Le report du second tour de la présidentielle en Guinée a terni un processus de transition démocratique entre militaires et civils qui était considéré comme exemplaire et avait suscité beaucoup d'espoir dans un pays meurtri par cinquante ans de dictature.
Quatre jours avant la date prévue du second tour le 19 septembre, la Commission électorale nationale indépendante (Céni) a annoncé qu'elle n'était pas prête sur les plans technique et logistique à l'organiser, suscitant l'incompréhension des Guinéens.
Ils se demandent en effet comment cela est possible, alors que le premier tour a eu lieu il y a près de trois mois, le 27 juin, et que la date du second avait été déterminée d'un commun accord entre la Céni, les institutions de la transition et les deux candidats en lice, Cellou Dalein Diallo et Alpha Condé.
"Nous sommes très déçus qu'après avoir entretenu l'espoir, la Céni vienne nous dire qu'elle ne peut pas organiser le second tour", dit Mamadi Kaba, responsable de la section guinéenne de la Rencontre africaine de défense des droits de l'Homme (Raddho), organisation ouest-africaine basée à Dakar.
"C'est une Céni politique qui a trahi le peuple par le mensonge et la confusion et si nous nous entêtons à ignorer cette dimension du problème, elle va nous conduire à la guerre", affirme-t-il.
La veille de l'annonce du report, le camp de M. Diallo, favori avec 43,69% au premier tour (18,29% à M. Condé), avait clairement dit qu'il risquait d'avoir du mal à "contenir" ses partisans en cas de nouveau délai.
Des violences électorales avaient fait un mort et cinquante blessés les 11 et 12 septembre dans la banlieue de Conakry, entraînant la suspension de la campagne et l'interdiction des manifestations de rue.
La Céni, qui justifie le report par le retard pris dans l'acheminement de nouvelles cartes électorales, des demandes de dernière minute des candidats, les difficultés à procéder à un redécoupage électoral pour tenir compte des irrégularités du premier tour, a évalué à deux semaines le temps nécessaire pour être totalement prête.
Qu'ils approuvent ou non le report, les acteurs de la vie politique guinéenne n'ont pas eu d'autre choix que d'accorder ce délai à la Céni.
La communauté internationale avait salué les accords de Ouagadougou ayant abouti, avec l'aide du médiateur de la crise guinéenne Blaise Compaoré, président du Burkina Faso, à la mise en place en janvier des institutions de la transition devant conduire aux élections et au retour des civils au pouvoir.
Elle avait rendu hommage à l'attitude du général Sékouba Konaté, président du régime de transition, un militaire qui a accepté de jouer le jeu de la démocratie et a remis de l'ordre dans une armée indisciplinée et corrompue, dont des éléments s'étaient rendus coupables du massacre de 156 personnes le 28 septembre 2008 dans un stade de Conakry.
Nations Unies, Union Africaine (UA), Union européenne (UE), Organisation internationale de la francophonie (OIF) et France, ancienne puissance coloniale en Guinée, ont tous exprimé leur grave inquiétude après ce report et exhorté à la tenue la plus rapide possible du second tour.
Le général Konaté lui-même, en confirmant le report mercredi soir, a eu des mots très durs pour fustiger la politisation "des institutions qui n'arrivent plus à jouer pleinement leur rôle" et a conduit son pays "vers l'impasse", risquant de le faire sombrer "dans le désordre et l'anarchie".
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