Le premier Forum Invest In Mali s’est déroulé en décembre dernier à Bamako. Où en sont les projets annoncés ?
Au delà des annonces, l’exécution de ces projets a débuté… Le ministre du Développement industriel a visité il y a quelques jours le site de la prochaine cimenterie, le projet d’électrification rurale est en train d’équiper la région de Kayes. Enfin, le projet de création d’une unité de fabrication d’emballage a déjà commencé les machines sont en place. L’usine sera lancée d’ici la fin de l’année.
Quels sont les secteurs ciblés par votre agence pour les investissements ?
Nous focalisons notre action sur quatre secteurs : l’agriculture, de la production à la transformation, l’élevage -le Mali a le premier cheptel ouest-africain hors Nigeria-, l’énergie, secteur dont tous autres dépendent, et les infrastructures. Priorité est mise sur ces secteurs mais les autres ne sont pas abandonnés. Ainsi, un secteur comme la santé se révèle très dynamique avec la construction de cliniques privées en partenariat avec le Maroc et la Tunisie. Le secteur des NTIC (nouvelles technologies de l’information et de la communication) bouillonne également grâce aux start-up créées par la diaspora.
Justement, quel rôle peut jouer la diaspora dans cette politique d’attractivité ?
Notre agriculture reste traditionnelle. Il nous faut la moderniser, permettre aux paysans de s’outiller, se moderniser, et atteindre une plus grande technicité. Cette modernisation nécessite de nouvelles compétences que peut apporter la diaspora. Notre ambition doit permettre à nos ressortissants de revenir, de partager leurs qualifications, pour améliorer la productivité et cela dans tous les secteurs. La diaspora a un rôle clef dans la pérennisation des investissements. Vous le savez, le pays a connu des moments difficiles en 2012… Dans d’autres régions qui ont connu des crises similaires, les investisseurs plient bagage au moindre bruit de bottes et pénalisent ainsi des pans entiers de l’économie. Au Mali, cela n’a pas eu lieu grâce à la diaspora. Les investissements de la diaspora s’effectuent sur le long-terme. Il y a moins de risques qu’elle s’en aille. C’est pourquoi nous accordons un peu plus d’importance à toutes les initiatives en provenance de la diaspora.
La diaspora a déjà beaucoup soutenu l’économie lors de la crise en 2012. Comment peut-elle aider davantage ?
Oui, la diaspora a soutenu l’économie, a soutenu l’armée, en envoyant des ressources, effectuant des transferts. Ces montants participent au pouvoir d’achats des ménages et ne servent qu’à des besoins ponctuels. Nous attendons désormais de la diaspora qu’elle développe davantage des investissements productifs et qu’elles viennent transférer ses compétences.
Concrètement, comment faciliter le retour et les investissements de la diaspora ?
Excellente question ! Aujourd’hui, nous sommes dans un processus de relecture du code des investissements. Dans le cadre de cette relecture, nous réfléchissons à des dispositifs spécifiques permettant à la diaspora de revenir plus facilement. Un exemple : Récemment, la chaine de luxe Sheraton a ouvert un hôtel à Bamako, mais pour faire fonctionner cet hôtel, il faut du personnel qualifié, pas toujours disponible. A Dubaï, le chef cuisinier est un Malien, j’étais surpris mais fier. Je me suis dit qu’il fallait qu’il vienne travailler à Bamako. Pour cela, il a besoin que nous lui garantissons un certain nombre de choses basiques : Faciliter l’accès aux logements, faciliter le rapatriement de ses biens, pouvoir importer une voiture sans payer de droits de douane. A l’Etat de pouvoir mettre en place ce cadre qui va favoriser le retour des compétences. L’imagination est le seul frein, les besoins ne manquent pas.
La diaspora, soucieuse d’entreprendre, est confrontée à deux difficultés : la corruption à tous les niveaux, et le népotisme… Que faites-vous pour lutter contre ces pratiques ?
C’est un fléau terrible. La nécessité d’améliorer la gouvernance demeure une réelle problématique dans nos pays. Nous ne pouvons pas réussir à sortir des difficultés si ces aspects ne sont pas pris en charge et corrigés. Une des premières étapes pour lutter contre la corruption réside dans l’accès à l’information. S’il faut prendre l’avion et aller à Bamako pour savoir combien coûte la création d’une entreprise, cela pénalise l’investissement. Et même, quand vous êtes sur place, pour obtenir une information, il faut motiver votre interlocuteur avec un billet de 2 000, 5 000, 10 000 francs CFA. Il faut que cela s’arrête. Pour cela, l’information doit être accessible à tous et facilement. Ensuite, pour éviter le contact humain, terrain propice à la corruption, il faut accroître la dématérialisation. Nous avons déjà commencé à l’agence pour la promotion des investissements (API). A partir du dépôt du dossier, tout le reste du processus se fait en ligne. L’année prochaine, au premier trimestre 2019, nous espérons permettre la création d’entreprises sur internet… En limitant les contacts, nous luttons contre la corruption.
Propos recueillis par Stéphanie Hartmann
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