Le nouveau gouvernement de l'islamiste Ali Larayedh était devant les députés tunisiens mardi afin d'obtenir leur confiance pour sortir le pays d'une profonde crise politique et sociale dont la dernière illustration a été l'immolation dans la matinée d'un jeune miséreux à Tunis.
M. Larayedh, du parti islamiste Ennahda, principale force politique du pays, a assuré à la tribune de l'Assemblée nationale constituante (ANC) que son gouvernement comptait achever sa mission avant la fin de l'année en mettant un terme à l'impasse politique.
"Ce gouvernement est pour une période courte, de neuf mois environ, car nous sommes déterminés à ce que le gouvernement achève sa mission à la fin 2013 au maximum", a déclaré M. Larayedh.
Il s'est fixé comme priorités de "réussir l'organisation des élections dans les plus brefs délais", d'"instaurer la sécurité", le pays étant déstabilisé par les violences sociales, politiques et islamistes, et de "continuer de relever l'économie, l'emploi et de lutter contre la hausse des prix".
Le précédent Premier ministre Hamadi Jebali a démissionné après l'assassinat le 6 février de l'opposant Chokri Belaïd, tué par des islamistes radicaux selon la police.
Après de longues négociations et faute d'avoir trouvé un consensus plus large, M. Larayedh a reconduit la coalition entre les islamistes et deux partis laïques tout en l'élargissant à des indépendants qui dirigeront notamment les ministères régaliens.
Cette équipe devrait obtenir sans mal la confiance des députés.Après son discours, M. Larayedh doit encore répondre aux députés, et il n'était pas clair si le vote aurait lieu mardi ou non, les séances de travail à l'ANC étant notoirement longues.
Ces lenteurs et l'absence de compromis sur le futur régime politique tunisien bloquent d'ailleurs la rédaction de la Constitution, la tenue d'élections et la mise en place d'institutions stables deux ans après la révolution de janvier 2011.
Un calendrier a été soumis aux députés lundi, prévoyant l'adoption de la loi fondamentale début juillet et des élections en octobre.Les élus ne se sont pas encore prononcés sur le sujet, mais selon des observateurs cet échéancier est peu réaliste, d'autant que les dates-limite fixées par le passé n'ont été respectées.
"Voilà le chômage"
Cette paralysie politique mine aussi la reprise de l'économie, alors que le chômage et la misère étaient déjà des facteurs clé de la révolution de 2011.
Face à ces difficultés, un jeune vendeur à la sauvette s'est grièvement blessé en s'immolant par le feu à Tunis, un geste hautement symbolique, la révolution de janvier 2011 ayant été déclenchée par l'immolation d'un marchand ambulant à Sidi Bouzid (centre).
Adel Khadri, 27 ans, a mis le feu à son corps en plein centre-ville, sur l'avenue Habib Bourguiba, en hurlant "voilà la jeunesse qui vend des cigarettes, voilà le chômage".
"Ses jours ne sont pas en danger, mais il a des brûlures du troisième degré à la tête et au dos.Il est sous surveillance médicale continue", a indiqué le porte-parole de la protection civile, Mongi Khadhi.
Le jeune homme, originaire de Jendouba (nord-ouest), "était démoralisé, son père est mort il y a quatre ans, il a trois frères et sa famille est très pauvre", a ajouté, M. Khadhi.
L'avenue Habib Bourguiba est l'axe central de Tunis dont les trottoirs sont aménagés de terrasses et où de nombreux Tunisois gagnent leur vie en vendant des cigarettes à l'unité, jasmin ou bibelots, une activité interdite.De nombreux vendeurs se plaignent du harcèlement des policiers.
Le chômage reste à des niveaux élevés (17% environ), notamment parmi les jeunes diplômés, bien que la Tunisie soit sortie de la récession en 2012 avec une croissance de 3,6%.
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