Centrafrique: des rebelles brandissent la menace de la sécession

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Bangui (AFP)

Si ça continue, "nous rentrons chez nous dans le Nord, et nous divisons le pays en deux!": dans une Centrafrique déchirée par les violences interreligieuses, des partisans de l'ex-rébellion Séléka brandissent désormais ouvertement la menace de la partition.

Ces propos ont néanmoins été désavoués lundi par le porte-parole du président et ex-chef de la Séléka Michel Djotodia.

"Ce que nous sommes en train de faire maintenant n'a pas d'issue.C'est une guerre inutile", a déclaré dimanche au cours d'une conférence de presse à Bangui, Abakar Sabone, ancien chef rebelle, aujourd'hui conseiller du président Djotodia.

Si le dialogue entre chrétiens et musulmans échoue, il faudra "diviser le pays en deux: nous rentrons au nord et ceux qui veulent rester au sud restent au sud, pour qu'il y ait la paix!", a lancé M. Sabone.

Affirmant s'exprimer "au nom de la communauté musulmane" et de "chefs de la Séléka" (coalition rebelles de groupes armés à dominante musulmane, au pouvoir depuis mars 2013), il était entouré de deux ministres du gouvernement.

"Si d'ici une semaine aucune solution pour la paix n'est trouvée, alors tous les musulmans partiront" vers le nord de la RCA, d'où la plupart sont originaires, a-t-il menacé.

"Cette déclaration n'engage que lui, ça n'engage pas le président" Djotodia, a réagi lundi matin son porte-parole, Guy Simplice Kodégué."Il ne peut pas y avoir de sécession.Nous sommes un pays uni, ça n'arrivera pas.Ces mots s'expliquent par un climat d'exaspération générale", a-t-il commenté.

Originaire du nord-est du pays, ancien chef rebelle devenu ministre sous le régime du président déchu François Bozizé, Abakar Sabone ne joue pas de rôle clé au sein de la Séléka.Ses déclarations illustrent néanmoins un ressentiment croissant chez les musulmans centrafricains.

La Séléka est apparue fin 2012 dans le nord de la RCA, aux confins du Tchad et du Soudan, où Peuls et musulmans ont été longuement marginalisés dans un pays très majoritairement chrétien, avant de prendre le pouvoir en mars 2013.Bangui a depuis lors été livrée aux pillages et aux exactions des combattants Séléka.Ces violences ont alimenté la haine des populations contre les musulmans, et plongé depuis début décembre la capitale dans un cycle infernal de massacres et de représailles.

Déployée en urgence pour éteindre le feu, l'armée française concentre pour l'instant l'essentiel de ses efforts sur Bangui, où elle tente en priorité de désarmer les belligérants.

Des zones de non-droit

"Les Français vont peut-être arriver à sécuriser Bangui, mais à ce moment-là les groupes armés iront ailleurs", analyse le chercheur au CNRS/Sciences Po Roland Marchal."Il existe aujourd'hui un risque de dissémination des violences" dans l'arrière-pays, met en garde ce spécialiste de la RCA.

"La Séléka a déjà commencé à remonter vers ses sanctuaires dans la région de Birao et Ndélé (extrême nord-est) pour mettre à l'abri des armes lourdes et des munitions", observe-t-il.Et à terme, "il n'est pas impossible que dans le nord, se reconstitue un groupe armé issu de la rébellion, un genre de +néo-Séléka+", estime M. Marchal.

Sans pour autant parler de sécession, on peut plutôt envisager un statut quo, avance un fin connaisseur de la région.

L'armée française peut "se contenter de sécuriser la Centrafrique utile, comme elle l'a toujours fait lors de ses interventions précédentes: la capitale Bangui, les deux principaux axes routiers vers le Cameroun et le Tchad".

Le reste du pays resterait alors livré à lui-même, le nord-est cette zone de non-droit servant de refuge aux trafiquants et groupes armés, où l'on peut imaginer qu'ils feront moins d'exactions contre leurs propres populations.

Les violences inter-religieuses qui ont surtout touché Bangui et le nord-ouest, semblent pour l'instant épargner le reste du pays.

En province, "la présence d'hommes armés (ex-rebelles) créent des tensions, mais il n'y a pas eu les même flambées de violences partout", explique Nadia Disby, porte-parole du Comité international de la Croix-Rouge.

A Bambari par exemple, importante ville du centre du pays, les patrouilles de la force africaine Misca ont apaisé le climat, et obligé les combattants Séléka à se faire plus discrets, explique Stéphane Vengut, de l'ONG Triangle.

Le sentiment qui prévaut dans les provinces est surtout un sentiment d'abandon, résume-t-il, dans un pays grand comme la France et la Belgique, déserté par l'Etat depuis des lustres: "les gens en ont marre.Il n'y a plus de banque donc plus de cash.Plus de station-service donc plus d'essence.Sans parler des infrastructures de santé...".

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