La France a besoin de l'Afrique et de sa croissance vigoureuse pour créer des emplois, mais ses entreprises tardent à y regagner le terrain perdu et à y investir, ont affirmé mercredi responsables africains et français au cours d'un forum organisé à Paris.
"Nous avons besoin de l'Afrique", a lancé le ministre français de l'Economie, Pierre Moscovici devant de nombreux ministres africains et entrepreneurs réunis à son ministère, après avoir rappelé que la croissance de l'Afrique avait été de plus de 5% par an en moyenne sur la dernière décennie, tandis que ses échanges commerciaux avaient grimpé de 16% annuellement.
Prenant la parole après lui, la ministre des Finances d'un des pays les plus dynamiques du continent africain, le Nigeria, a doucement tancé la France, l'appelant à "travailler un peu plus dur" pour s'implanter en Afrique.Ngozi Okonjo-Iweala a également mis en garde les entreprises françaises menacées, selon elle, de "manquer le bateau" si elles n'investissent pas rapidement dans les infrastructures africaines en pleine mutation.
"L'Afrique n'est pas, ne peut pas être le récipiendaire de notre aide au développement, ni le terrain gardé de situations acquises, qui en réalité ne le sont plus", a déclaré M. Moscovici dans une allusion à la perte de parts de marché subie par la France sur le continent africain ces dernières années.
"Il faut tenir un langage de vérité: la croissance de l'Afrique nous entraîne, son dynamisme nous soutient, sa vitalité nous stimule", a-t-il affirmé en ouvrant cette réunion organisée par son ministère et le Medef, principale organisation patronale française, avant un sommet africain prévu à l'Elysée en fin de semaine.
"M.Moscovici a dit dans son discours: +Nous avons besoin de l'Afrique.+ C'est une déclaration que les Africains doivent absolument assimiler.Il est vrai que l'Afrique a à présent de nombreux courtisans", a répondu la ministre nigériane.
"Mais il est vrai aussi que nos partenaires traditionnels comme la France, que nous n'oublierons pas, pourraient avoir à travailler un peu plus dur pour nous convaincre de travailler avec eux dans les investissements menés sur le continent", a poursuivi Mme Okonjo-Iweala, suscitant des rires dans la salle.
Doubler les échanges en 5 ans
Après avoir exposé de nombreux exemples de privatisations massives d'infrastructures dans les secteurs de l'énergie ou des transports, dans son pays et ailleurs en Afrique, cette ancienne haute responsable de la Banque mondiale a souligné qu'il était "temps pour le secteur privé français de venir".
"Ceux qui ne sont pas encore sur le terrain doivent commencer maintenant.Parce que, croyez-moi, si vous manquez le bateau, si vous n'êtes pas en Afrique maintenant, vous allez rater l'occasion de toute une vie", a déclaré la ministre nigériane, très applaudie.
"Certes, les besoins en infrastructures demeurent importants en Afrique, l'OCDE les chiffre à au moins 50 milliards d'euros par an pendant 10 ans, et nous demeurons compétitifs sur certains projets d'infrastructures, a fortiori quand ceux-ci exigent des montages financiers complexes et de la technicité", a affirmé pour sa part la ministre française du Commerce extérieur, Nicole Bricq.
"Nous voulons, avec Nicole Bricq, doubler nos échanges commerciaux d'ici à cinq ans.Ce qui pourrait permettre tout simplement la création de 200.000 emplois en France", a par ailleurs déclaré M. Moscovici dans un entretien au quotidien Les Echos au sujet de l'Afrique.
"Notre part de marché diminue nettement dans les pays d'Afrique francophone, où elle a été divisée par deux en 20 ans, passant de 31% à 13% en Côte d'Ivoire ou encore de 36% à 14% au Cameroun par exemple", a déploré Mme Bricq, "et, en parallèle, nos parts de marché dans les pays africains anglophones peinent à décoller".Au Nigeria, pays le plus peuplé d'Afrique et 2e marché du continent, cette part n'est que de 3,6%.
"L'Afrique est éveillée et nous devons nous réveiller", a lancé Mme Bricq, qui s'est rendue au Kenya, au Nigeria, au Ghana, en Afrique du Sud, dans toute l'Afrique du Nord et doit prochainement effectuer des visites au Mozambique, en Tanzanie et en Ethiopie.
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