La dépouille de Camille Lepage à Bangui, Paris ouvre une enquête

Infos. ...

Bangui (AFP)

 Le corps de la jeune journaliste française Camille Lepage, 26 ans, tuée lors d'un reportage en brousse en Centrafrique avec les milices anti-balaka, est arrivé mercredi à Bangui, où une enquête est en cours pour connaître les circonstances exactes de sa mort.

"Nous avons accueilli le corps de Mlle Lepage ce matin vers 10h30 (9H30 GMT) au camp Mpoko (sur l'aéroport).Nous sommes en contact évidemment avec la famille et les assurances, et faisons le maximum pour rapatrier son corps le plus rapidement possible", a déclaré à l'AFP Romain Vuillaume, Premier conseiller de l'ambassade de France à Bangui.

Une enquête est en cours par la prévôté de Sangaris et la Misca (force africaine), qui interrogent les anti-balaka qui étaient dans le véhicule où le corps a été découvert, a-t-il indiqué. 

Le parquet de Paris a ouvert mercredi une enquête préliminaire sur sa mort, a indiqué à l'AFP une source judiciaire.

Selon des sources concordantes, la jeune femme a été tuée lors d'une embuscade dans la région de Bouar (ouest), près du Cameroun et du Tchad.

"Cela date de deux jours.Camille Lepage était en compagnie des anti-balaka pour son reportage.Ils seraient tombés dans une embuscade certainement tendue par des éléments armés qui écument la région.Elle a subi des tirs et les anti-balaka ont remonté le corps ainsi que ceux de leurs compagnons", a expliqué mardi soir une source militaire, qui a demandé à rester anonyme.

Selon une source de la gendarmerie de Bouar, l'embuscade "a eu lieu à Gallo, un village situé sur l'axe Bouar-Garoua-Boulaï (Cameroun)", à une soixantaine de kilomètres de Bouar, où les anti-balaka "ont eu à plusieurs reprises des accrochages meurtriers avec des ex-Séléka et Peuls armés". 

"Il y a eu des affrontements qui ont duré plus d'une demi-heure et ont fait au moins dix morts, dont quatre anti-balaka et six ex-Séléka et peuls armés", a-t-elle ajouté.

Le président François Hollande a promis de mettre en �?uvre "tous les moyens nécessaires pour faire la lumière sur les circonstances de cet assassinat et retrouver les meurtriers".

"Assassiner un journaliste, c'est toujours commettre un double crime: contre une personne et contre la liberté d'informer", s'est indigné mercredi le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius, devant les députés français, qui ont observé une minute de silence à l'Assemblée nationale en hommage à Camille Lepage. 

La présidente centrafricaine, Catherine Samba-Panza, a condamné dans un communiqué "un crime odieux et crapuleux".

-"Détermination"-

Selon Paris, c'est une patrouille de la force française Sangaris qui a découvert la dépouille de la photographe lors d'un contrôle sur un véhicule conduit par des éléments anti-balaka.

La jeune photographe "ne portait pas de gilet par-balle" au moment de sa mort, selon une source au ministère de la Communication à Bangui.

Le nord-ouest de la Centrafrique, où la journaliste effectuait son dernier reportage, est l'une des régions les plus touchées par les affrontements entre groupes armés depuis le début du conflit il y a un an.

La Centrafrique a sombré dans le chaos lorsque l'ex-rébellion Séléka, à majorité musulmane, a pris le pouvoir entre mars 2013 et janvier 2014 dans un pays composé à 80% de chrétiens, multipliant les exactions.

Les "anti-balaka", des milices chrétiennes hostiles aux Séléka et plus généralement aux musulmans, se sont formées, semant elles aussi la terreur parmi les civils.

"Camille, c'était une jeune femme passionnée par ce qu'elle faisait.Elle en avait envie depuis une dizaine d'année du photojournalisme", a confié mercredi à l'AFP sa mère, Maryvonne Lepage, à Angers.

"Elle était toujours dans cette logique d'aller sur des conflits où les médias n'allaient pas.Les conflits oubliés.Et elle recherchait des journaux assez libres de pensée", a ajouté Mme Lepage.

A Juba, au Soudan du Sud, où elle vivait depuis 2012, la jeune femme avait notamment collaboré avec l'AFP, dont le responsable photo pour l'Afrique de l'Est, Carl de Souza, a gardé le souvenir d'une jeune femme "très enthousiaste et avide d'apprendre".

"Elle nous a bluffé par sa détermination", explique à l'AFP Wilfrid Estève, responsable de Hans Lucas, l'agence qui diffusait ses photos, en décrivant quelqu'un "de rigoureux, mûr et réfléchi" qui "travaillait ses sujets sur du vrai long terme".

Son travail avait été publié dans de grands journaux français et étrangers, dont le New York Times, le Washington Post, le Guardian ou Le Monde.En février, elle avait remporté un prix prestigieux, le Pictures of the Year (POY), dans la catégorie portrait.

Sur son compte Instagram, son dernier cliché date d'une semaine.Il montre un groupe de miliciens dans la brume sur une route en terre battue."En déplacement avec les anti-balaka à 120 km de Berberati", avait-elle écrit.

Newsletter

Restez informé ! Recevez des alertes pour être au courant de toutes les dernières actualités.
Réagir à cet article

L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.

En direct
Les rendez-vous santé
Nos applications
Facebook
Twitter
Instagram
La dépouille de Camille Lepage à Bangui, Paris ouvre une enquête