Les affaires sont bonnes au marché Luburma dans le centre de la capitale zambienne Lusaka, où les produits "made in China" s'arrachent comme des petits pains.Mais sous les lanternes rouges et les affiches en mandarin, clients et employés zambiens remâchent leur colère.
"C'est comme si nous n'étions plus chez nous: la Zambie a été donnée aux Chinois", lance Francis Kasonde, qui recherche de la musique et des sandales en plastique dans les allées du marché.
"C'est incroyable de donner tout le marché aux Chinois et de laisser nos commerçants dépendants des aides de l'Etat", ajoute le jeune homme, reflétant les frustrations croissantes des Zambiens envers la superpuissance asiatique.
Environ 100.000 Chinois se sont installés dans ce pays pauvre d'Afrique australe au cours des dix dernières années, principalement attirés par les riches mines de cuivre du nord où ils ont bénéficié d'importants avantages fiscaux.
Ils ont rapidement été accusés par les syndicats et l'opposition d'exploiter la main d'oeuvre locale en la payant très peu et de ne pas respecter les mesures de sécurité.
En 2007, lors d'une visite en Zambie, le président chinois Hu Jintao avait dû renoncer à un déplacement dans une mine du nord du pays, détenue par des Chinois, où 50 travailleurs étaient morts dans une explosion deux ans plus tôt.
Depuis sa visite, Pékin a investi 6,1 milliards de dollars supplémentaires dans le pays, créant des emplois pour environ 15.000 Zambiens, et s'est lancée dans de nombreux grands travaux.
Mais les tensions ont ressurgi à la mi-octobre quand deux responsables chinois d'une mine de charbon ont ouvert le feu sur des mineurs en grève, faisant 12 blessés.
Les deux hommes ont été inculpés pour tentative de meurtre et le président Rupiah Banda a immédiatement appelé au calme, en demandant à la population de ne pas développer une "phobie" antichinoise.
Ce qui n'a pas empêché le chef de l'opposition, le populiste Michael Sata, de jeter de l'huile sur le feu."Les Zambiens devraient toujours être prioritaires face aux Chinois", a-t-il dit à l'AFP.
"Ils profitent de notre peuple, ça se voit dans le marché de Luburma", a-t-il ajouté."Comment se fait-il qu'ils aient pris le contrôle de tout le marché à la place des Zambiens ? C'est inacceptable."
En 2001, la capitale Lusaka a donné une concession de 65 ans à une entreprise chinoise, China Hainan Zambia, pour le développement et la gestion du marché.
Avec ses 432 étals de trois mètres sur deux et ses 121 boutiques, les places du marché sont beaucoup trop chères pour la majorité des Zambiens, et les commerçants chinois ont effectivement pris le dessus.
Avec leurs vêtements bon marché et leurs articles en plastique, ils attirent une importante clientèle.Mais les bas prix ne suffisent pas à apaiser les esprits.
"Je ne gagne que 200.000 kwacha par mois (43 dollars, 31 euros) alors que je travaille du lundi au samedi sans pause déjeuner", se plaint Catherine Nyirenda, 25 ans, employée dans une usine textile chinoise.A ce salaire, il est difficile pour cette veuve de nourrir ses trois enfants.
Michael Mwale travaille pour sa part dans une boulangerie gérée par des Chinois."Il fait chaud et le patron nous enferme toute la journée à l'intérieur sans se préoccuper du fait que le bâtiment puisse prendre feu", accuse-t-il."C'est dangereux, inhumain et on risque nos vies pour seulement 350.000 kwachas!"
Face à ces critiques, les commerçants du marché ne peuvent que sourire: ils parlent très peu ou pas du tout l'anglais ou les langues africaines locales.
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