Le fils et ancien ministre de l'ex-président sénégalais Abdoulaye Wade, Karim Wade, dont la fortune est évaluée à plus d'un milliard d'euros par une cour spéciale qui le soupçonne d'enrichissement illicite, s'apprêtait mardi à passer une seconde nuit en garde à vue.
Arrêté lundi après-midi à Dakar, Karim Wade a été placé en garde à vue peu après dans une gendarmerie de la capitale où il peut être maintenu jusqu'à vendredi, le délai maximum de la garde à vue étant de 96 heures.
Selon la presse locale, six de ses "complices" sont aussi en garde à vue, dont son ancien conseiller en communication, un homme d'affaires, un responsable d'une société aéroportuaire d'assistance au sol et un expert-comptable.
L'arrestation du fils Wade, 44 ans, est intervenue juste après le dépôt par ses avocats de justificatifs de ses avoirs estimés par la Cour de répression de l'enrichissement illicite (CREI) à plus d'un milliard d'euros.
La CREI, une cour spéciale créée en 1981 par l'ancien président Abdou Diouf (1980-2000) et en sommeil depuis plusieurs années, a été réactivée par Macky Sall après son élection le 25 mars 2012, face à Abdoulaye Wade qui était au pouvoir depuis douze ans.
Le parquet de la CREI avait donné le 15 mars un délai d'un mois à Karim Wade pour justifier de l'origine de ses biens, après plusieurs auditions par les enquêteurs.
Le patrimoine attribué à Karim Wade, qui, de 2002 à 2012 a été conseiller spécial et "super ministre" de son père, comprend des sociétés, des propriétés immobilières, des comptes en banque selon ses avocats.
Alioune Ndao, procureur de la CREI, a précisé mardi devant la presse qu'il avait consulté "pendant deux heures" le dossier présenté lundi par les avocats de Karim Wade sur l'origine de ses biens, ce qui a permis selon le substitut du procureur de la Cour, Antoine Diome, de mettre à jour "une véritable ingénierie financière".
Ce dossier "de 42 pages, le reste étant des documents annexes", contenait "des réponses tant sur la forme que sur le fond", selon lui."En deux heures, nous nous sommes fait une religion et nous n'avons pas été convaincus par la pertinence de ces réponses", a dit M. Ndao.
C'est après avoir pris connaissance du dossier que le procureur a ordonné l'arrestation de Karim Wade.Il reviendra à la commission d'instruction de la CREI de décider de son sort, inculpation, mandat de dépôt ou remise en liberté.
"Montage" et "mensonges"
Les avocats du fils Wade s'étaient étonnés que le procureur ait pu étudier en très peu de temps "3.000 documents", affirmant que l'arrestation avait été "programmée à l'avance".
"Ce qu'on lui reproche, c'est un montage, ce sont des mensonges.On ne peut pas remettre comme éléments de preuve près de 3.000 pièces (et) une heure après, prétendre qu'on a examiné l'ensemble de ces documents", a déclaré Ciré Clédor Ly, un des avocats de Karim Wade."Nous sommes dans une logique de la violence d'un Etat qui, en fait, est résolument décidé à ne pas respecter les droits des citoyens", a-t-il affirmé.
"Le procureur (de la CREI) n'a même pas examiné le dossier.L'arrestation est illégale et programmée à l'avance.Parmi les biens qu'on lui attribue, il y a même des terrains immatriculés au nom de l'Etat.Aucun des biens attribués à Karim ne lui appartient", a affirmé un autre de ses avocats, Demba Ciré Bathily.
Selon Babacar Gaye, du Parti démocratique sénégalais (PDS) dirigé par l'ex-président Wade, "Karim Wade est en train de faire les frais de sa filiation avec Abdoulaye Wade.On a l'impression qu'il y a une démarche revancharde sur les vaincus du 25 mars" 2012.
Les avocats du fils Wade se sont en outre plaints que leur client ait été "empêché d'aller à l'extérieur" pour organiser sa défense.Karim Wade est depuis novembre 2012 interdit de sortie du territoire sénégalais avec six autres dignitaires de l'ancien régime.
Il est aussi visé par une enquête en France à la suite d'une plainte de l'Etat du Sénégal pour recel de détournement de fonds publics, recel d'abus de biens sociaux et corruption.
Plusieurs anciens barons du régime Wade, dont d'anciens directeurs de sociétés, ont été emprisonnés ces derniers mois dans le cadre des enquêtes sur l'enrichissement illicite déclenchée par le régime de Macky Sall, une "chasse aux sorcières", selon le PDS.
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