Le gouvernement tunisien tentait mercredi de rétablir la sécurité en donnant un grand coup de balai dans les hautes sphères de la police, pilier du régime de l'ex-président Zine El Abidine Ben Ali.
Confrontée à la grogne des fonctionnaires, aux pillages et à la propagation de rumeurs folles, l'équipe du Premier ministre Mohammed Ghannouchi, débarrassée depuis le 27 janvier des derniers caciques du régime Ben Ali, a frappé un grand coup.
Une trentaine de hauts gradés de la police ont été débarqués, un militaire a été nommé à la direction de la sûreté nationale, de nouveaux directeurs ont été placés à la tête de la police dans sept régions clés et l'ancien ministre de l'Intérieur de Ben Ali, en résidence surveillée depuis le 13 janvier, a été placé en garde à vue.
L'amiral Ahmed Chabir, nouveau directeur général de la sûreté nationale, a pour mission de relancer une machine sécuritaire noyautée par les tenants de l'ancien régime et de remettre au travail des milliers de policiers qui avaient déserté les rues, par crainte de représailles de la population ou par fidélité au président déchu le mois dernier.
Mercredi matin, la presse de Tunis apportait un franc soutien aux autorités dans des éditoriaux défendant un lien consubstantiel entre "démocratie et sécurité".
"Le retour du policier, ce soldat de la démocratie, dans la rue après une éclipse qui a jeté le pays dans l'inquiétude et le désarroi, redonne confiance aux Tunisiens", écrit l'éditorialiste du Quotidien.
Un défi difficile dans un pays cadenassé depuis 23 ans, où quelque 100.000 policiers et des milliers d'adhérents au parti parti RCD (Rassemblement constitutionnel démocratique, qui revendique plus de 2 millions de membres) ont constitué les bras et les yeux du système de répression de Ben Ali.
L'armée, qui s'est rangée du côté de la révolution en refusant de tirer sur les manifestants, ne compte que 35.000 hommes, essentiellement aux frontières.
Mardi soir, à la télévision nationale, le nouveau ministre de l'Intérieur Farhat Rajhi a livré un incroyable témoignage sur les forces puissantes qui seraient encore à l'oeuvre au coeur de l'Etat.
"Lundi soir, entre 2.000 et 3.000 personnes ont attaqué mon ministère.Grâce au général Rachid Ammar (figure de l'armée qui a promis d'être le garant de la révolution, ndlr) et aux forces anti-terroristes, j'ai pu m'enfuir, mais on m'a volé mon manteau, mes lunettes et mon téléphone portable", a raconté le ministre.
"Cinquante envahisseurs, dont plusieurs étaient armés, ont été arrêtés avant d'être relâchés, ce qui montre une défaillance sécuritaire et une complicité entre les agresseurs et les services d'ordre", a affirmé Farhat Rajhi, dénonçant un "complot contre l'Etat".
A l'issue d'un conseil des ministres mardi, l'équipe de transition a donné des gages de fermeté aux Tunisiens mais aussi aux partenaires internationaux.
Acte hautement symbolique alors que l'ONU a fait état de 219 morts ces dernières semaines, le gouvernement a approuvé l'adhésion du pays à la convention internationale contre la torture et trois autres protocoles internationaux relatifs aux droits de l'homme.
Plus concrètement, il a annoncé une augmentation des salaires des policiers, favorisant -- une première en 23 ans -- les cadres moyens, qui ont obtenu 140 dinars (72 euros) contre 49 pour les cadres supérieurs.
Le couvre-feu, en vigueur depuis le 13 janvier, a été maintenu, un numéro vert créé pour recueillir les plaintes des victimes de violences, et chaque citoyen appelé à la responsabilité pour "le bien de la nation".
Même les prisonniers, dont 9.500 se sont évadés pendant des émeutes en janvier, sont appelés "à rejoindre leur maison d'arrêt pour régulariser leur situation", indique un encart dans la presse.
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