ont torturée", a déclaré soeur Anne-Françoise, une amie de la défunte, évoquant l'amputation d'un bras.
Dimanche soir, une veillée funèbre a été organisée.De nombreux habitants sont restés de longues heures près de la dépouille de la soeur, jusqu'au petit matin.
Les obsèques de soeur Emmanuel ont été célébrées lundi après-midi en l'église chrétienne de Mandritsara.1.000 à 2.000 personnes s'étaient massées sur le parvis, en plein soleil.
"Il y avait 42 religieuses, 13 prêtres, 2 évêques, environ 2.000 personnes dans la cour de l'église, beaucoup de gens pleuraient, les enfants, les soeurs et d'autres", a raconté soeur Anne-Françoise.
Après une messe de près de deux heures et demie, le cercueil a été transporté jusqu'au dispensaire des Soeurs de la Providence, où elle habitait, suivi par un immense cortège, avant d'être inhumé.
"C'est très dur pour toutes les soeurs, on va être beaucoup plus prudentes maintenant car les gens qui ont fait ça, c'était des gens que soeur Emmanuel aidait depuis longtemps", a ajouté soeur Anne-Françoise.
Retraitée depuis 1993, soeur Emmanuel était arrivée à Madagascar en 1971 et a travaillé 42 ans comme infirmière.Elle parlait couramment le malgache.
La religieuse était très appréciée pour sa générosité envers les plus pauvres.Sa mort a suscité la colère des habitants.Des centaines de personnes avaient manifesté dimanche près du commissariat où les trois hommes étaient gardés à vue et les forces de l'ordre ont accéléré leur présentation à la justice, initialement prévue mardi.
La sécurité a été renforcée aux abords de la prison.
Le procès pourrait débuter d'ici deux semaines à Antananarivo, la capitale malgache située à deux jours de route, afin d'éviter des troubles à Mandritsara et un avocat de l'ambassade de France devrait être présent à l'audience, selon la police et la gendarmerie locales.
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