Burkina: le lieutenant-colonel Zida, nommé Premier ministre, va former son gouvernement

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Ouagadougou (AFP)

Dans la foulée de sa nomination comme Premier ministre, actant le maintien de l'armée au coeur du pouvoir au Burkina Faso, le lieutenant-colonel Isaac Zida doit commencer jeudi la formation de son gouvernement.

"J'en appelle à l'ensemble de la communauté nationale (et) internationale (...) à nous accompagner sans a priori pour gagner le challenge d'une transition apaisée", a déclaré mercredi Isaac Zida pour sa première allocution à ce poste.

Le gouvernement oeuvrera "en toute humilité" et "dans un engagement sacerdotal et patriotique" afin de "redonner confiance" au peuple par son "ardeur au travail", son "don de soi" et son absence de "calcul égoïste", a-t-il affirmé.

A peine nommé par un décret du nouveau président intérimaire Michel Kafando, investi mardi, le militaire donne donc des assurances.

Sa désignation semble en effet contraire aux voeux affichés de la communauté internationale, qui souhaitait une transition strictement civile après la chute du président Blaise Compaoré, chassé par la rue le 31 octobre après 27 ans de règne.

Isaac Zida, depuis lors au pouvoir, ne pourra, à l'instar de M. Kanfando, être candidat aux élections présidentielle et législatives de novembre 2015, qui marqueront la fin de la transition.Mais il disposera du pouvoir important de nommer les 25 membres du gouvernement, dont il communiquera la liste "au plus tard dans les 72 heures", a-t-il indiqué.

 

- Mea culpa du parti de Compaoré -

 

De nombreux acteurs civils souhaitent voir les partis pro-Compaoré exclus de ce gouvernement.

Mercredi, après la nomination de M. Zida, le parti du président Blaise Compaoré, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), s'est fendu d'un mea culpa.Il a reconnu avoir commis "une erreur d'appréciation" en poursuivant le projet de révision de la Constitution, qui devait permettre le maintien de M. Compaoré au pouvoir.

Plusieurs partis de la mouvance présidentielle ont également fait ces derniers jours des déclarations publiques de contrition, implorant le "pardon du peuple".

"Il va falloir voir dans quelle mesure cette nomination est de nature à changer l'orientation de la transition", a commenté Siaka Coulibaly, politologue et membre de la société civile.

La charte de transition, la constitution intérimaire, entérinée par armée et civils dimanche, n'a pas défini les attributions du président et du Premier ministre, a-t-il observé.

"On ne sait donc pas si le Premier ministre est un fusible, protocolaire, ou s'il aura véritablement du pouvoir", a analysé M. Coulibaly.

Pour un diplomate en poste à Ouagadougou, la réponse est évidente: "Personne ne va se tromper, c'est (Zida) qui va diriger le pays." "Ce n'est pas la gueule de bois mais il y a un peu de ça", a réagi le diplomate, après l'ivresse d'une transition civile pour l'instant exemplaire.

"La question des sanctions", déjà envisagées par les partenaires du Burkina Faso pour contraindre l'armée à remettre le pouvoir aux civils après le 31 octobre, "pourrait se reposer", a-t-il estimé.

 

- Société civile vigilante -

 

La nomination de Michel Kafando, un ex-ambassadeur expérimenté au profil de technocrate - soutenu par l'armée -, au poste de président intérimaire avait fait "l'unanimité", a observé un autre diplomate.

"Compétent", M. Kafando "a laissé les meilleurs souvenirs à tout le monde" à l'ONU, où il a représenté le Burkina une quinzaine d'années au total. 

Mais le maintien de l'armée au coeur du pouvoir, acté mercredi, a suscité un mécontentement parmi la plupart des habitants de Ouagadougou interrogés par l'AFP.

La société civile reste vigilante, préférant attendre ses actes pour juger Zida.Plusieurs de ses membres dénoncent toutefois une "entente" entre opposition et armée, dont la société civile a été exclue, qui a permis l'attribution du poste de Premier ministre à un militaire. 

Dans les faits, le nouveau Premier ministre avait déjà pris la main dans des domaines publics importants.Les patrons de la Société nationale burkinabè des hydrocarbures (Sonabhy) et d'électricité (Sonabel), proches du clan Compaoré, ont été remerciés "pour sabotage".

Ces mesures s'ajoutent à la suspension des conseils municipaux et régionaux, dans lesquels les pro-Compaoré étaient fortement majoritaires.

Mais le Burkina Faso reste un pays pauvre, aux faibles ressources, qui ne peut se passer de l'aide extérieure.La réaction de la communauté internationale - qui avait fortement contribué à un rapide retour à la transition civile - à la nomination de Zida, sera donc déterminante.

 

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