Des papiers jaunis, rongés par les termites, s'entassent en piles dans une tente où règne une chaleur accablante: ces documents, qui racontent l'histoire du Sud-Soudan, sont aujourd'hui l'objet de tous les soins, à la veille de l'indépendance de la région.
"C'est un travail considérable, mais il est très important de préserver ces documents avant qu'il ne soit trop tard", affirme l'archiviste Youssef Fulgensio Onyalla, chargé de ce travail de sauvetage par le gouvernement sudiste et de la numérisation de tous les documents.
En arabe et en anglais, ils s'empilent au côté de boucliers traditionnels et de flèches ou de cartes dessinées à la main vieilles d'un siècle.Un trésor pour les historiens étudiant l'histoire tourmentée du Sud-Soudan.
"Notre travail, qui consiste à trier et compiler tous ces documents, est une priorité pour l'histoire du Sud-Soudan.C'est très excitant de se demander ce que nous allons trouver ici", ajoute M. Onyalla.
Des négociations en cours pour fixer les nouvelles frontières internationales du Sud et du Nord-Soudan, partageant notamment les champs pétroliers, sont basées sur les cartes de l'ère coloniale, et les archivistes sont à la recherche de tout ce qui pourrait les aider.
"Si nous trouvons des documents sur la frontière entre le Nord et le Sud, nous les mettons de côté précieusement", ajoute M. Onyalla.
Dévasté par 22 ans de guerre civile entre le gouvernement de Khartoum et les rebelles du Sud, la région avait d'autres priorités jusqu'ici que la préservation de documents coloniaux.
"Beaucoup ont été endommagés ou détruits", souligne M. Onyalla.Les experts estiment à quelque 20.000 le nombre de documents, allant du début du 19e siècle aux années 1980.
"Préserver notre héritage signifie préserver notre histoire", a déclaré le ministre sudiste de la Culture, Gabriel Changson Chang.
"Nous voulons que ces documents soient disponibles pour les générations à venir, comme une source de matériel de recherche et pour retracer nos racines et notre histoire", a-t-il expliqué.
Une tente a été provisoirement montée en 2007 pour stocker les documents et la construction d'un bâtiment en dur a, pour le moment, été repoussée.
"Les documents sont à l'abri de la pluie ici dans la tente, mais en fin de matinée le soleil fait qu'il est difficile d'y rester trop longtemps", dit M. Onyalla."Nos travaillons aussi vite que possible pour les scanner avec des appareils numériques".
"Tout ceci n'est pas juste un tas de papiers, c'est la mémoire du nouveau pays Sud-Soudan", estime John Ryle, directeur du Rift Valley Institute, un organisme de recherche soutenant le travail de numérisation des documents, et également professeur d'anthropologie à New York.
"L'une des rares choses que presque tous les Sud-Soudanais ont en commun est l'expérience de l'oppression et l'exploitation", estime-t-il.
"Ces choses sont décrites dans ces archives.C'est pour cela que c'est extrêmement important".
Le Sud-Soudan, qui est en passe de devenir l'un des pays les plus pauvres de la planète après son indépendance, a avant tout besoin d'hôpitaux, d'écoles et de routes.
"Mais la construction d'un nouveau pays ne concerne pas seulement les routes et l'infrastructure.Il s'agit aussi de créer une identité nationale sur les bases d'identités ethniques très disparates", ajoute M. Ryle.
"En tant que nouvel Etat, le Sud-Soudan a surtout besoin de devenir une nouvelle Nation", renchérit Jok Madut Jok, un universitaire sud-soudanais, professeur à l'université de Loyola Marymount en Californie.
Sous la tente humide, une affiche datant de 1972, éditée après un précédent accord de paix qui avait duré dix ans, montre éléphants, antilopes et girafes."Nous aimerions le rééditer.Cela pourrait ramener les touristes", espère Youssef Fulgensio Onyalla.
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