Centrafrique: la violence continue de secouer Bangui

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Bangui (AFP)

Deux mois après le début de l'intervention française en Centrafrique, la violence continue de secouer Bangui et l'intérieur du pays, où au moins 75 personnes ont été tuées en moins d'une semaine dans des affrontements entre civils chrétiens et musulmans dans l'Ouest.

L'armée française a  cependant jugé lundi que "la violence a été en partie jugulée" en Centrafrique.

Depuis mardi, "au mois 60 personnes ont été tuées" sur le coup dans les combats et 15 ont "succombé à leurs blessures" ultérieurement, à Boda, à une centaine de kilomètres à l'ouest de Bangui, a déclaré lundi l'abbé Cassien Kamatari, curé de la paroisse Saint Michel à Boda, joint par téléphone par l'AFP.

Les violences étaient toujours en cours à la mi-journée et 1.500 chrétiens s'étaient réfugiés dans la paroisse, selon l'abbé.

"Les musulmans continuent de traquer les chrétiens, qui n'ont pour leur défense que des armes de chasse, et quelques armes de fabrication locale", a affirmé l'abbé Kamatari.

Outre les 75 victimes chrétiennes, "il y a eu également des victimes côté musulman, mais le bilan n'est pas disponible", car les corps sont enterrés immédiatement, a-t-il ajouté.

Les violences ont démarré mardi à cause d'"une rixe entre deux musulmans (...), entraînant la mort de l'un d'eux", selon le curé."La population a lynché le second".Ensuite, "des tirs ont été entendus dans la ville et les musulmans bien armés s'en sont pris aux autochtones".

D'après les témoignages d'habitants, d'autres localités de province ont été le théâtre de nouvelles violences ces derniers jours dans l'Ouest. 

"Il y a deux jours, les (combattants musulmans) ex-Séléka sont entrés à Ngaoundaye (nord-ouest), et ils tiraient sur tout ce qui bougeait (...) Tous les habitants ont fui en brousse.Ils se sont ensuite mis à la poursuite des personnes qui ont gagné la brousse et ont continué à leur tirer dessus.On ne sait pas encore combien de personnes ont été tuées", a raconté une habitante en pleurs au téléphone, Nicole Maléyombo.

A Berberati, Carnot et Gamboula (Sud-Ouest), des témoignages font état de pillages commis par des groupes d'ex-Séléka sur la population, volant appareils électroniques, motos, téléphones portables...

Les Séléka - combattants issu de l'ex-rébellion qui a porté au pouvoir en mars 2013 Michel Djotodia, contraint à la démission pour son incapacité à arrêter les tueries interreligieuses -  sont pour l'essentiel neutralisés à Bangui, où ils sont cantonnés sous la surveillance des forces française et africaine (Misca).

Mais nombre d'entre eux se sont récemment repliés en province, quasiment hors de tout contrôle en l'absence des force sinternationales concentrées dans la capitale.

En visite à Bangui lundi, le chef d'état-major des armées françaises, l'amiral Edouard Guillaud, a pourtant jugé que "la violence a été en partie jugulée" en Centrafrique.

"Le désarmement a commencé, tant pour les (milices chrétiennes) anti-balaka que pour la Séléka" a-t-il affirmé au camp M'Poko de l'aéroport de Bangui, où est installée la force française Sangaris, déclenchée le 5 décembre après le feu vert de l'ONU.

"Nous n'avons pas d'ennemis en Centrafrique"

Si la situation sécuritaire s'est progressivement améliorée dans la capitale, il y a toujours des explosions de violences sporadiques et des règlements de compte intercommunautaires quotidiens.

Interrogé sur les critiques de plus en plus nombreuses concernant l'attitude des soldats français lors des opérations de désarmement, accusés de favoritisme envers les anti-balaka, au détriment de la minorité musulmane de Bangui, l'amiral Guillaud a assuré: "nous n'avons pas d'ennemis en Centrafrique".

"A Bangui, il n'y a pas que des civils musulmans qui sont tués.Il y a des exactions des deux côtés.Nous empêchons aussi les massacres de civils musulmans tous les jours", a-t-il affirmé.

S'adressant à ses soldats, l'amiral a souligné: "Il n'y a pas de ligne de front, il ne s'agit pas de vaincre" mais d'une "mission sans ennemis déclarés", face à "une population divisée avec une violence latente".

La Centrafrique s'est enfoncée dans une spirale de violences intercommunautaires depuis la prise du pouvoir par l'ex-rébellion Séléka à dominante musulmane en mars 2013, qui a commis de nombreuses exactions sur une population composée à 80% de chrétiens, alimentant la haine envers les civils musulmans.

Le Conseil de sécurité de l'ONU a donné son feu vert fin janvier à l'engagement d'une force européenne de 500 soldats supplémentaires en Centrafrique, pour épauler les 1.600 militaires français et les 5.500 soldats de la Misca.

Ces renforts risquent d'être insuffisants pour stabiliser un pays dévasté par des mois de tueries interreligieuses, avec des centaines de milliers de déplacés.L'ONU considère qu'il faudrait y déployer 10.000 Casques bleus.

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