Libye: risque d'escalade après l'assaut de terminaux pétroliers

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Tripoli (AFP)

Le gouvernement d'union soutenu par la communauté internationale en Libye a appelé dimanche ses forces à reprendre deux importants terminaux pétroliers tombés aux mains de troupes rivales, faisant craindre une escalade de la violence dans un pays en pleine tourmente.

Les troupes du général Khalifa Haftar, chef proclamé de l'armée liée au gouvernement non reconnu basé dans l'est du pays, ont lancé le matin une offensive surprise contre les forces fidèles au gouvernement d'union (GNA), s'emparant des terminaux d'al-Sedra et de Ras Lanouf, les plus importants du pays.

C'est la première fois que les deux camps s'affrontent militairement depuis l'installation en mars à Tripoli du GNA, qui peine à asseoir son autorité dans le pays miné par les luttes de pouvoir et les violences depuis la révolte de 2011 ayant chassé du pouvoir le dictateur Mouammar Kadhafi.

L'émissaire de l'ONU pour la Libye Martin Kobler s'est déclaré "préoccupé" par les combats qui, a-t-il averti, "vont accentuer les divisions" entre Libyens.

Les pro-Haftar ont "pris le contrôle des terminaux d'al-Sedra et de Ras Lanouf", a annoncé leur porte-parole, Ahmad al-Mesmari."Les affrontements se concentrent maintenant autour du port de Zoueitina", dans le Croissant pétrolier, une région du nord-est qui regroupe l'essentiel des infrastructures économiques du pays.

Dans un communiqué publié en soirée, le GNA a condamné "cette agression flagrante contre les acquis du peuple libyen, qui porte atteinte à la souveraineté nationale".

Il a appelé les forces qui lui sont fidèles à se rendre dans la région du Croissant pétrolier pour reprendre les terminaux pétroliers: "Toutes les unités militaires doivent accomplir leur devoir national avec courage et sans aucune hésitation".

Le GNA a également appelé les forces pro-Haftar à se retirer "de tous les sites attaqués". 

"Les forces de Haftar ont lancé l'attaque en utilisant avions et artillerie", a dit un porte-parole des Gardes des installations pétrolières (GIP), une milice qui assure la sécurité des terminaux et a rejoint les forces fidèles au GNA.

Le porte-parole, Ali al-Hassi, a affirmé que les combats se poursuivaient, déplorant des morts et des blessés.

- 'Atouts de l'Etat' -

Le porte-parole des autorités de l'est, Hatem el-Ouraybi, a indiqué que "le gouvernement saluait l'offensive des forces armées pour reprendre le contrôle total de la région du Croissant pétrolier"."C'est le rôle de l'armée et de la police de préserver les atouts de l'Etat".

Il a appelé les "fils de la région du Croissant pétrolier, surtout ceux enrôlés dans les unités des GIP, à rejoindre les rangs de l'armée ou à rentrer chez eux".

Une perte des installations pétrolières affaiblirait davantage le GNA, qui sera privé d'importants revenus alors qu'il ne parvient toujours pas à imposer son autorité malgré les efforts de l'ONU.

L'un des principaux désaccords entre les deux gouvernements rivaux est la place de Khalifa Haftar, un général septuagénaire qui a progressivement pris de l'importance depuis la révolte anti-Kadhafi.

La zone du Croissant pétrolier est située entre les villes de Benghazi et Syrte, d'où les pro-GNA tentent depuis quatre mois de chasser le groupe jihadiste Etat islamique (EI) qui en avait fait son bastion.

Pour le chercheur Mattia Toaldo, du groupe de réflexion European Council on Foreign Relations, l'offensive sur le Croissant pétrolier "risque de dégénérer en conflit, à moins qu'il n'y ait une médiation très rapidement".Elle menace aussi de "donner le coup de grâce à l'industrie pétrolière". 

- L'enjeu de l'or noir -

Si la Libye dispose des plus importantes réserves pétrolières d'Afrique -estimées à 48 milliards de barils-, elle est paradoxalement le membre de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) qui produit le moins.

Entre 2010 et 2016, sa production de brut a été divisée par cinq, passant d'environ 1,5 million à 300.000 barils par jour.

Fin juillet, les GIP avaient annoncé la réouverture des terminaux de Ras Lanouf et d'al-Sedra, fermés depuis janvier après des attaques de l'EI.Les pro-Haftar avaient alors menacé de "frapper" les tankers qui viendraient dans les ports libyens faire transaction avec le GNA.

Quant aux revenus pétroliers, ils ont fondu et devraient s'élever à maximum 4 milliards de dollars (3,6 milliards d'euros) en 2016, selon des sources du secteur pétrolier libyen.Soit plus de dix fois moins qu'en 2010.

"Le pétrole appartient à TOUS les Libyens", a souligné Martin Kobler dans un tweet.

L'incapacité de la Libye à sortir de la crise inquiète fortement les pays européens, confrontés à l'afflux des migrants traversant la Méditerranée depuis son littoral. Fin août, l'Italie a ainsi dû faire face à l'arrivée de plus de 14.000 personnes en moins d'une semaine, quasiment toutes originaires d'Afrique subsaharienne.

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