Après bien des péripéties, l'ex-président sénégalais Abdoulaye Wade est rentré vendredi soir dans son pays qu'il avait quitté après sa défaite de 2012 et où il revient soutenir son fils en prison et en instance de jugement.
"J'ai senti à distance les souffrances du peuple.J'ai décidé de rentrer pour lui indiquer la voie", a déclaré Abdoulaye Wade au siège de son parti, devant de nombreuses personnes encadrées, sans incident, par les forces anti-émeutes.
"Nous ne pouvons pas continuer à laisser le Sénégal se détériorer de cette façon.Je l'avais amené au seuil de l'émergence", a dit M. Wade, sans évoquer d'éventuelles actions qu'il pourrait entreprendre.
Il était arrivé quelques heures auparavant à Dakar en provenance de Casablanca au Maroc où il avait été bloqué pendant 48 heures, un retard dont ses partisans et le régime de son successeur, Macky Sall, se rejettent la responsabilité.
Abdoulaye Wade, 87 ans, a dirigé le Sénégal pendant douze ans de 2000 à 2012, et était parti en France après sa lourde défaite face à Macky Sall, un de ses anciens Premier ministres, le 25 mars 2012 au second tour de l'élection présidentielle.
Alors que son arrivée avait été initialement prévue mercredi, M. Wade a accusé les autorités sénégalaises d'avoir refusé de lui donner l'autorisation de survol et d'atterrissage nécessaire à son retour."J'ai compris depuis longtemps que Macky Sall ne veut pas que j'arrive de jour", a affirmé jeudi à Casablanca l'ex-chef de l'Etat en dénonçant "des manoeuvres".
Ses accusations ont été démenties par le porte-parole du gouvernement sénégalais, Abdou Latif Coulibaly, qui a évoqué des modifications de dernière minute sur la liste des passagers, imposant une nouvelle requête auprès des autorités aéronautiques sénégalaises. Il a accusé l'ex-chef de l'Etat d'avoir cherché à provoquer "un effet politique" en vue de se faire passer pour une victime et de "discréditer" le gouvernement.
- Forces de l'ordre en alerte -
Depuis mercredi, le retour annoncé et retardé de Wade crée la polémique et a installé une atmosphère fébrile à Dakar.Les forces de sécurité sont sur le pied de guerre et des policiers anti-émeutes postés en différents lieux et grands axes de Dakar.
Le gouvernement avait interdit mercredi un meeting prévu à l'arrivée d'Abdoulaye Wade qui avait tenu à affirmer qu'il ne rentrait pas pour "déstabiliser" le régime, tout en demandant à ses partisans de venir au meeting interdit.
L'ex-président est rentré alors que son fils Karim Wade, qui fut aussi ministre durant son mandat, est en détention préventive depuis un an.Karim Wade doit être jugé en juin pour enrichissement illicite présumé, dans le cadre de la traque des biens mal acquis déclenchée par le président Sall après son élection.
La justice sénégalaise reproche à Karim Wade, 45 ans, qui a eu des pouvoirs étendus sous le régime de son père, d'avoir un patrimoine "illicite" d'abord estimé à 1,2 milliard d'euros, puis ramené à 178 millions d'euros, accusations qu'il nie en bloc.
Le PDS, auquel appartient également Karim Wade, a dénoncé une "chasse aux sorcières" qui touche aussi d'autres responsables du parti.
Dans un entretien au quotidien français Le Monde lundi, Abdoulaye Wade a accusé Macky Sall d'avoir "utilisé l'idée de la traque des biens mal acquis pour combattre Karim, le faire condamner, le priver de ses droits civiques pour qu'il ne se présente pas" à la présidentielle de 2017.
Avant des élections locales prévues en juin, Abdoulaye Wade a dit aussi rentrer à Dakar pour reprendre en mains son parti affaibli et divisé depuis son départ.Il est toujours secrétaire général du PDS.
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