Soudan du Sud: appel au calme après la suspension de l'exécutif

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Juba (AFP)

Les forces de l'ordre étaient déployées en masse mercredi dans la capitale sud-soudanaise Juba et la radio appelait au calme, au lendemain du limogeage de l'ensemble de l'éxécutif par le président Salva Kiir sur fond de rivalité politique avec son vice-président Riek Machar.

Le président Kiir a limogé mardi les 29 ministres du gouvernement, leurs adjoints, ainsi que le vice-président Riek Machar, son grand rival politique, et a suspendu le secrétaire général du parti au pouvoir (Mouvement populaire de libération du Soudan-SPLM), Pagan Amum.

M. Amum, qui mène pour le Soudan du Sud d'épineuses négociations avec Khartoum, et M. Machar sont deux poids lourds de la politique du pays.

Originaire du stratégique Etat sud-soudanais d'Unité, riche en pétrole, M. Machar est, en particulier, une personnalité controversée: il avait fait défection pendant la guerre civile entre la rébellion sudiste - désormais au pouvoir à Juba - pour se rallier à Khartoum, avant de revenir au SPLM.

Salva Kiir avait demandé en avril à ce que ses pouvoirs soient réduits, mais fin juin encore, Riek Machar avait été envoyé à Khartoum pour des discussions avec le président soudanais Omar el-Béchir en personne.

Le limogeage du gouvernement "s'inscrit dans la lutte en cours au plus haut niveau de la classe dirigeante sud-soudanaise," a estimé l'ONG Enough Project, qui milite pour la paix aux Soudans.

"Le vice-président Machar et le secrétaire-général Amum ont tous les deux ouvertement fait part de leur intention de concourir à l'élection (présidentielle) de 2015" face à Salva Kiir, a-t-elle ajouté.

L'abrupte décision de M. Kiir fait craindre une période d'instabilité dans la jeune nation, indépendante du Soudan depuis à peine deux ans, et qui porte encore les stigmates de la longue guerre civile (1983-2005).Le pays est encore infesté d'armes et ravagé par de sanglants affrontements ethniques.

Deux ans après avoir proclamé son indépendance, le 9 juillet 2011, à partir quasiment de zéro, le Soudan du Sud reste un des pays les plus pauvres du monde où tout reste à construire.Les infrastructures de base sont inexistantes, l'administration ne fonctionne pas, la corruption est endémique et la jeune nation enregistre parmi les pires statistiques au monde en matière de développement.

La jeune économie sud-soudanaise a été durement touchée par plus d'un an de suspension de la production de pétrole, qui l'a privé de 98% de ses ressources, sur fond de conflit avec Khartoum dont les oléoducs restent indispensables à l'exportation du brut sud-soudanais.

Des technocrates en place

"Nous demandons à nos citoyens de remplir leur devoir et d'aller travailler," a déclaré mercredi Barnaba Marial Benjamin, qui, jusqu'à son limogeage mardi, était porte-parole du gouvernement et ministre de l'Information.

"Donnez au président une chance de former son gouvernement (...).Il a déjà habilité les technocrates à gérer les affaires courantes," a-t-il poursuivi sur une radio soutenue par l'ONU, Radio Miraya.

Les forces de l'ordre sud-soudanaises bloquaient mercredi plusieurs rues de Juba et étaient déployées massivement devant le complexe gouvernemental, mais la ville était calme, a assuré le porte-parole de l'armée, Philip Aguer.

"C'est un travail de routine, ils sont déployés pour protéger les ministères," a-t-il indiqué à l'AFP.

Nombre des personnes suspendues ont joué un rôle clé au sein du SPLM ou de sa branche armée quand le mouvement luttait contre le régime de Khartoum.La guerre civile avait pris fin en 2005 à la signature d'un accord de paix qui avait ouvert la voix à l'indépendance du Sud en juillet 2011.

Malgré la signature de cet accord et l'indépendance du Sud, de fortes tensions demeurent aujourd'hui entre Khartoum et Juba.

Elles portent notamment sur le partage de la manne pétrolière -- le Soudan du Sud a hérité des trois quarts des réserves pétrolières de brut du Soudan d'avant partition --, la démarcation toujours pas achevée de la frontière commune, ou le statut de régions disputées comme Abyei.

Les négociations menées jusqu'ici par Pagan Amum pour le Sud portent sur tous ces sujets.Et depuis des mois, ces discussions, supervisées par l'Union africaine, piétinent. 

Salva Kiir n'a pour l'instant fait aucune annonce sur les remplacements à la tête de l'exécutif.Impossible à ce stade de dire si certains pourraient revenir ou si le prochain gouvernement sera essentiellement composé de nouvelles têtes.

Les rumeurs de remaniement ministériel et de tensions entre MM.Kiir et Marchar circulaient depuis plusieurs mois à Juba.Mais la décision du président a pris tout le monde par surprise.

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