Michel Atangana, "usé" par sa détention au Cameroun, de retour en France

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Aéroport de Roissy (France) (AFP)

Michel Thierry Atangana, qui a passé 17 ans de prison "en isolement" au Cameroun, a retrouvé sa famille vendredi matin à l'aéroport parisien de Roissy, se disant "extrêmement usé" mais reconnaissant d'être enfin libre.

"Je suis extrêmement usé.Le choc est un choc que vous ne pouvez pas imaginer", a déclaré le Français d'origine camerounaise, âgé de 49 ans, après avoir retrouvé notamment ses deux fils, 19 et 23 ans, et les membres de son comité de soutien.

Les traits tirés et visiblement ému, cet homme grand, costume bleu nuit et chemise blanche, a précisé qu'il avait passé toutes ces années "en cellule, en isolement"."Je dois me retrouver intérieurement pour m'exprimer en homme libre", a-t-il ajouté, exprimant sa gratitude envers l'Etat francais et son émotion de revoir ses enfants."Je veux juste dire merci ce matin".

"Il était à l'isolement dans une pièce qui était trop petite pour lui.Il ne pouvait pas se tenir debout, au sens propre comme au sens figuré.Et ce calvaire a duré 17 ans", a précisé à la presse l'un de ses avocats Me Eric Dupond-Moretti.

Après avoir partagé un moment avec ses proches dans l'intimité d'une salle de l'aéroport, Michel Atangana a longuement contemplé une banderole de son comité de soutien le disant enfin libre.

"Je l'ai quasiment vu pour la première fois de ma vie aujourd'hui", a confié à la presse son fils Eric, 23 ans, qui avait 6 ans quand son père a été emprisonné."On va prendre le temps de se rencontrer et de reconstruire notre relation là où on l'avait laissée", a-t-il ajouté, se disant "très fier" de son père.

Michel Atangana "va se rendre (à l'hôpital) du Val-de-Grâce pour quelques examens médicaux" dans la journée, a précisé la ministre déléguée aux Français de l'étranger Hélène Conway-Mouret, qui a salué "un homme courageux, qui a vécu des conditions de détention difficiles".

 

"17 ans, ce n'est pas 17 jours"

 

Il avait quitté Yaoundé jeudi soir, trois jours après sa remise en liberté à la suite d'un décret signé le 18 février par le président Paul Biya.Il était incarcéré depuis 1997 pour des détournements de fonds publics qu'il a toujours niés.

Michel Atangana "est un peu perdu.Il essaye de prendre ses repères.Dix-sept ans, ce n'est pas 17 jours", avait déclaré à l'AFP à Yaoundé l'un de ses avocats, Me Charles Tchoungang.

Michel Thierry Atangana avait été interpellé en 1997, peu après l'arrestation d'un des hommes les plus puissants du régime du président camerounais Paul Biya, Titus Edzoa, qui venait de rompre publiquement avec le pouvoir, et que l'on présente comme l'un de ses proches.

Envoyé au Cameroun par son employeur en 1994 pour des projets routiers, il avait été condamné à 15 ans de prison en octobre 1997 pour détournement et tentative de détournement.Dans des conditions jugées scandaleuses par la défense, il avait de nouveau été condamné à 20 ans en octobre 2012.Une situation ubuesque pour ses avocats qui dénonçaient deux condamnations pour les mêmes faits.

Sa remise en liberté, qui fait suite à un décret de remises de peines collectives, avait mis fin à un long combat pour celui qui a toujours nié les faits dont on l'accuse.

En 2013, ce Français, naturalisé après son mariage, avait reçu plusieurs soutiens qui ont pu accélérer sa libération.En mai, l'affaire a pris une tournure plus diplomatique quand le président François Hollande a jugé "inadmissible" la durée de sa détention.Quelques mois plus tard, le Haut Commissariat aux droits de l'Homme de l'ONU dénonçait "les conditions inhumaines" de sa détention et réclamait une "indemnisation" pour le préjudice subi. 

En décembre, ses avocats français ont déposé une plainte contre trois ministres camerounais pour détention arbitraire, Me Dupond-Moretti pointant à cette occasion son sort "kafkaïen".

 

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