Après une première demi-journée passée avec le roi et commandeur des Croyants Mohammed VI, centrée sur le dialogue inter religieux, le pape s'est consacré aux minuscules communautés chrétiennes de ce pays où l'islam est religion d'État
"Continuez à vous faire proches de ceux qui sont souvent laissés de côté, des petits et des pauvres, des prisonniers et des migrants", leur a-t-il conseillé dimanche en soulignant que l'important n'était pas d'être nombreux mais d'illustrer très concrètement les enseignements de l'Église.
"Les chemins de la mission ne passent pas par le prosélytisme, qui conduit toujours à une impasse", a fortement insisté le pape pendant une rencontre avec des représentants chrétiens à la cathédrale de Rabat."S'il vous plait, pas de prosélytisme!", a-t-il martelé en sortant de son texte.
Cette remarque prend une résonance particulière dans un pays où le prosélytisme actif auprès de musulmans marocains peut valoir jusqu'à trois ans de prison.
En revanche, les musulmans ont en théorie le droit de se convertir si c'est leur propre choix, une ouverture notable par rapport à d'autres pays comme les Émirats arabes unis où la conversion est punie par la peine de mort.
- "Chassez vos peurs" -
Le souverain pontife a aussi plaidé pour la liberté de culte et la liberté de conscience samedi dans un discours adressé au roi Mohammed VI.Ce dernier a pour sa part rappelé la tradition de tolérance religieuse de son pays, tout en précisant: "je protège les juifs marocains et les chrétiens d'autres pays qui vivent au Maroc".
Le monarque n'a fait aucune référence à l'existence très discrète de milliers de Marocains convertis au christianisme qui plaident depuis 2017 pour bénéficier pleinement de la liberté de culte inscrite dans la Constitution.
Dimanche après-midi, François, 82 ans, a célébré devant près de 10.000 fidèles une grande messe en espagnol dans un complexe sportif couvert de Rabat.
"Longue vie au pape!", a crié la foule chauffée à blanc dans un tonnerre d'applaudissements.
Aussi fervente que festive, l'assemblée réunissait une majorité de jeunes subsahariens, mais aussi des Européens -des familles, des seniors, des jeunes et des Philippins.On pouvait aussi croiser dans les travées quelques Marocains, dont un grand nombre de policiers en civil.
Un nouvelle fois, le chef des catholiques a plaidé dans son prêche pour la tolérance religieuse et la coexistence pacifique des croyants."La tentation de croire en la haine et en la vengeance comme moyens légitimes d'assurer la justice de manière rapide et efficace, nous menace toujours", a-t-il dit.
"Changer vos c-urs, chassez vos peurs", a entonné le ch-ur tandis que le pape saluait plusieurs officiels marocains en tenue traditionnelle, djellaba blanche et tarbouche rouge, dont les ministres de l'Intérieur, des Affaires étrangers et des Affaires islamiques, mais aussi des représentants de la communauté juive.
"Je suis ému de le voir, je suis ému d'avoir sa bénédiction", lance Samba, un Burkinabé de 18 ans de passage à Rabat en attendant de "passer en Europe"."Ca fait longtemps que j'attendais ce moment.Je voulais le rencontrer mais ce n'était pas possible.Mais il est là et il faut en profiter", ajoute ce jeune migrant, un bonnet rouge vissé sur la tête.
Samedi, le pape avait plusieurs fois évoqué les "souffrances" des migrants en dénonçant "l'indifférence et le silence".Il a terminé sa journée en rencontrant un petit groupe de migrants dans un centre humanitaire Caritas.
- "Vivre ensemble" -
Dimanche matin, quelques centaines de fidèles, européens ou subsahariens, étaient venus l'attendre devant la cathédrale, au c-ur du vieux Rabat.Le Maroc, pays majoritairement musulman, compte environ 30.000 catholiques - dix fois moins qu'avant son indépendance, en 1956-, quelques milliers de protestants et de juifs, ainsi que des minorités bahaïs et chiites .
"La visite du pape montre que le vivre-ensemble est possible au Maroc", a commenté Antoine, un Nigérian de 36 ans.Mais "il y a des choses à améliorer, notamment la question des migrants et celle des chrétiens marocains", a nuancé celui qui travaille à Rabat dans une association de défense des droits des migrants.
Le souverain pontife a quitté le Maroc après la messe, célébrée 34 ans après la venue de Jean-Paul II en 1985.
Moment fort de son déplacement, une déclaration commune appelant à "préserver" Jérusalem comme "lieu de rencontre et symbole de coexistence pacifique où se cultivent le respect réciproque et le dialogue" a été signée samedi par le chef des Catholiques et le commandeur des Croyants.
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