Deux cent cinquante militaires français se sont déployés jeudi dans Bangui après des tirs meurtriers dans plusieurs quartiers de la capitale, à quelques heures du feu vert attendu de l'ONU à une vaste intervention française destinée à mettre fin au chaos en Centrafrique.
"Environ 250 soldats français se sont déployés dans Bangui à la suite des incidents de la nuit", a indiqué le porte-parole de l'état-major des armées, le colonel Gilles Jaron.Ces soldats ont pour mission de "sécuriser les points sensibles" et "des points de regroupement" pour les étrangers.
"Vers 03H00 (02H00 GMT), il y a eu des accrochages entre des ex-Séléka et des éléments armés non identifiés à cette heure (...) les forces françaises ont dû réagir", a-t-il expliqué.
La Centrafrique est plongée dans le chaos et un engrenage de violences entre communautés depuis le renversement en mars du président François Bozizé par une coalition hétéroclite à dominante musulmane, la Séléka.
Le conseil de sécurité de l'ONU devait adopter dans la journée une résolution autorisant la France, ancienne puissance coloniale, à lancer l'opération "Sangaris" en appui de la force africaine (Misca) déjà présente dans ce pays de 4,6 millions d'habitants, un des plus pauvres du monde.
"Vu l'urgence, mon souhait est que l'intervention se fasse (...) immédiatement après la résolution", a déclaré à l'AFP le Premier ministre centrafricain Nicolas Tiangaye.
Les tirs de jeudi, à l'arme lourde et automatique, ont fait des victimes et provoqué la panique, avant de diminuer d'intensité.
"Il y a des morts et des blessés", a dit à l'AFP le responsable de Médecins sans Frontières (MSF) en Centrafrique, Sylvain Groulx, sans pouvoir donner de bilan précis.
Le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius avait déclaré auparavant qu'"autour de 1.200" soldats français seraient déployés en Centrafrique pour une intervention qui débutera "dans les jours qui viennent".
Selon un officier de la force africaine Misca, les tirs ont commencé après que des ex-rebelles Séléka, intégrés dans les nouvelles forces de sécurité, eurent détecté des "infiltrations" de milices hostiles au régime près de l'aéroport avant de gagner d'autres quartiers.
Ce regain de tension survient alors qu'une résolution proposée par Paris, qui préside le Conseil de sécurité, doit être adoptée à l'unanimité des 15 membres du Conseil, selon des diplomates.
Elle donne mandat à la Misca de se déployer "pour une période de douze mois".
Sa mission sera de "protéger les civils, rétablir l'ordre et la sécurité, stabiliser le pays" et faciliter l'acheminement des secours dont la population a un besoin urgent.
"Les choses vont aller très vite"
Le texte autorise surtout aussi les forces françaises en RCA à "prendre toutes les mesures nécessaires pour soutenir la Misca dans l'accomplissement de son mandat".
La Misca doit compter jusqu'à 3.600 hommes mais n'en rassemble pour l'instant que 2.500, mal équipés et entraînés.
Le contingent français, dont plus de 600 hommes sont déjà sur place, sera chargé notamment de sécuriser l'aéroport de Bangui et les principaux axes par où transiteront les convois humanitaires.
"Dès que le président de la République (François Hollande) aura donné le top, les choses vont aller très vite", a souligné M. Fabius, se félicitant de la tenue vendredi et samedi à Paris d'un sommet franco-africain sur la paix et la sécurité en Afrique.
Le vote de l'ONU intervient aussi après un nouveau massacre près de Bangui où au moins 12 civils, des éleveurs peuls musulmans, ont été tués à la machette par des milices formées essentiellement de chrétiens dans la nuit de lundi à mardi.
"La sécurisation de Bangui peut se faire très rapidement mais il faudra aller en province", où se déroulent les massacres sans témoins, a estimé M. Tiangaye.
"Ces attaques contre la population civile de Centrafrique prouvent qu'il y a urgence", a souligné mercredi l'ambassadeur français à l'ONU Gérard Araud."Il nous fallait une résolution, nous allons l'avoir demain".
La résolution est placée sous le chapitre 7 de la Charte de l'ONU qui prévoit le recours à la force, la situation en RCA "représentant une menace à la paix et la sécurité internationales".
Elle demande au secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon des recommandations dans les trois mois pour "une transformation éventuelle de la Misca en opération de maintien de la paix de l'ONU".
Cette transformation demandera une nouvelle décision du Conseil dont certains membres rechignent à lancer d'emblée l'ONU dans une nouvelle opération complexe et dangereuse en Afrique, quelques mois après le déploiement de 6.000 Casques bleus au Mali.
La résolution prévoit également une commission d'enquête sur les droits de l'homme ainsi qu'un embargo sur les armes à destination de la RCA.
Le Conseil exige enfin des élections législatives et présidentielle "libres et équitables", qui doivent en principe se tenir avant février 2015.
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