Un des journalistes du réseau satellitaire du Qatar Al-Jazeera poursuivis en Egypte pour diffusion de fausses informations et soutien aux islamistes s'est dit "épuisé" mais confiant sur leur libération à l'ouverture de leur procès jeudi au Caire.
"Nous savons que nous n'avons rien fait de mal.Nous avons confiance dans le fait que la justice nous libérera", a dit Peter Greste, un journaliste australien, à ses confrères présents dans la salle pour couvrir le procès.
Le parquet a fait état de 20 "journalistes d'Al-Jazeera" jugés.Huit d'entre eux, dont l'Australien Peter Greste, sont détenus et les autres recherchés par les autorités.Les huit détenus ont plaidé non coupable.
Les journalistes sont accusés d'avoir manipulé des images et de soutenir le mouvement des Frères musulmans, déclaré "organisation terroriste" par les autorités mises en places par l'armée après la destitution et l'arrestation en juillet du président islamiste Mohamed Morsi.
Les autorités égyptiennes ont fermé en septembre la filiale égyptienne de la chaîne, Al-Jazeera Mubasher Misr.
"J'aime ma famille, je suis fort", a déclaré M. Greste, le seul étranger incarcéré, à travers les barreaux de la cage des accusés.
"Les conditions (...de détention) sont bonnes mais je suis psychologiquement épuisé", a ajouté le journaliste, qui avait été arrêté en décembre dans un hôtel du Caire en compagnie de l'Egypto-canadien Mohamed Fadel Fahmy et l'Egyptien Baher Mohamed.
Dans un communiqué, le directeur exécutif d'Al-Jazeera English, Al Anstey, a regretté jeudi que les trois journalistes n'aient pas été libérés, appelant à une journée de mobilisation en leur faveur le 27 février.
Le procès, qui s'est ouvert devant la cour criminelle du Caire, a été ajourné au 5 mars après une heure et demie d'audience.
Depuis la destitution de M. Morsi, les relations entre l'Egypte et le Qatar se sont plus que tendues: Le Caire a accusé Doha de soutenir les Frères musulmans et l'émirat gazier du Golfe a reproché aux nouvelles autorités égyptiennes leur violente répression des partisans de M. Morsi, qui a fait plus d'un millier de morts en sept mois.
Sur les 20 journalistes poursuivis, 16 Egyptiens sont accusés d'appartenance à une "organisation terroriste" et quatre étrangers -deux Britanniques, un Australien et une Néerlandaise- de leur avoir fourni "argent, équipements et informations" afin de "diffuser de fausses nouvelles" faisant croire à une "guerre civile dans le pays".
- 'Enorme erreur' -
Al-Jazeera a toutefois assuré que seuls neuf des accusés travaillaient pour elle et a dénoncé des accusations "infondées". Les autorités ont affirmé que les journalistes travaillaient sans accréditation.
Parmi les journalistes étrangers jugés par contumace figurent les Britanniques Sue Turton et Dominic Kane et la Néerlandaise Rena Netjes.
Sue Turton, une ancienne collaboratrice des chaînes britanniques Sky News et Channel 4, a expliqué à l'AFP qu'elle espérait que le tribunal rejetterait les charges.
"J'ai été très en colère quand les collègues ont été emprisonnés", a-t-elle déclaré."Nous pensions tous que les autorités allaient se rendre compte de l'énorme erreur qu'elles commettaient", a-t-elle ajouté.
Alors que le pays est divisé entre partisans de l'armée et des Frères musulmans et en proie à des attentats meurtriers, l'ONU et des organisations de défense des droits de l'Homme ont dénoncé une campagne de répression contre les médias.
Human Rights Watch a estimé que ce procès s'inscrivait dans une campagne de répression contre toute forme de contestation et a dénoncé "une tolérance quasi zéro".
Amnesty International a déploré un "revers majeur pour la liberté de la presse" qui "envoie le message effrayant qu'aujourd'hui, une seule version des faits est acceptable en Egypte: celle autorisée par les autorités".
Selon l'Institut international de la presse (IPI), les forces de sécurité ont "systématiquement" accusé les journalistes d'aide au terrorisme et de diffusion de fausses nouvelles, "dans le but d'effrayer tous les journalistes et d'entraver une couverture indépendante".
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