Le procès du capitaine Ildephonse Nizeyimana, surnommé le "boucher de Butare" et accusé d'être le principal responsable du génocide des Tutsi en 1994 dans le sud du pays, s'est ouvert lundi devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) à Arusha.
Poursuivi pour crimes de génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre, le capitaine Nizeyimana, aujourd'hui âgé de 48 ans, était commandant en second de l'Ecole des sous-officiers (ESO) de Butare (sud) au moment des faits et un proche de l'ex-président Juvénal Habyarimana selon l'accusation.
"Il y a une multitude de cas où le capitaine Nizeyimana a ordonné à ceux qui étaient sous son influence d'attaquer, tuer et violer des civils identifiés comme Tutsi", a affirmé Drew White, du bureau du procureur.
Le magistrat canadien a précisé que les crimes imputés à l'officier avaient été commis dans la préfecture de Butare en avril et mai 1994.
M. Nizeyimana est notamment accusé d'avoir ordonné l'exécution d'une ancienne reine rwandaise, veuve du Roi Mutara III, Rosalie Gicanda, une figure symbolique pour tous les Tutsi dont étaient issus les monarques rwandais.
Le représentant du procureur a annoncé qu'il citerait, entre autres témoins, des victimes et d'anciens collègues de l'accusé.
Parmi les victimes, le témoin ZAR "qui était une domestique à la maison de la reine Rosalie Gicanda, décrira comment 10 soldats sont arrivés à bord d'un véhicule, ont communiqué par radio et ont enlevé la famille de Gicanda", a promis M. White.
Un autre témoin attendu, ZAP, "faisait partie de cette famille, en tant que petite-fille de la Reine Rosalie Gicanda.Elle aussi décrit comment les soldats sont arrivés au domicile de Gicanda, ont enlevé la famille au bout du canon, conduit la famille d'abord à l'ESO, puis dans la campagne où ils ont ordonné à tout le monde de sortir du véhicule", a-t-il poursuivi.
"Au moment où le groupe priait, les soldats les ont abattus.ZAP a constaté que la vieille reine Rosalie Gicanda avait été abattue.ZAP elle-même a été blessée mais a pu survivre", a dit le magistrat canadien, résumant les propos de son témoin.
Ces personnes témoignant devant le TPIR sont désignées sous des noms de code afin de les protéger de représailles éventuelles.
Selon le procureur, les ordres de M. Nizeyimana étaient exécutés parce qu'en tant qu'officier natif de Gisenyi (nord), la préfecture d'origine du président Juvénal Habyarimana, il avait des pouvoirs qui dépassaient de loin son rang officiel au sein de l'armée.
"Chef reconnu de la tendance dure chez les militaires de Butare, Nizeyimana était célébré dans des chansons locales pour sa haine virulente à l'égard des Tutsi", écrivait à son propos l'historienne américaine aujourd'hui décédée Alison Des Forges, dans son livre "Aucun témoin ne doit survivre".
"Des accusations complètement ridicules", avait déclaré vendredi à l'AFP l'avocat canadien du capitaine, John Philpot, pour qui son client est poursuivi "comme d'autres" parce qu'il a travaillé sous le régime du président Juvénal Habyarimana.Me Philpot a par ailleurs contesté que son client soit un proche de l'ex-président.
M. Nizeyimana, qui clame son innocence, avait été arrêté le 5 octobre 2009 à Kampala en Ouganda.
Le TPIR n'a plus qu'un seul détenu en attente de procès: le pasteur pentecôtiste Jean Uwinkindi.Dix accusés sont encore en fuite, dont le financier présumé du génocide, le richissime homme d'affaires Félicien Kabuga.
Le tribunal doit terminer tous ses travaux, en première instance et en appel d'ici 2014.
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