Industrialisation de l'Afrique, amélioration des soins de santé et stabilité du continent: la grand-messe des relations nippo-africaines s'ouvre samedi à Nairobi avec pour principaux enjeux la manne financière que Tokyo consacrera au développement de l'Afrique et la possibilité pour le Japon de se démarquer de Pékin sur le continent.
La sixième édition de la Conférence internationale de Tokyo pour le développement de l'Afrique (Ticad) s'achèvera dimanche, mais elle est d'ores et déjà qualifiée d'"historique" par ses participants.Elle est en effet organisée pour la première fois sur le sol africain, et non au Japon comme c'est le cas depuis l'édition inaugurale de 1993.
"Le développement n'est pas quelque chose qui va subitement s'offrir à l'Afrique, ce sont les Africains eux-mêmes qui doivent obtenir la liberté et la prospérité qu'ils méritent", a déclaré vendredi le président kényan Uhuru Kenyatta lors d'une conférence de presse à Nairobi avec le Premier ministre japonais Shinzo Abe, en prélude au sommet.
Les trois principaux axes de travail choisis pour la conférence sont l'industrialisation de l'Afrique avec la diversification de son économie, l'amélioration des soins de santé d'un continent régulièrement touché par des épidémies, ainsi que la stabilisation de l'Afrique, minée par de nombreuses crises.
Une trentaine de chefs d'Etat doivent participer à cette conférence, et superviser la signature de plus de 70 protocoles divers et accords commerciaux entre le Japon et l'Afrique.Un des moments clés du week-end sera en outre l'annonce par Shinzo Abe du montant de l'aide financière du Japon au continent africain pour les prochaines années.
En 2013, lors de la précédente Ticad, le Japon avait promis 3.200 milliards de yens d'assistance sur 5 ans (28 milliards d'euros au cours actuel), dont 1.400 milliards de yens d'aide directe.
"La plupart des nations qui échappent à l'emprise de la pauvreté le font grâce à l'industrialisation, et l'Afrique n'a pas encore été à la hauteur de son potentiel", a en outre souligné M. Kenyatta, tandis que M. Abe a qualifié l'industrialisation de "clé du développement économique".
"Le Japon peut fournir (...) de la technologie de haute qualité ainsi que le développement des ressources humaines", a assuré le Premier ministre japonais, évoquant également le secteur de l'agriculture.
- L'ombre de la Chine -
Car il s'agit aussi pour le Japon, qui a longtemps boudé le continent en tant que partenaire commercial, de consolider sa position sur le marché africain, et de démarquer son offre de celle de son encombrant voisin chinois.
"En termes de commerce et d'investissements sur les décennies à venir, l'Afrique est le continent du futur", assure lors d'un point presse à Nairobi le porte-parole du gouvernement japonais Yasuhisa Kawamura, rappelant que "Ticad a à peine plus de vingt ans".
D'autant que la diversification de l'économie africaine crée autant d'opportunités, notamment dans la planification urbaine, l'énergie, l'assainissement des eaux ou la prévention de catastrophes naturelles, souligne-t-il.
Se gardant bien de nommer Pékin, M. Kawamura évoque la "qualité" de l'offre japonaise, notamment pour le financement et la construction de nouvelles infrastructures en Afrique, une référence à peine voilée au fait que Tokyo est perçu sur le terrain comme un prestataire de meilleure qualité, même s'il est plus lent et élabore des projets de moindre ampleur que ceux de la Chine.
Les échanges commerciaux entre le Japon et l'Afrique s'élevaient à 24 milliards de dollars en 2015, bien loin des 179 milliards de dollars d'échanges entre le géant chinois et ce continent.
Présente à Nairobi, la directrice du Programme de l'ONU pour le développement (PNUD), Helen Clark, a appelé les participants de la Ticad à ne pas oublier l'"aspect humain" du développement de l'Afrique.Elle a aussi souligné, dans un entretien à l'AFP, l'importance d'un "modèle de croissance inclusif, qui ne se limite pas à soutenir la croissance de la classe moyenne et des villes" et veille à ne pas creuser les inégalités sociales ou amplifier l'exode rural.
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