Centrafrique: l'armée française durcit le ton envers les anti-balaka

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Bangui (AFP)

Le commandant de la force française en Centrafrique a clairement désigné lundi les miliciens anti-balaka, accusés d'exactions contre les musulmans, comme des "ennemis de la paix" qui seront traités comme des "bandits", face à la persistance de lynchages et de pillages à Bangui et en province.

"Ceux qui se disent +anti-balaka+ sont devenus les principaux ennemis de la paix en Centrafrique, ce sont eux qui stigmatisent les communautés", a insisté le général français Francisco Soriano, au cours d'une rencontre publique à Bangui avec les principaux dignitaires religieux du pays.

Cette forte déclaration intervient au lendemain de l'assassinat par des inconnus de Jean-Emmanuel Ndjaroua, un membre du parlement provisoire centrafricain (CNT), que certains de ses collègues ont attribué à la milice. 

Samedi, le parlementaire avait fait une intervention remarquée devant le CNT dans laquelle il s'était élevé contre les violences dont sont victimes les ressortissants "cosmopolites" de sa région, autrement dit les musulmans.

Outre le parlementaire, au moins 10 personnes ont été tuées au cours de violences accompagnées de pillages à grande échelle dimanche à Bangui.

Face à ces violences, de nombreux civils musulmans fuient Bangui depuis plusieurs semaines par crainte d'exactions, dans un pays où le système judiciaire demeure paralysé.

"C'est un acte ignoble", a commenté un parlementaire, Fernand Mandé Ndjapou, ajoutant: "mais c'est l'impunité qui est à la base de ce cycle de violences qui agitent le pays.On tue un membre de ta famille, mais les assassins ne sont nullement inquiétés.Tu vas être tenté de te faire justice.Et c'est ce à quoi nous assistons (...) Il faut que ceux qui tuent, qui pillent, puissent répondre de leurs actes devant la justice", a-t-il réclamé.

 

La "nébuleuse" anti-balaka

 

Interrogé par l'AFP sur un éventuel cantonnement des miliciens anti-balaka, réclamé par celui qui se présente comme leur "coordonnateur politique" Patrice Edouard Ngaïssona, le général Soriano a répondu : "C'est qui les +anti-balaka+ ? Qui est leur chef ? Quel est leur message politique ? Quelle est leur chaîne de commandement?"

"Personne ne sait rien.C'est une nébuleuse, on est incapable de mettre un vrai visage", a-t-il dit.

Selon M. Ngaïssona, les miliciens seraient environ 70.000 sur tout le pays, un chiffre jugé farfelu par de nombreux observateurs.

Dénonçant "l'ingratitude" de la nouvelle présidente de transition Catherine Samba Panza, le "coordonateur" des milices se disait prêt lundi à déposer les armes et a être cantonnés contre une aide à la réinsertion. 

"Les cantonner, ce serait leur donner une légitimité qu'ils n'ont pas, ce serait leur donner la possibilité de devenir une force qu'ils ne sont pas au service d'un sombre dessein", a estimé le général.

"On ne doit pas les cantonner mais les chasser comme ce qu'ils sont, c'est à dire des hors-la-loi, des bandits", a insisté le général Soriano.

Apparus d'abord en province comme des groupes d'auto défense villageois, les anti-balaka avaient vocation a défendre leurs villages contre l'ex-rébellion Séléka, de majorité musulmane, qui ont porté au pouvoir Michel Djotodia en mars 2013 et commettre de graves exactions envers les civils. 

Sans moyens et surtout sans armes, c'est surtout aux populations civiles que s'en sont rapidement pris les miliciens, avant d'apparaître à Bangui, où en dehors de quelques opérations de harcèlement des ex-Séléka, ce sont également les civils musulmans qui ont été régulièrement pris à partie, pillés ou lynchés. 

Les anti-balaka comptent dans leurs rangs de nombreux anciens membres des Forces armées centrafricaines (FACA) ainsi que des fidèles de l'ancien président François Bozizé, renversé en mars 2013 par Michel Djotodia, contraint à la démission le 10 janvier pour son incapacité à mettre fin aux tueries interreligieuses.

Mais dans la capitale centrafricaine, la milice est surtout constituée de petits groupes autonomes et de pillards. 

Dans un entretien à l'AFP, Patrice Edouard Ngaïssona, ancien député et ministre, a nié lutter "pour le retour de Bozizé".Mais au cours des derniers mois, plusieurs représentants autoproclamés de ces milices étaient des proches de l'ancien président.

M. Ngaïssona lui-même a été élu sur les listes du parti de François Bozizé et a été son ministre de la Jeunesse et des sports.

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