Si cette mobilisation populaire n'a pas engendré de manifestation de soutien comme en Tunisie, autre pays voisin de l'Algérie, nombreux sont ceux, au Maroc, qui affichent empathie voire enthousiasme, notamment sur les réseaux sociaux.
Le nom du président algérien Abdelaziz Bouteflika, au pouvoir depuis 1999 mais qui a fini par renoncer à un cinquième mandat, arrive en tête des tendances nationales sur Twitter et des flots de messages de soutien sur Facebook.
La presse traditionnelle relaie de manière plus factuelle."Bouteflika le crépuscule", titre l'hebdomadaire Tel Quel."Printemps algérien: et maintenant?", s'interroge le quotidien "Les Inspirations éco".
Parmi les rares prises de position publiques, la Coordination maghrébine des droits humains, que préside une militante de renom, Khadija Ryadi, a salué dans un communiqué "le peuple algérien pour sa lutte contre le 5e mandat" et appelé "toutes les forces démocratiques de la région à soutenir le peuple algérien".
- "Respect!" -
Maati Monjib, historien et autre militant de renom a exprimé sur Facebook son "bonheur immense" face à "cette grande victoire"."Cette Algérie dont on décriait l'immobilisme a renoué avec son histoire (...).Respect!", s'est exclamée sur Facebook Nadia Lamlili, journaliste et romancière.
Bien que les deux nations entretiennent des relations conflictuelles, les peuples sont très proches culturellement.
Un des slogans des manifestants algériens, "Opprimé dans mon pays", reprend ainsi un célèbre chant des supporters Ultras du club de football du Raja Casablanca.
Côté marocain, certains comparent aussi la situation politique des deux pays, séparés une frontière de 1.500 km fermée depuis 1994.
"Bravo aux Algériens pour cette victoire", a lancé sur Twitter Fadel Abdellaoui, un influenceur.Mais, "SVP, ne faites pas l'erreur du Maroc: prenez le temps du débat pour un nouveau contrat social (...).Votre pouvoir, comme notre +makhzen+ (réseau du pouvoir, en arabe marocain) ne lâchera rien", ajoute-t-il.
Kamal Lahbib, organisateur d'un "Forum social maghrébin", appelle lui les manifestants algériens à "la vigilance contre les risques d'atomisation du mouvement".
Pour certains, la contestation en Algérie réveille en effet le souvenir du début d'année 2011, qui avait vu le Maroc marqué par des manifestations pro-démocratie à partir du 20 février, la mobilisation prenant le nom de "Mouvement du 20-Février".Un discours royal prononcé le 9 mars 2011 avait annoncé une révision de la Constitution.
Adopté durant l'été, le nouveau texte avait été suivi en fin d'année par la victoire historique aux législatives du parti Justice et développement (PJD, islamiste), sans toutefois bouleverser l'équilibre des pouvoirs dans le royaume.Le M-20 s'est progressivement morcelé et essoufflé depuis.
Huit ans plus tard, les anciens du 20-Février, que le pouvoir considère comme des "nihilistes", restent pour la plupart amers.Certains expriment depuis trois semaines leur admiration pour les manifestants algériens et leur "civisme", avec une mention spéciale pour les journalistes qui ont bravé les consignes de silence de leur hiérarchie.
"La victoire reste encore relative mais le peuple algérien nous a redonné espoir après les déceptions post-printemps arabe", assure Sara Soujar, une ancienne du "20-février", jointe par l'AFP.
"Le système essaye de gagner du temps et de diviser la rue", juge le journaliste Imad Stitou, un autre ancien du "20-février", également joint par l'AFP.
- Mutisme officiel -
"Chers Algériens, notre 20 février était votre 22 février.Ne faites pas en sorte que le discours du 11 mars soit (l'équivalent de) notre 9 mars", écrit sur Twitter Omar Hayani, un élu local de la FGD, un parti de gauche.
Lundi 11 mars, Abdelaziz Bouteflika a certes renoncé à un cinquième mandat mais a aussi prolongé de facto son 4e en annonçant le report sine die de la présidentielle.Il a chargé une "conférence nationale" de réviser la constitution et d'organiser ensuite le scrutin, sans date butoir.
L'ébullition politique en Algérie n'a pour l'heure suscité aucun commentaire officiel à Rabat, alors que les relations entre les deux poids lourds du Maghreb sont plombées depuis des décennies par le dossier du Sahara occidental.
Cette ancienne colonie espagnole est en grande partie contrôlée par le royaume, qui la considère comme partie intégrante de son territoire, alors que le Front Polisario, soutenu par l'Algérie, réclame l'indépendance.
En novembre dernier, les appels du roi du Maroc à "un dialogue franc et direct" via "un mécanisme conjoint", sont restés sans réponse.
Jeudi, comme la semaine passée, le porte-parole du gouvernement marocain a refusé de répondre, lors de son point de presse hebdomadaire, à toute question sur la situation en Algérie.
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