Répondant à l'appel d'un homme d'affaires exilé, des centaines de personnes ont bravé vendredi soir l'interdiction de protester contre le pouvoir, au Caire et dans d'autres villes, réclamant le départ du président aux cris de "Sissi dégage".
Les forces de l'ordre ont dispersé les protestataires à l'aide de gaz lacrymogène, et depuis, elles ont arrêté par centaines des manifestants, ainsi que des journalistes et des militants politiques.
Ces arrestations ont été dénoncées par des ONG internationales comme Amnesty International, Human Rights Watch ou The Committee to protect journalists (CPJ).
Une coalition de gauche, le Mouvement démocratique civil, a demandé mardi aux autorités de relâcher toutes les personnes arrêtées, et appelé à un "dialogue national".
- Appel à un "dialogue national" -
Le Centre égyptien pour les libertés et les droits a affirmé que 1.003 personnes avaient été arrêtées depuis vendredi.Le Centre pour les droits économiques et sociaux, a lui parlé de 1.298 arrestations.
Parmi les dernières personnes arrêtées, figurent plusieurs universitaires ou militants connus pour leurs positions critiques vis-à-vis du gouvernement.
Khaled Dawoud, ancien responsable du parti libéral d'opposition Al-Dostour et membre du Mouvement démocratique civil, a été interpellé et déféré mercredi devant la justice, selon ses avocats.
Ce politicien et journaliste connu a été accusé d'avoir diffusé de fausses nouvelles et d'avoir rejoint un groupe "terroriste".Il a été placé en détention provisoire pour 15 jours.
Il sera jugé dans la même affaire que deux autres personnes: la célèbre avocate et militante des droits humains Mahienour El-Masry et Kamal Khalil, un militant syndicaliste, tous deux arrêtés la semaine dernière.
Hazem Hosni, professeur de sciences politiques à l'Université du Caire, a aussi été arrêté mardi.
L'universitaire faisait partie de l'équipe de campagne de Sami Anan, candidat à la présidentielle en 2018 face à M. Sissi.Ancien général et chef d'état-major, M. Anan avait été arrêté après avoir annoncé sa candidature.
Hassan Nafaa, autre professeur à l'Université du Caire, a également été arrêté mardi à son domicile.
Dans son dernier tweet, il écrivait: "je n'ai pas de doute que le pouvoir absolu de Sissi va mener à une crise.C'est dans l'intérêt de l'Egypte qu'il quitte le pouvoir aujourd'hui".
Après cette vague d'interpellations, les autorités n'avaient encore fait aucun commentaire officiel mercredi.
En juillet 2013, M. Sissi avait piloté la destitution par l'armée du président islamiste Mohamed Morsi.Au cours du même été, des centaines de partisans des Frères musulmans avaient été tués lors de la dispersion d'un sit-in au Caire, selon des ONG internationales.
Depuis, les manifestations contre le pouvoir ont été interdites et la répression s'est étendue aux militants laïcs et de gauche.
- "Vrai leader" -
Encouragé par la mobilisation du 20 septembre, l'entrepreneur Mohamed Aly, en exil en Espagne, a lancé samedi un nouvel appel à descendre dans la rue vendredi prochain.Dans une série de vidéos diffusées sur internet, il avait accusé le président et l'armée de corruption.Allégations rejetées par M. Sissi.
Le président égyptien jouit de soutiens à l'étranger où plusieurs pays comme les Etats-Unis voient en lui un rempart contre les extrémistes.
En marge de l'Assemblée générale de l'ONU à New York, où se trouve aussi M. Sissi, le président américain Donald Trump avait qualifié lundi son homologue égyptien de "vrai leader".
Depuis la semaine dernière, la présence policière a été renforcée en Egypte et surtout autour de la place Tahrir au Caire, où se sont tenus les rassemblements qui avaient mené, en 2011, à la chute du président Hosni Moubarak.
Ces derniers jours, l'Egypte s'est également attirée les critiques des organisations de défense de droits humains après des perturbations observées sur des applications comme Messenger et sur des sites comme celui de la BBC.
L'organisme général de l'information (OGI), chargé de gérer les accréditations de la presse étrangère en Egypte, a prévenu samedi les journalistes qu'ils ne devaient pas "exagérer" dans leur couverture de l'actualité.
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