Nigeria: l'état d'urgence expire dans le Nord-Est, incidents au Parlement

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Abuja (AFP)

L'état d'urgence imposé dans le nord-est du Nigeria pour contrer les islamistes de Boko Haram a pris fin jeudi, selon les députés, faute d'avoir été prolongé par le Parlement, fermé après des tensions entre police et élus de l'opposition.

Le président du Parlement, David Mark, a dû annoncer jeudi en fin de matinée la fermeture du bâtiment jusqu'à mardi prochain, après un sérieux incident dans le hall: les forces de l'ordre ont tiré des gaz lacrymogènes à l'arrivée du président de la Chambre des représentants, Aminu Tambuwal, un ancien allié du pouvoir récemment passé à l'opposition.

Or la chambre basse devait se prononcer jeudi sur la proposition du président Goodluck Jonathan de prolonger l'état d'urgence, dans les trois Etats du Nord-Est les plus touchés par l'insurrection du groupe islamiste armé Boko Haram, pour six mois supplémentaires.

M. Tambuwal est arrivé au Parlement vers 10H00 (09H00 GMT), selon son porte-parole, Imam Imam, accompagné d'une quarantaine de députés du Congrès progressiste (APC), le principal parti d'opposition qu'il a rejoint récemment.

Le Parti démocratique du peuple (PDP, au pouvoir) conteste à M. Tambuwal le droit de continuer à présider la Chambre des représentants depuis qu'il a rejoint l'opposition, et l'a privé des policiers et militaires qui assuraient jusqu'ici sa sécurité.

L'APC a vivement critiqué l'état d'urgence à plusieurs reprises, considérant que depuis son instauration en mai 2013, la violence n'a fait qu'empirer dans les Etats de Borno, Yobe et Adamawa, où des villes entières sont contrôlées par les islamistes.Depuis son déclenchement en 2009, l'insurrection de Boko Haram a fait plus de 10.000 morts et près de 1,5 million de déplacés.

M. Tambuwal a été stoppé par la police, avec sa délégation, devant la grille principale du Parlement, a ajouté M. Imam.

Les députés se sont alors mis à secouer les grilles avec force, puis à les escalader, selon des images diffusées en boucle jeudi par la chaîne privée Channels.

"Une fois qu'on était à l'intérieur du Parlement, ils (les policiers) nous ont dit qu'on n'avait pas le droit d'entrer dans l'hémicycle", a déclaré M. Imam."C'est au milieu de ce chaos qu'ils se sont mis à tirer des gaz lacrymogène sur le président" de la chambre.

Selon un journaliste de l'AFP, le hall était encore plein de gaz lacrymogène plusieurs minutes après l'arrivée de M. Tambuwal.

Le porte-parole de la police, Emmanuel Ojukwu, a déclaré dans un communiqué que les policiers avaient agi après des informations selon lesquelles "des voyous et des bandits" cherchaient à "envahir" le Parlement.

Plus tard dans la journée, Zakaria Mohammed, le porte-parole de la Chambre des représentants, a déclaré à l'AFP que la Chambre avait pu se réunir rapidement avant que M. Mark n'ordonne la fermeture du Parlement, et qu'elle avait pris la décision de rejeter la prolongation de l'état d'urgence dans le Nord-Est.

"L'état d'urgence a pris fin, pour nous", a-t-il affirmé.

"Nous avons demandé au président de s'appuyer sur la section 8 de la loi sur les forces armées, qui lui donne le pouvoir de déployer l'armée dans les zones du pays où ont lieu des affrontements", a expliqué le porte-parole des députés.

Devant évacuer les lieux, les députés n'ont cependant pas pu voter en session plénière, a-t-il précisé.

Le président a besoin de l'approbation des deux chambres du Parlement pour pouvoir prolonger l'état d'urgence, qui expirait aujourd'hui.

On ignore quels changements implique l'expiration de l'état d'urgence sur le terrain, les pouvoirs exceptionnels conférés à l'armée, régulièrement accusée d'exactions, n'ayant jamais été énoncés publiquement.

Le PDP, au pouvoir depuis la fin des dictatures militaires en 1999, a été très affaibli par de nombreuses défections en faveur de l'APC ces dernières mois, alors qu'approchent des élections présidentielle (Goodluck Jonathan est candidat à sa succession) et législatives prévues en février 2015.

Si le parti présidentiel détient en ce moment une courte majorité dans les deux chambres, l'opposition a parfois été majoritaire cette année.

Pour le défenseur des droits de l'Homme Jiti Ogunye, la scène de chaos jeudi au Parlement rappelle la période post-indépendance, dans les années 1960, quand le gouvernement, divisé, a fini par être renversé par l'armée.

"Nous sommes dans un Etat d'anarchie", s'est-il inquiété.

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